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Forum Famille Dalloz

Un espace de discussion ouvert à tous les intervenants en droit de la famille, quelle que soit leur profession, et leur lien avec la matière.
Mis à jour : il y a 2 ans 34 semaines
Sélection jurisprudentielle : assistance éducative, autorité parentale, divorce, famille, filiation, libéralités, majeurs protégés, mineurs et successions
8 août 2022 - 07:58
L’activité jurisprudentielle du mois de juillet a finalement été assez riche :
- assistance éducative
- autorité parentale
- divorce
- famille
- filiation
- libéralités
- majeurs protégés
- mineurs
- successions
Le mois d’août sera, à n’en pas douter, beaucoup plus calme !
- ASSISTANCE ÉDUCATIVE
La contradiction du mineur sur un élément essentiel de sa vie ne suffit pas à retirer à l’acte de naissance sa force probante (Civ. 1re, 6 juill. 2022, n° 22-12.506, 671 FS-B) – Aux termes de l’article 47 du code civil, tout acte de l’état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l’acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. Celle-ci est appréciée au regard de la loi française.
Prive sa décision de base légale au regard de ce texte la cour d’appel qui, pour refuser le bénéfice de l’assistance éducative de l’intéressé, s’est déterminée par des motifs impropres à établir que les faits déclarés à l’acte de naissance ne correspondaient pas à la réalité en retenant que celui-ci indique que l’extrait d’acte de naissance qu’il produit lui aurait été transmis par sa mère, alors qu’il avait fait état, lors de son évaluation sociale, du décès de celle-ci, et que ces contradictions sur un élément essentiel de sa vie rendent douteuses les conditions dans lesquelles l’acte a été obtenu, ce qui suffit à retirer à celui-ci toute force probante.
- AUTORITÉ PARENTALE
Une juridiction d’un État membre ne demeure pas compétente pour statuer en matière de garde d’enfant sur la base du Règlement « Bruxelles II bis » lorsque la résidence habituelle de l’enfant a légalement fait l’objet d’un transfert, en cours de procédure, sur le territoire d’un État tiers qui est partie à la convention de La Haye de 1996 (CJUE, 14 juill. 2022, n° C‑572/21) – L’article 8, § 1, du Règlement (CE) n° 2201/2003, du 27 novembre 2003 (dit « Bruxelles II bis »), lu en combinaison avec l’article 61, sous a), de ce Règlement, doit être interprété en ce sens qu’une juridiction d’un État membre, saisie d’un litige en matière de responsabilité parentale, ne conserve pas la compétence pour statuer sur ce litige au titre de cet article 8, § 1, lorsque la résidence habituelle de l’enfant en cause a été transférée légalement, en cours d’instance, sur le territoire d’un État tiers qui est partie à la convention concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l’exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection des enfants, conclue à La Haye le 19 octobre 1996.
NB – v. le communiqué de presse en cliquant ici.
- DIVORCE
Divorce et liquidation : responsabilité de l’avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation (Civ. 1re, 6 juill. 2022, n° 21-50.013, 588 F D) – Dès lors que, d’une part, un cumul de l’action en recel de communauté et de celle en rescision pour lésion est possible, d’autre part, que la cour d’appel, ayant relevé que l’action en recel n’avait que de faibles chances d’aboutir, n’avait pas écarté une éventualité favorable et ne pouvait refuser d’indemniser ce préjudice, la SCP d’avocats a commis une faute en ne présentant pas un moyen critiquant ces motifs et en privant l’ex-épouse de la chance d’obtenir la cassation de l’arrêt ayant rejeté sa demande au titre du recel de communauté. La chance ainsi perdue sera évaluée à 70 % et celle d’obtenir gain de cause devant une juridiction de renvoi, qualifiée de faible par la cour d’appel, au regard de la difficulté d’établir la volonté de l’ex-époux de frustrer l’ex-épouse de 600 000 F, soit 91 470 €, sera fixée à 10 % de sorte que le préjudice qui en résulte pour celle-ci s’élève à la somme de 3 201,22 €.
