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Droit à l’image versus droit à l’information sur un sujet de société

La liberté de la presse et le droit à l’information du public autorisent la diffusion de l’image de personnes impliquées dans un événement d’actualité ou illustrant avec pertinence un débat d’intérêt général, dans une forme librement choisie, sous la seule réserve du respect de la dignité de la personne humaine. 

par Sabrina Lavricle 20 avril 2017

Les 8 mai et 24 juillet 2011, M6 diffusa un reportage intitulé « Internet : serial menteuse », consacré à l’histoire d’une jeune femme qui avait fait croire, pendant plusieurs années, sur le réseau internet, qu’elle était atteinte d’affections graves. Le reportage comportait une séquence, filmée en caméra cachée, au cours de laquelle deux journalistes, se faisant passer, l’un, pour une amie de celle-ci, l’autre, pour son compagnon, consultaient M. X., médecin généraliste, auquel cette jeune femme s’était adressée à plusieurs reprises. Invoquant une atteinte à son droit à l’image, le médecin assigna la société Métropole télévision, éditrice de la chaîne de télévision M6, en réparation de son préjudice. La société défenderesse fut condamnée à payer la somme de 2 000 € au demandeur à titre de dommages-intérêts.

Par le présent arrêt, la première chambre civile casse et annule cette décision. Dans son pourvoi, la société éditrice prétendait que l’intéressé n’était pas « objectivement identifiable », sa voix ayant été déformée et son image floutée. L’argument, tendant en réalité à remettre en cause l’appréciation souveraine des juges du fond, est facilement écarté par la Cour de cassation qui relève au contraire qu’« il ressortait des témoignages des personnes ayant fréquenté son cabinet, en qualité d’infirmière, de déléguée médicale ou de patients, qu’elles avaient immédiatement et très clairement reconnu sa silhouette et sa physionomie, ainsi que son cabinet de consultation, de sorte que le médecin était identifiable ».

En revanche, la Haute cour accueille favorablement l’argument contestant l’existence d’une atteinte au droit à l’image. Statuant au visa des articles 9 (droit au respect de la vie privée) et 16 (droit à la dignité) du code civil et 10 de la Convention européenne des droits de l’homme (droit à la liberté d’expression), la première chambre civile énonce en attendu que « la liberté de la presse et le droit à l’information du public autorisent la diffusion de l’image de personnes impliquées dans un événement d’actualité ou illustrant avec pertinence un débat d’intérêt général, dans une forme librement choisie, sous la seule réserve du respect de la dignité de la personne humaine ». Elle relève que, pour se prononcer, les juges du fond ont retenu que la séquence litigieuse était précédée et suivie d’un commentaire en voix off de nature à dévaloriser la personne ainsi...

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