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L’étonnante caractérisation des agressions sonores au sens du code pénal

Le fait d’attiser les aboiements de ses chiens et de ne pas prendre les mesures nécessaires pour éviter ou limiter les conséquences nuisibles du comportement de ses animaux est constitutif d’agissements en vue de troubler la tranquillité d’autrui.

par Julie Galloisle 23 juin 2015

Un individu élevait, à son domicile, huit chiens de meute, ce qui occasionnait des nuisances sonores et olfactives continuelles à ses voisins. Après avoir initié plusieurs discussions, alerté le maire, signé une pétition et tenté une conciliation, le voisinage a porté plainte contre le propriétaire des chiens qui a été poursuivi pour agressions sonores en vue de troubler la tranquillité publique.

En plus des appels téléphoniques malveillants réitérés et, depuis la loi n° 2014-873 du 4 août 2014 (D. 2014. Chron. 1895 ), des envois réitérés de messages malveillants émis par la voie des communications électroniques, l’article 222-16 du code pénal réprime en effet « les agressions sonores en vue de troubler la tranquillité publique », punies d’un an d’emprisonnement et 15 000 € d’amende.

Si la caractérisation de l’infraction ne pose généralement aucune difficulté – tant son champ d’application est large, comme l’atteste, encore aujourd’hui, la présente espèce –, elle n’en reste pas moins un véritable défi à la logique juridique.

S’agissant de l’élément matériel, d’une part, la caractérisation des « agressions sonores en vue de troubler la tranquillité publique » appelle deux remarques.

La première est qu’en raison du pluriel employé par le texte d’incrimination, la preuve de l’existence de plusieurs agressions sonores semble devoir être rapportée. Pourtant, depuis une loi de 2003, les agressions n’ont plus à être réitérées (L. n° 2003-239, 18 mars 2003, art. 49). Doit-on en déduire qu’il est nécessaire que la victime subisse plusieurs agressions sans pour autant être réitérées ? Cela sous-entend-il qu’une seule agression suffise à consommer le délit ? La jurisprudence rendue en matière d’appels téléphoniques malveillants ayant considéré que « deux appels successifs, même effectués à des destinataires différents, suffisent à caractériser la réitération » (V. Crim. 4 mars 2003, n° 02-86.172, Bull. crim. n° 57 ; D. 2004. 316 , obs. S. Mirabail ; RSC 2003. 788, obs. Y. Mayaud ; JCP 2003. II. 10112, obs. J.-Y. Maréchal), on serait tenté d’adhérer à cette position (V. égal., en ce sens, M.-L. Rassat, Droit pénal spécial, 7e éd., Dalloz, coll. « Précis », 2014, n° 353 ;...

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