Prestation compensatoire : deux décisions viennent préciser la prise en compte ou non de la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant dans l’appréciation des ressources du débiteur ou du créancier (Civ. 1re, 13 juill. 2022, n° 21-12.354, 595 F-D ; 13 juill. 2022, n° 21-12.460, 596 F-D) – Dans une première décision (21-12.354), la Cour de cassation affirme que les charges liées à l’entretien et à l’éducation des enfants et exposées par l’époux débiteur doivent venir en déduction des ressources de celui-ci :
Viole les articles 270 et 271 du code civil une cour d’appel qui, pour fixer à 50 000 € la somme due par l’ex-époux à l’ex-épouse au titre de la prestation compensatoire, retient que la charge que constitue pour le premier l’entretien et l’éducation des deux enfants nés de son union avec sa nouvelle compagne ne peut être opposée à la première, s’agissant d’un libre choix de sa part, dont il ne peut être tiré aucune conséquence quant aux obligations alimentaires découlant d’une précédente union, alors que, pour la fixation de la prestation compensatoire, les charges liées à l’entretien et à l’éducation des enfants et exposées par l’époux débiteur doivent venir en déduction des ressources de celui-ci.
Dans une seconde décision (21-12.460), elle relève, au contraire, que les juges du fond ne sont pas tenus de déduire des ressources du prétendu créancier qui n’en a pas fait la demande la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants qu’ils mettaient à sa charge :
Après avoir analysé la situation patrimoniale des époux et son évolution dans un avenir prévisible, la cour d’appel, qui, en l’absence de demande de l’époux prétendument créancier, n’était pas tenue de déduire des ressources de celui-ci la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants qu’elle mettait à sa charge, a retenu une absence de disparité créée par le divorce dans les situations respectives des époux et a ainsi légalement justifié sa décision de rejeter la demande de prestation compensatoire formée par lui.
Liquidation du régime matrimonial et office du juge (Civ. 1re, 13 juill. 2022, n° 21-11.329, 605 F-D) – Il résulte de l’article 4 du code civil que le juge, auquel il incombe de trancher lui-même les contestations soulevées par les parties, ne peut se dessaisir et déléguer ses pouvoirs à un notaire liquidateur.
Méconnaît son office et viole ce texte la cour d’appel qui, après avoir qualifié le véhicule litigieux de bien de communauté devant être intégré à l’actif commun, retient qu’il appartiendra à l’ex-époux, qui a récupéré ledit véhicule en 2006, de justifier de sa valeur actualisée auprès du notaire liquidateur.
Précisions quant à la compétence judiciaire en matière de divorce, de responsabilité parentale et d’obligations alimentaire (CJUE, 1er août 2022, ° C‑501/20) – 1) L’article 3, § 1, sous a), du Règlement (CE) n° 2201/2003 du 27 novembre 2003, dit « Bruxelles II bis », et l’article 3, sous a) et b), du Règlement (CE) n° 4/2009 du 18 décembre 2008, dit « Obligations alimentaires », doivent être interprétés en ce sens que, aux fins de la détermination de la résidence habituelle, au sens de ces dispositions, n’est pas susceptible de constituer un élément déterminant la qualité d’agents contractuels de l’Union européenne des époux concernés, affectés dans une délégation de cette dernière auprès d’un État tiers et dont il est allégué qu’ils jouissent du statut diplomatique dans cet État tiers.
2) L’article 8, § 1, du Règlement n° 2201/2003 doit être interprété en ce sens que, aux fins de la détermination de la résidence habituelle d’un enfant, le lien constitué par la nationalité de la mère ainsi que par la résidence de celle-ci, avant la célébration du mariage, dans l’État membre dont relève la juridiction saisie d’une demande en matière de responsabilité parentale n’est pas pertinent, tandis qu’est insuffisante la circonstance selon laquelle les enfants mineurs sont nés dans cet État membre et en possèdent la nationalité.
3) Dans le cas où aucune juridiction d’un État membre n’est compétente pour statuer sur une demande de dissolution du lien matrimonial en vertu des articles 3 à 5 du Règlement n° 2201/2003, l’article 7 de ce Règlement, lu conjointement avec l’article 6 de celui-ci, doit être interprété en ce sens que, le fait que le défendeur au principal soit ressortissant d’un État membre autre que celui dont relève la juridiction saisie empêche l’application de la clause relative à la compétence résiduelle prévue à cet article 7 pour fonder la compétence de cette juridiction, sans toutefois faire obstacle à ce que les juridictions de l’État membre dont il est ressortissant soient compétentes pour connaître d’une telle demande en application des règles nationales de compétence de ce dernier État membre.
