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Prise illégale d’intérêts : dissimulation et point de départ du délai de prescription

Si le délit de prise illégale d’intérêts se prescrit à compter du jour où la participation a pris fin, le délai de prescription de l’action publique ne commence à courir, en cas de dissimulation destinée à empêcher la connaissance de l’infraction, qu’à partir du jour où celle-ci est apparue et a pu être constatée dans des conditions permettant l’exercice des poursuites. 

par Sébastien Fucinile 26 janvier 2015

La question de la prescription de l’action publique a connu, avec un récent arrêt d’assemblée plénière (Cass., ass. plén., 7 nov. 2014, n° 14-83.739, Dalloz actualité, 21 nov. 2014, obs. C. Fonteix , note R. Parizot ; ibid. 2469, point de vue L. Saenko  ; Dr. pénal 2014. Comm. 151, obs. A. Maron et M. Haas ; Procédures 2014. Comm. 326, obs. A.-S. Chavent-Leclère), un profond bouleversement, qui ne conduit pas pour autant la chambre criminelle à modifier radicalement sa position jurisprudentielle en la matière. Elle affirme ainsi, dans un arrêt du 16 décembre 2014, que, « si le délit de prise illégale d’intérêts se prescrit à compter du jour où la participation a pris fin, le délai de prescription de l’action publique ne commence à courir, en cas de dissimulation destinée à empêcher la connaissance de l’infraction, qu’à partir du jour où celle-ci est apparue et a pu être constatée dans des conditions permettant l’exercice des poursuites ». En l’espèce, dans le cadre de l’affaire Servier, un praticien hospitalier, président jusqu’en 2003 de la commission d’autorisation de mise sur le marché de l’Agence française de sécurité sanitaire du médicament, a, dès 2004, fourni des prestations de conseil au groupe pharmaceutique, rémunéré par le biais de la société de son épouse, qui facturait les prestations à une filiale du groupe pharmaceutique. C’est, à notre connaissance, la première fois que la chambre criminelle applique la notion de dissimulation à la prise illégale d’intérêts pour en retarder le point de départ du délai de prescription. Toutefois, on ne peut affirmer qu’il s’agisse là d’une application de la jurisprudence dégagée par l’assemblée plénière.

S’agissant de la dissimulation, la chambre criminelle opère plusieurs distinctions. Certaines infractions sont dissimulées par nature, leurs éléments constitutifs impliquant une dissimulation. Il en est ainsi de l’abus de confiance (V. Crim. 5 juill. 1945, Bull. crim. n° 76 ; 11 déc. 2013, n° 12-86.624, Dalloz actualité, 8 janv. 2014, obs. S. Fucini ; AJ pénal 2014. 132, obs. J. Gallois ; RTD com. 2014. 426, obs. B. Bouloc ), de la tromperie (V. Crim. 7 juill. 2005, n° 05-81.119, D. 2005. 2998 , note A. Donnier ; AJ pénal 2005. 370, obs. J. Leblois-Happe ; RSC 2006. 84, obs. C. Ambroise-Castérot ; RTD com. 2006. 228, obs. B. Bouloc ), ou encore, pour ne citer que quelques exemples, de la simulation ou dissimulation d’enfants (V. Crim. 23 juin 2004, n° 03-82.371, D. 2005. 1399 , note M. Royo ; AJ pénal 2004. 366, obs. J. Coste ; RSC 2004. 883, obs. Y. Mayaud ; ibid. 897, obs. D. N. Commaret ). S’agissant des infractions dont les éléments constitutifs n’impliquent pas de dissimulation, la chambre criminelle admet également, mais de manière parcellaire, que la dissimulation des actes accomplis par l’auteur des faits est à même de retarder le point de départ du délai de...

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