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Liberté de religion du salarié : limites des ingérences

La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a précisé, dans un arrêt de chambre du 15 janvier 2013 concernant quatre requêtes, sa jurisprudence relative à la liberté de religion du salarié et, plus particulièrement, aux atteintes de l’employeur – ou étatiques – admissibles quant à la restriction de cette liberté.

par Anthony Astaixle 22 janvier 2013

Si les quatre requérants sont tous britanniques et chrétiens pratiquants, il convient, toutefois, de distinguer les faits, comme toujours essentiels en matière de liberté de religion, puisque ce contentieux repose, pour la grande majorité des cas, sur une étude, sinon casuistique, au moins d’espèce. En l’occurrence, donc, deux salariées, l’une hôtesse chez British Airways et l’autre infirmière dans un hôpital public, alléguaient que leurs employeurs respectifs leur avaient interdit de porter de manière visible une croix chrétienne autour du cou sur leur lieu de travail. Les deux autres salariés, l’un officier d’état civil, l’autre conseiller conjugal, alléguaient, quant à eux, qu’ils avaient été licenciés pour avoir refusé de s’acquitter de certaines de leurs tâches dont ils considéraient qu’elles revenaient à reconnaître l’homosexualité. 

La Cour a, tout d’abord, estimé que l’absence en droit anglais de disposition protégeant expressément le port de vêtements ou de symboles religieux sur le lieu de travail n’emportait pas en soi violation du droit de manifester sa religion car les questions soulevées par les requérants pouvaient être examinées par les juridictions internes et l’avaient été dans le cadre des plaintes pour discrimination déposées par les intéressés.

Ce postulat établi, elle a procédé ensuite, comme à l’accoutumée (V., par. ex., CEDH 3 févr. 2011, Siebenhaar, n°18136/02, Dalloz actualité, 15 févr. 2011, obs. A. Astaix isset(node/139610) ? node/139610 : NULL, 'fragment' => isset() ? : NULL, 'absolute' => )) .'"'>139610), à une mise en balance des droits du salarié, reposant, en l’espèce, sur les articles 9 (liberté de religion) et 14 (principe de non-discrimination) de la Convention européenne des droits de l’homme, et de ceux de l’employeur, voire de l’État, des requérants.

Aux cas particuliers, la Cour a sanctionné le raisonnement des tribunaux anglais s’agissant de l’hôtesse de l’air : en effet, la Cour a constaté qu’étaient en balance, d’une part, le désir de la requérante de manifester sa foi et, d’autre part, le souhait de son employeur de véhiculer une certaine image de marque. Si ce dernier objectif était sans conteste légitime, les tribunaux internes lui ont accordé trop de poids. La CEDH relève, d’ailleurs, qu’avant la requérante, d’autres employés de British Airways avaient été autorisés à porter des vêtements religieux (turban ou hijab) sans aucun effet négatif sur l’image de marque et la réputation de cette société. En outre, le fait que British Airways ait modifié son code vestimentaire pour autoriser le port visible de bijoux religieux montre que l’interdiction antérieurement applicable n’était pas d’une importance cruciale. En conséquence, les autorités internes n’ont pas suffisamment protégé le droit de la salariée de manifester sa religion, au mépris de l’article 9 de la Convention.

Grâce (ou à cause, selon les points de vue) à la mise...

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