Dans le cas où aucune juridiction d’un État membre n’est compétente pour statuer sur une demande en matière de responsabilité parentale en vertu des articles 8 à 13 du Règlement n° 2201/2003, l’article 14 de ce Règlement doit être interprété en ce sens que, le fait que le défendeur au principal soit ressortissant d’un État membre autre que celui dont relève la juridiction saisie ne fait pas obstacle à l’application de la clause relative à la compétence résiduelle prévue à cet article 14.
4) L’article 7 du Règlement n° 4/2009 doit être interprété en ce sens que :
- dans le cas où la résidence habituelle de l’ensemble des parties au litige en matière d’obligations alimentaires ne se trouve pas dans un État membre, la compétence fondée, dans des cas exceptionnels, sur le forum necessitatis, visé à cet article 7, peut être constatée si aucune juridiction d’un État membre n’est compétente en vertu des articles 3 à 6 de ce règlement, si la procédure ne peut raisonnablement être introduite ou conduite dans l’État tiers avec lequel le litige a un lien étroit, ou s’y révèle impossible, et si ce litige présente un lien suffisant avec l’État membre de la juridiction saisie ;
- pour considérer, dans des cas exceptionnels, qu’une procédure ne peut raisonnablement être introduite ou conduite dans un État tiers, il importe que, au terme d’une analyse circonstanciée des éléments avancés dans chaque cas d’espèce, l’accès à la justice dans cet État tiers soit, en droit ou en fait, entravé, notamment par l’application de conditions procédurales discriminatoires ou contraires aux garanties fondamentales du procès équitable, sans qu’il soit exigé que la partie qui se prévaut dudit article 7 soit tenue de démontrer avoir vainement introduit, ou tenté d’introduire, cette procédure devant les juridictions du même État tiers, et
- pour considérer qu’un litige doit présenter un lien suffisant avec l’État membre de la juridiction saisie, il est possible de se fonder sur la nationalité de l’une des parties.
NB – V. le communiqué de presse en cliquant ici.
- FAMILLE
Regroupement familial : le refus de délivrance d’un visa national aux fins du regroupement familial au parent d’un mineur réfugié non accompagné devenu majeur au cours de cette procédure est contraire au droit de l’Union (CJUE, 1er août 2022, C-273/20 et C-355/20 ([Regroupement familial avec un mineur réfugié] et CJUE, 1er août 2022, n° C-279/20 [Regroupement familial d’un enfant devenu majeur]) – Dans la première affaire (C-273/20 et C-355/20 ), la CJUE juge que :
L’article 16, § l, sous a), de la directive 2003/86/CE du 22 septembre 2003, relative au droit au regroupement familial, doit être interprété en ce sens que, en cas de regroupement familial de parents avec un réfugié mineur non accompagné, en vertu de l’article 10, § 3, sous a), de cette directive, lu en combinaison avec l’article 2, sous f), de celle-ci, le fait que ce réfugié soit encore mineur à la date de la décision relative à la demande d’entrée et de séjour aux fins du regroupement familial introduite par les parents du regroupant ne constitue pas une « condition », au sens de cet article 16, § 1, sous a), dont le non-respect permet aux États membres de rejeter une telle demande. En outre, ces dispositions, lues à la lumière de l’article 13, § 2, de ladite directive, doivent être interprétées en ce sens qu’elles s’opposent à une réglementation nationale en vertu de laquelle, dans un tel cas de figure, le droit de séjour des parents concernés prend fin dès que l’enfant atteint la majorité.
L’article 16, § 1, sous b), de la directive 2003/86 doit être interprété en ce sens que, pour considérer qu’il existe une vie familiale effective, au sens de cette disposition, dans le cas du regroupement familial d’un parent avec un enfant mineur ayant obtenu le statut de réfugié, lorsque cet enfant est devenu majeur avant l’adoption de la décision relative à la demande d’entrée et de séjour aux fins du regroupement familial introduite par ce parent, la seule ascendance directe au premier degré n’est pas suffisante. Cependant, il n’est pas nécessaire que l’enfant regroupant et le parent concerné cohabitent au sein du même foyer ou vivent sous le même toit pour que ce parent puisse bénéficier du regroupement familial. Des visites occasionnelles, pour autant qu’elles soient possibles, et des contacts réguliers de quelque nature que ce soit peuvent suffire pour considérer que ces personnes reconstruisent des relations personnelles et affectives et pour attester l’existence d’une vie familiale effective. En outre, il ne saurait non plus être exigé que l’enfant regroupant et le parent concerné se prêtent un soutien financier mutuel.
