Accueil
Le quotidien du droit en ligne

Articles

L’extension de l’immunité pénale aux collaborateurs du président – Un retour à la raison d’Etat

La cour d’appel de Paris vient de confirmer l’attribution d’une immunité pénale au directeur de cabinet du président de la République. A la différence du parquet qui avait fondé cette immunité sur la notion d’irresponsabilité (art. 67, al. 1er, Const.), il s’est appuyé sur celle d’inviolabilité (art. 67, al. 2). Quoique plus séduisante et moins absolue dans ses effets, une telle solution ne convainc pas entièrement. Elle met cruellement en lumière la dimension invasive de l’immunité pénale accordée au président de la République par la révision constitutionnelle de 2007.

Séparation d’un couple surendetté et sort de l’immeuble

Le second volet du dossier consacré au sort du logement en cas de séparation des époux fait le point sur des questions parfois très techniques mais souvent incontournables. On pense bien évidemment aux difficultés relatives à la liquidation des intérêts patrimoniaux ou aux aspects fiscaux de la désunion. Mais il convient également de s’interroger sur le devenir des aides au logement et sur quelques subtilités du droit international privé. Et lorsque s’ajoute à la séparation des difficultés financières — cas de plus en plus fréquent —, il devient nécessaire de s’intéresser aux règles qui régissent le droit du surendettement.

Délit d’aide à l’entrée, à la circulation et au séjour irréguliers : controverses sur la légitimité d’un « délit d’humanité »

La loi du 16 juin 2011 relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité dont le premier objectif était de transposer trois directives communautaires de 2008 et 2009 (directives « retour », « carte bleue » et « sanctions ») a apporté une modification en profondeur du droit des étrangers, bien au-delà de la lettre de ces textes européens. L’objectif de ce dossier n’est pas de faire le point sur l’ensemble de ces modifications (à ce sujet, v. le bulletin spécial du Dictionnaire permanent Droit des étrangers, juill. 2011) mais de s’arrêter sur quelques liens entre le droit pénal et le droit des étrangers. On assiste depuis 1945 à un double mouvement, à la fois d’administrativisation de la procédure et de pénalisation avec une multiplication des incriminations touchant les étrangers. Ce recours systématisé à la norme pénale pose la question de la fonction de celle-ci. Le « délit d’entraide » aux étrangers en situation irrégulière est symptomatique de la difficulté pour l’État à conjuguer lutte contre le trafic de migrants à grande échelle et humanisme. Enfin, la politique criminelle des États en la matière est influencée par le droit de l’Union européenne et ce sont les garanties individuelles des étrangers qui en pâtissent comme l’illustre bien le nouveau schéma de la procédure de rétention administrative.

L’encadrement par le droit de la fonction publique des cadeaux faits aux agents

Le droit de la fonction publique, comme toutes les autres branches du droit administratif, reste largement un droit objectif, c’est-à-dire peu porté sur des formulations concrètes. Or, les relations entre agents publics et administrés sont souvent empreintes d’une dimension personnelle, dans laquelle l’amitié, la reconnaissance, mais aussi les pressions, ont leur part. Certains administrés peuvent être tentés de l’exprimer par l’octroi de cadeaux faits à l’agent (ou au service) responsable du traitement de leur dossier. Les règles déontologiques s’opposent a priori à ce qu’un agent accepte de tels cadeaux, qui peuvent faire craindre pour son impartialité. En l’absence de dispositions explicites dans le statut général, c’est la jurisprudence qui contrôle, en principe à l’occasion de contentieux disciplinaires, le caractère régulier ou non d’un cadeau qui serait fait à un agent public.

Les garanties financières des marchés privés de travaux

L’exécution financière des marchés de travaux résulte de règles contractuelles. Le législateur a cependant estimé nécessaire d’encadrer la liberté des parties d’abord en déterminant un régime d’ordre public des clauses autorisant le maître de l’ouvrage à opérer des retenues de garantie (L. 1971), ensuite en imposant la mise en place d’une garantie des sommes dues à l’entreprise (C. civ., art. 1799-1). Dans les deux cas, les garanties visent à limiter le pouvoir du maître de l’ouvrage sur le paiement de son cocontractant.

Logement en société civile immobilière et séparation : les difficultés à résoudre

Le mois dernier, nous vous avons proposé un dossier sur les comptes bancaires et la séparation. Ce mois-ci, le thème est toujours celui de la rupture, mais il s’intéresse plus spécifiquement au sort du logement. La question, en pratique, est incontournable. Elle se pose parfois bien en amont de la désunion lorsque l’un des époux, partenaires pacsés ou concubins souhaite quitter le domicile familial, éventuellement avec les enfants communs, sans pour autant se voir reprocher une violation des droits de l’autre parent, ou tout simplement, pour les couples mariés, la méconnaissance de son obligation à une vie commune. Dans le cadre d’un divorce, la question de l’occupation du logement familial pendant l’instance en divorce est généralement le premier point abordé lors de l’audience de conciliation. Par la suite, et la problématique est la même pour les couples non mariés, l’attribution du logement devra être définitivement arrêtée, que les parties soient d’accord ou non. Les choses se compliquent en général lorsque le bien objet de la convoitise est détenu par une SCI ou bien encore fait l’objet d’une voie d’exécution. Nous aborderons, en novembre, dans la deuxième partie, d’autres difficultés qu’il est important également de bien prendre en considération: la liquidation du régime matrimonial et des intérêts patrimoniaux, le cas du surendettement, les aspects fiscaux, les aides au logement, etc.

