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Interview

Avec la transaction pénale, « la justice va tenter d’honorer sa tâche mais de manière indirecte »

Antoine Garapon, interrogé par Dalloz actualité, revient sur la mise en place en droit français de la procédure transactionnelle.

le 20 juillet 2016

La procédure transactionnelle a été réintroduite sous forme d’amendement dans le projet de loi Sapin 2, relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique. La transaction pénale, mesure présentée comme majeure de ce texte, avait été retirée à la suite de l’avis du Conseil d’État. Initialement appelée « convention judiciaire d’intérêt public », adoptée par l’Assemblée nationale, elle s’est muée au Sénat en transaction judiciaire. Les sénateurs laissent cette procédure entre les mains du procureur de la République alors que les députés avaient prévu que le juge d’instruction puisse proposer cette mesure à la personne morale mise en cause. Les procédures transactionnelles existent dans de nombreux pays, notamment aux États-Unis où de grandes entreprises françaises, soupçonnées de corruption, ont accepté de payer de substantielles amendes pour éviter un procès (V. Dalloz actualité, 10 juin 2016, art. P.-A. Souchard isset(node/179475) ? node/179475 : NULL, 'fragment' => isset() ? : NULL, 'absolute' => )) .'"'>179475).

 

 

Dalloz actualité : La loi Sapin 2 prévoit d’instaurer une procédure transactionnelle pour les entreprises mises en cause dans des affaires de corruption. Les autorités françaises ont-elles enfin pris en compte les enjeux de la justice mondialisée ?

Antoine Garapon : Cette loi comporte des éléments de modernité à commencer par le vocabulaire : elle parle d’agence anticorruption, de transaction, d’autorité de poursuite, etc. Et puis elle prend à bras le corps la question de la corruption. La corruption est un sujet vieux comme le monde mais la mondialisation lui confère un sens nouveau. En effet, celle-ci repose sur un système qui, pour être efficace, ne doit pas être faussé. La corruption ne s’inscrit plus dans la vielle dialectique de la loi et de la transgression mais dans celle du marché et de la manipulation, du jeu et du trucage, du scrutin et du tripatouillage, de la procédure et du faux : la corruption est la figure contemporaine du mal.

C’est un euphémisme de dire que la France ne s’est pas distinguée par son audace dans la lutte contre la corruption. Mais elle prend aujourd’hui conscience que cette attitude était irresponsable car si nous ne faisons pas le travail nous-mêmes, d’autres juridictions le feront à notre place en récoltant au passage des sommes substantielles, en pillant nos données et en flétrissant l’image de nos champions… et de notre pays.

Il faut dire à notre décharge que cette lutte est très difficile,...

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Antoine Garapon

En 2013, Antoine Garapon, magistrat et secrétaire général de l'institut des hautes études sur la justice, et l'avocat Pierre Servan-Schreiber ont publié Deals de justice. Dans cet ouvrage, plusieurs contributeurs reviennent sur ces transactions aux États-Unis.