Dans la seconde affaire (C-279/20), elle juge que :
L’article 4, §1, premier alinéa, sous c), de la directive 2003/86/CE du 22 septembre 2003, relative au droit au regroupement familial, doit être interprété en ce sens que la date à laquelle il convient de se référer pour déterminer si l’enfant d’un regroupant ayant obtenu le statut de réfugié est un enfant mineur, au sens de cette disposition, dans une situation où cet enfant est devenu majeur avant l’octroi du statut de réfugié au parent regroupant et avant l’introduction de la demande de regroupement familial, est celle à laquelle le parent regroupant a présenté sa demande d’asile en vue d’obtenir le statut de réfugié, à condition qu’une demande de regroupement familial ait été introduite dans les trois mois suivant la reconnaissance du statut de réfugié au parent regroupant.
L’article 16, § 1, sous b), de la directive 2003/86 doit être interprété en ce sens que, pour considérer qu’il existe une vie familiale effective, au sens de cette disposition, dans le cas du regroupement familial d’un enfant mineur avec un parent ayant obtenu le statut de réfugié, lorsque cet enfant est devenu majeur avant l’octroi du statut de réfugié au parent regroupant et avant l’introduction de la demande de regroupement familial, la seule relation juridique de filiation n’est pas suffisante. Cependant, il n’est pas nécessaire que le parent regroupant et l’enfant concerné cohabitent au sein du même foyer ou vivent sous le même toit pour que cet enfant puisse bénéficier du regroupement familial. Des visites occasionnelles, pour autant qu’elles soient possibles, et des contacts réguliers de quelque nature que ce soit peuvent suffire pour considérer que ces personnes reconstruisent des relations personnelles et affectives et pour attester l’existence d’une vie familiale effective. En outre, il ne saurait non plus être exigé que le parent regroupant et son enfant se prêtent un soutien financier mutuel.
NB – V. le communiqué de presse en cliquant ici.
- FILIATION
Reconnaissance frauduleuse de paternité (Civ. 1re, 13 juill. 2022, n° 21-13.190, 597 F D) – Voici un cas dans lequel la reconnaissance de paternité a été jugée frauduleuse et donc annulée : une cour d’appel a constaté qu’à l’époque de la reconnaissance (le 6 août 2012), déclarée en région lyonnaise, la mère, de nationalité guinéenne, en situation irrégulière, était domiciliée avec ses deux autres enfants dans une ville située en dehors de cette région, et qu’elle avait, le 12 octobre 2012, présenté un dossier au service des nationalités de cette ville, après avoir quitté la région lyonnaise où se trouvait pourtant le père prétendu. Elle a relevé, outre la différence d’âge entre les parents, les informations contradictoires données par ceux-ci sur les circonstances de leur rencontre en Belgique, le début de leur liaison et la date d’entrée en France de la mère, ainsi que sur leurs relations à partir de la grossesse. Elle a constaté encore que, dans la notice indicative de la composition de sa famille, le prétendu père ne mentionnait pas l’enfant, dont il ignorait la date de naissance, et qu’il avait, à plusieurs reprises, tenté de se soustraire aux convocations des enquêteurs et ne s’était pas présenté lors des opérations d’expertise biologique judiciairement ordonnée.
- LIBÉRALITÉS
Interdiction de recevoir des libéralités pour les membres des professions de santé : l’atteinte au droit de propriété du malade n’est pas disproportionnée (Cons. const., 29 juill. 2022, n° 2022-1005 QPC) – Le premier alinéa de l’article 909 du code civil, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs, est conforme à la Constitution. Aux termes de ce texte, « les membres des professions médicales et de la pharmacie, ainsi que les auxiliaires médicaux qui ont prodigué des soins à une personne pendant la maladie dont elle meurt ne peuvent profiter des dispositions entre vifs ou testamentaires qu’elle aurait faites en leur faveur pendant le cours de celle-ci ».