Les groupes de logement social

La notion de «groupe de sociétés» n’a pas de définition unitaire en droit français. Elle n’en recouvre pas moins une réalité incontournable du monde de l’entreprise. Le secteur du logement social n’est pas resté à l’écart de ce phénomène et de grands groupes s’y sont développés. L’idée d’un intérêt de groupe est cependant parfois contrariée dans ce secteur par l’existence d’un intérêt général (la production et la gestion de logements sociaux), limitant ou interdisant certains flux financiers ou de services entre les sociétés membres du groupe. La nouvelle loi de simplification du droit du 17 mai 2011 apporte quelques assouplissements bienvenus, afin de fluidifier le fonctionnement des conglomérats du logement social. Des rigidités subsistent cependant.  

Régimes différenciés : oui aux recours; non à la motivation et au débat contradictoire

M. A obtient du tribunal administratif de Nantes l’annulation de la décision par laquelle le directeur du centre pénitentiaire de Nantes l’a placé en régime différencié du centre de détention. Le ministre de la Justice est débouté de son appel. Il saisit alors le Conseil d’État, lequel trouve ici l’occasion de fixer sa jurisprudence quant à cette mesure. Comprendre le régime différencié suppose de bien… différencier (sic) deux logiques. La première, apparemment légitime, tient au discours invoqué pour expliquer la « nécessité » de la classification des détenus. Il s’agirait, sous cet angle, de séparer le bon grain de l’ivraie. Pourquoi, en effet, faire supporter à l’ensemble des détenus des conditions strictes, alors que seule une poignée pose problème ? Le même discours est invoqué aux États-Unis, pays dont tout le système carcéral repose sur une différenciation et une ségrégation de « l’ivraie ». Immédiatement, le profane imagine certainement que Guy Georges et Michel Fourniret sont les destinataires d’un tel système; il n’en est rien. Ce sont les détenus indisciplinés ou disruptifs et non les « dangereux » qui y sont placés; la dangerosité pénitentiaire étant un concept très différent de celui de dangerosité criminologique. C’est qu’en réalité, la différenciation des régimes a pour objet de maîtriser les comportements de l’ensemble des détenus. Le Conseil d’État n’a manifestement pas mesuré quelles étaient les conséquences réelles d’un placement en régime différencié : celui-ci affecte inévitablement les droits et la réinsertion du détenu et n’a rien de commun avec le régime progressif d’antan. Il est au demeurant contraire aux prescriptions européennes. Seule la politique des petits pas explique que la haute juridiction se soit partiellement rendue aux arguments pressants du ministère.

Le sort des saisies pratiquées sur les comptes joints des époux

Au moment de la séparation, si l’enfant est souvent sujet à disputes, négociations, coups bas, l’argent, tristement appelé le «nerf de la guerre», cristallise également le conflit familial. Il convient, alors, sans attendre, de se préoccuper du sort des comptes bancaires pour éviter que l’un dilapide les sommes déposées sur le compte au détriment de l’autre; au besoin, avec l’aide du juge aux affaires familiales. À cet égard, les règles des régimes matrimoniaux et du droit bancaire doivent être savamment articulées. L’époux sera également bien inspiré de se prémunir contre d’éventuelles saisies diligentées à l’initiative des créanciers de «l’ex ». Autre difficulté récurrente: comment savoir si l’autre ne dissimule pas un compte bancaire à l’étranger? Nous avions déjà envisagé le cas du secret bancaire entre époux à l’occasion d’un précédent dossier (AJ fam. 2009. 378). La toute récente proposition de règlement portant création d’une ordonnance européenne de saisie conservatoire des avoirs bancaires pourrait bien, à l’avenir, devenir un outil particulièrement précieux.

Etablissements, services, vieillissement et territoires : l’impact de la dépendance

La question du vieillissement et de la dépendance peut être abordée du point de vue des structures qui sont en charge des personnes âgées dont les capacités décroissent et cela, au travers du prisme du « territoire » qui concerne en première approximation les logiques d’implantation de ces mêmes structures par rapport aux besoins de prise en charge. […] Trois mutations se sont invitées depuis une vingtaine d’années dans ce secteur de l’action sociale et chacune pèse sur l’allocation des moyens dans les territoires pour conférer à l’offre de services et de structures une rationalité et une efficience satisfaisantes. Tout d’abord, et c’est sans doute un élément premier, on a connu l’émergence de la « dépendance » dans les années 1990, autre dénomination du « vieillissement », qui a enclenché des effets structurels importants. Ensuite, en conséquence de la dépendance, la demande adressée à l’action sociale s’est transformée, notamment en la décentrant de son objet traditionnel, l’indigence ou la pauvreté ; et cela ne manque pas de générer des conséquences dans la constitution de l’offre. Enfin, en forme de produit global des deux mutations qui précèdent, l’encadrement juridique du secteur s’est modifié, mais pour l’instant avec davantage d’effets perturbants que de potentialités stabilisatrices.