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La rétention des « dublinés » est illégale

La Cour de cassation vient de juger que le droit français ne précisant pas les critères objectifs permettant de soupçonner qu’un demandeur d’asile devant être transféré dans un autre pays de l’Union européenne risque de prendre la fuite, ces personnes (couramment appelées « les dublinés ») ne peuvent être placées en rétention.

par Emmanuelle Maupinle 4 octobre 2017

Selon la première chambre civile, « en l’absence de disposition contraignante de portée générale fixant les critères objectifs sur lesquels sont fondées les raisons de craindre la fuite du demandeur d’une protection internationale qui fait l’objet d’une procédure de transfert, l’article 28, paragraphe 2, du règlement [Dublin III] est inapplicable ».

Dans son arrêt, elle rappelle que le placement en rétention des personnes concernées, par les dispositions des articles 2 et 28 du règlement du 26 juin 2013 dit « Dublin III », est possible lorsqu’il existe « un risque non négligeable de fuite ». Ce risque, pour la Cour de cassation, s’entend comme l’existence de raisons, fondées sur des critères objectifs définis par la loi, de craindre la fuite d’un demandeur de protection internationale qui fait l’objet d’une procédure de transfert.

Pour la Cour de justice de l’Union européenne, « ces textes doivent être interprétés en ce sens qu’ils imposent aux États membres de fixer, dans une disposition contraignante de portée générale, les critères objectifs sur lesquels sont fondées les raisons de craindre la fuite du demandeur d’une protection internationale qui fait l’objet d’une procédure de transfert. L’absence d’une telle disposition entraîne l’inapplicabilité de l’article 28, paragraphe 2, de ce règlement » (CJUE 15 mars 2017, Al Chodor, aff. C-528/15).

Dans l’affaire soumise à la Cour de cassation, M. X, de nationalité sri-lankaise, a présenté une demande d’asile. Le préfet a décidé, par arrêté, de sa remise aux autorités italiennes en vue du traitement de sa demande en application du règlement du 26 juin 2013. Par un second arrêté, M. X a été placé en rétention administrative au motif qu’il ne présentait pas les garanties propres à prévenir le risque de se soustraire à la mesure d’éloignement en attente de sa mise en œuvre effective. En jugeant, en l’absence de disposition contraignante de portée générale, que « le placement en rétention est régulier en la forme et que les conditions de fond sont remplies, dès lors que l’intéressé, dépourvu de passeport et connu sous un alias, n’a pas communiqué d’attestation d’hébergement ni justifié de ses ressources, de sorte qu’il n’offre pas de garanties suffisantes de représentation », le premier président de la cour d’appel de Paris a violé les dispositions du règlement Dublin III.