NB – Dans sa décision du 12 mars 2021 (n° 2020-888 QPC , AJ fam. 2021. 230, obs. D. Pollet et J. Casey), le Conseil constitutionnel avait au contraire déclaré inconstitutionnelle l’incapacité de recevoir prévue à l’article L. 116-4 du Code de l’action sociale et des familles (CASF) au profit des personnes rendant des services à domicile, en ce que sa formulation était trop générale. Ce qui n’est pas le cas de l’interdiction prévue à l’article 909 “qui ne vaut que pour les libéralités consenties pendant le cours de la maladie dont le donateur ou le testateur est décédé” et “qui ne s’applique qu’aux seuls membres des professions médicales, de la pharmacie et aux auxiliaires médicaux énumérés par le code de la santé publique, à la condition qu’ils aient dispensé des soins en lien avec la maladie dont est décédé le patient”.
Réduction des libéralités (Civ. 1re, 13 juill. 2022, n° 21-10.226, 606 F-D) – Selon l’article 924 du code civil, lorsque la libéralité excède la quotité disponible, le gratifié, successible ou non successible, doit indemniser les héritiers réservataires à concurrence de la portion excessive de la libéralité, quel que soit cet excédent.
Viole ce texte la cour d’appel qui, pour rejeter la demande du fils du défunt d’un premier lit en réduction du legs universel dont l’épouse survivante était bénéficiaire, retient, tout en constatant que celle-ci contestait avoir renoncé à son legs universel qu’elle a opté pour l’une des quotités disponibles de l’article 1094-1 du code civil et a ainsi d’elle-même opéré la réduction des libéralités reçues à l’une des quotités permises par la loi.
- MAJEURS PROTÉGÉS
Le mandat de protection future ne garantit pas que la personne prévue soit effectivement désignée comme curateur ou tuteur (Civ. 1re, 13 juill. 2022, n° 20-20.863, 600 F D) – Après avoir constaté qu’en dépit d’un mandat de protection future établi le 29 octobre 2014 entre la majeur vulnérable et sa fille, les mesures de curatelle successives avaient été confiées à un mandataire judiciaire en raison de la mésentente et de la suspicion existante entre membres de la fratrie, une cour d’appel a relevé, tant par motifs propres qu’adoptés, que le conflit grave, portant tant sur la gestion du patrimoine que sur les soins à prodiguer à la mère, continuait d’opposer ses enfants, que les multiples changements d’hébergement de la majeure protégée, dont quatre en 2018 et 2019, intervenus notamment à l’initiative de sa fille lui avaient été dommageables du fait de sa pathologie et qu’elle bénéficiait désormais d’un lieu d’hébergement stable auprès de sa soeur.
Pour la Cour de cassation, ayant pris en considération la volonté initialement exprimée par la majeure, elle en a souverainement déduit que l’intérêt de la majeure protégée commandait toujours de confier l’exercice de la tutelle à une personne extérieure à la famille et a, ainsi, légalement justifié sa décision.
- MINEURS
Enlèvement international : le père ne rapportait pas la preuve d’un risque de danger grave ou de création d’une situation intolérable (Civ. 1re, 6 juill. 2022, n° 22-11.435, 667 F D) – Après avoir relevé que le père n’avait déposé plainte pour mauvais traitements et sévices sexuels prétendument commis sur les enfants par leur mère que plusieurs mois après les faits d’enlèvement et postérieurement à la découverte de son lieu de résidence, une cour d’appel a constaté que les allégations de violences physiques étaient fondées sur les seules déclarations du père et qu’à l’occasion de leur audition l’une d’elles n’y avait pas fait allusion, l’autre déclarant seulement avoir été frappée une fois par sa mère. Elle a retenu que le père ne rapportait pas la preuve, par des éléments objectifs et différents de ses propres allégations, que les enfants seraient dans une situation psychique telle que leur retour auprès de leur mère serait rendu impossible. C’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation de la valeur et la portée des éléments de preuve soumis à son examen que la cour d’appel, qui n’était pas tenue de s’expliquer sur les pièces qu’elle décidait d’écarter et qui a procédé à la recherche prétendument omise, a estimé que le père ne rapportait pas la preuve d’un risque de danger grave ou de création d’une situation intolérable au sens de l’article 13 b) de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980, en cas de retour immédiat des enfants au Maroc. Le moyen n’est donc pas fondé.
