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Témoignage anonyme : non-renvoi d’une QPC

Pour la chambre criminelle, ne présente pas un caractère sérieux la question prioritaire de constitutionnalité contestant la conformité de l’article 706-62 du code de procédure pénale, relatif à la procédure de témoignage anonyme, aux droits de la défense et du contradictoire.

par Julie Galloisle 28 mai 2015

La question du témoignage anonyme est connue depuis longtemps de la pratique policière. Aussi, en vue d’inciter les témoins à parler tout en les protégeant du risque de représailles, le législateur a, par une loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 (JO 16 nov.), mis en place un dispositif original permettant au témoin, redoutant une vengeance, de « déclarer comme domicile l’adresse du commissariat ou de la brigade de la gendarmerie » (C. pr. pén., art. 706-57).

Le droit n’appréciant guère l’anonyme, le bénéfice d’une telle protection est toutefois subordonné au respect de deux conditions essentielles : en premier lieu, la procédure doit porter sur un crime ou un délit puni d’au moins trois ans d’emprisonnement ; en second lieu, l’anonymat est subordonné à la mise en danger de la vie ou de l’intégrité physique de la personne ou de ses proches, et ce de manière grave (sic). Une fois ces conditions réunies, il appartient au juge des libertés et de la détention (JLD), saisi par requête motivée du procureur de la République ou du juge d’instruction, d’autoriser par décision motivée que les déclarations de la personne soient recueillies sans que son identité apparaisse dans le dossier de la procédure (C. pr. pén., art. 706-58, al. 1er). Concrètement, la décision du JLD est jointe au procès-verbal d’audition du témoin, sur lequel ne figure ni la signature de l’intéressé ni, a fortiori, son identité, laquelle est indiquée, avec l’adresse du témoin anonyme, dans un dossier distinct (C. pr. pén., art. 706-58, al. 2).

Par ailleurs, il ressort ainsi de l’article 706-60, alinéa 1er, du code de procédure pénale que « les dispositions de l’article 706-58 ne sont pas applicables si, au regard des circonstances dans lesquelles l’infraction a été commise ou de la personnalité du témoin, la connaissance de l’identité est indispensable à l’exercice des droits de la défense ». Corrélativement, l’article 706-62 du même code exclut que le témoignage anonyme puisse être retenu comme seul fondement d’une condamnation, assurant ainsi une certaine égalité des armes entre l’accusateur et l’accusé.

Nonobstant ces précautions, cette dernière limite resterait, comme l’atteste la question prioritaire de constitutionnalité posée à la Cour de cassation, encore insuffisante. Parce qu’elles permettent « que des éléments de preuve soient utilisés au cours d’une information judiciaire alors que la personne mise en cause n’a pas été mise à même de les contester », les dispositions de l’article 706-62 du code de procédure pénale porteraient atteinte au respect des droits de la défense et du contradictoire garantis par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.

Il est vrai que, lorsque la partie poursuivante ne dispose d’aucun autre mode de preuve qu’une ou plusieurs dépositions masquées, l’absence de contradiction rend inévitablement le...

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