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Infractions terroristes : premières comparutions en « circuit court » à Paris

Les premières affaires en « circuit court » ont défilé, hier, devant la 16e chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Paris. Il s’agit d’infractions en lien avec le terrorisme, dont la simplicité permet d’éviter la fastidieuse saisine d’un juge d’instruction, et de soulager le pôle antiterroriste, aujourd’hui submergé.

par Julien Mucchiellile 8 février 2017

Sur la messagerie Telegram, Raphaël a dit : « Ils tuent nos frères, ils violent nos sœurs, il faut combattre les mécréants ». Il sait de quoi il parle. Il a recueilli énormément d’informations, des vidéos évocatrices, des scènes de chaos et de meurtre, d’apologie du martyr islamiste, avec en fond la harangue belliqueuse d’un « frère » qui appelle au djihad. Tout cela est distribué sur la chaîne Telegram « Sabre et lumière », où le jeune homme de 18 ans se renseigne sur sa nouvelle foi fervente en l’Islam et où il essaie de saisir les subtilités des enjeux géopolitiques du Moyen-Orient.

Raphaël est mis en cause dans la cohorte des jeunes « radicalisés ». Il est poursuivi pour « consultation habituelle » de sites terroristes, un délit éligible à la nouvelle procédure expresse, destinée à soulager la justice antiterroriste, en épargnant aux juges d’instruire les dossiers les plus simples. Ceux pour lesquels une instruction n’apporterait aucune plus value, contenant suffisamment d’éléments pour être portés devant un juge, qui pourra purger les tuyaux de l’antiterrorisme.

On appelle cette procédure le « circuit court » ( isset(node/183044) ? node/183044 : NULL, 'fragment' => isset() ? : NULL, 'absolute' => )) .'"'>lire notre article), parce qu’elle prend peu de temps. Les simples apologies d’un acte terroriste ne sont pas concernées : elles sont jugées depuis novembre 2014 en comparution immédiate. Tandis que c’est l’habituelle 16e chambre, la 16-2 – qui siège dans les locaux de la 12e chambre – qui, chaque premier mardi du mois, sera saisie de certaines affaires. Il s’agit des infractions de consultation habituelle d’un service de communication en ligne faisant l’apologie du terrorisme, d’apologie du terrorisme et des infractions commises en milieu carcéral ayant un lien avec le terrorisme.

Un « bain de sang » pour les « mécréants »

Raphaël étrenne la procédure. La présidente l’interroge longuement sur les charges qui pèsent sur lui, initialement rapportées par les services de renseignement, étoffées par les enquêteurs qui l’ont auditionné en octobre et novembre 2016. Elle pose les charges devant lui : « Vous avez proposé à votre petite amie, Camélia, de faire sa hijra (le fait pour un musulman d’émigrer vers une terre islamique, ndlr) en Syrie. Que comptiez-vous faire là-bas ? – Combattre – Vous savez manier les armes ? – Non – Ça risque d’être compliqué – Oui ». Raphaël est taiseux, tout à fait immobile à la barre. La présidente l’incite à confier les raisons de son engouement pour le djihad armé, mais il peine à mettre en ordre ses intentions de l’époque. « Jusqu’à quel point aviez-vous en tête la faisabilité de la chose ? » Le tribunal doit comprendre si Raphaël agissait en conscience, avait des desseins bien structurés. Des...

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