Pas de conseil de famille si l’intérêt de l’orphelin le justifie (Civ. 1re, 6 juill. 2022, n° 21-25.538, 666 F D) – Une cour d’appel a relevé, par motifs propres et adoptés, que le rapport des services éducatifs mettait en évidence un contexte familial complexe ne permettant pas d’envisager l’accueil de l’enfant au sein de sa famille, dès lors, d’une part, que, si tous les proches contactés indiquaient avoir des liens affectifs avec l’enfant et vouloir prendre des décisions dans son intérêt, ils n’avaient, depuis le décès de sa mère, manifesté par aucun acte l’intention de s’investir auprès d’elle et n’étaient pas en mesure de s’occuper d’elle, d’autre part, qu’il existait des non-dits et des conflits intra-familiaux qui rendaient impossible tout dialogue entre eux.
Elle a retenu, par motifs adoptés, que le placement administratif, sollicité par les proches de l’enfant, n’était pas de l’intérêt de celle-ci qui, après avoir vécu comme des abandons les décès successifs de sa mère biologique et de sa mère adoptive, avait besoin d’un cadre stable et sécurisant jusqu’à sa majorité.
La cour d’appel, qui a pris en considération l’intérêt de la mineure, a pu en déduire qu’il était impossible de constituer un conseil de famille et que, en l’absence de toute personne en mesure de la prendre en charge, la tutelle était vacante. Elle a ainsi légalement justifié sa décision.
Protection internationale : les mineurs non accompagnés disposent d’un droit de recours contre le refus de prise en charge par un État membre où réside un proche (CJUE, 1er août 2022, n° C‑19/21, I, S c/Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid) – L’article 27, § 1, du Règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, lu en combinaison avec les articles 7, 24 et 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, doit être interprété en ce sens que :
il impose à l’État membre auquel une requête aux fins de prise en charge, fondée sur l’article 8, § 2, de ce Règlement, a été adressée de conférer un droit de recours juridictionnel contre sa décision de refus au mineur non accompagné, au sens de l’article 2, sous j), dudit Règlement, qui demande la protection internationale, mais non au proche de ce mineur, au sens de l’article 2, sous h), du même Règlement.
Une demande de protection internationale introduite par un mineur ne peut être rejetée comme irrecevable au motif que ses parents se sont déjà vu accorder une telle protection dans un autre État membre (CJUE, 1er août 2022, n° C-720/20, RO c/ Bundesrepublik Deutschland) – 1) L’article 20, § 3, du Règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, doit être interprété en ce sens que :
il n’est pas applicable par analogie à la situation dans laquelle un mineur et ses parents introduisent des demandes de protection internationale dans l’État membre dans lequel ce mineur est né, alors que ses parents bénéficient déjà d’une protection internationale dans un autre État membre.
2) L’article 33, § 2, sous a), de la directive 2013/32/UE du 26 juin 2013, relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale, doit être interprété en ce sens que :
il n’est pas applicable par analogie à la demande de protection internationale introduite par un mineur dans un État membre lorsque ce n’est pas ce mineur lui-même, mais ses parents, qui bénéficient d’une protection internationale dans un autre État membre.
- SUCCESSION
Prescription de l’action en restitution consécutive à l’annulation d’un testament (Civ. 1re, 13 juill. 2022, n° 20-20.738, 609 FS-B) – Il résulte de l’article 2224 du code civil que l’action en restitution consécutive à l’annulation d’un testament se prescrit par cinq ans à compter du jour où l’héritier ou le légataire rétabli dans ses droits a connu ou aurait dû connaître l’appréhension, par le bénéficiaire du testament annulé, des biens revendiqués, sans que le point de départ du délai de prescription puisse être antérieur au prononcé de la nullité
Les intérêts de la dette, sujette à rapport, sont dus de plein droit à compter du jour de l’ouverture de la succession (Civ. 1re, 13 juill. 2022, n° 21-10.040, 599 F-D) – Selon l’article 829 du code civil (dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 23 juin 2006), chaque cohéritier fait rapport à la masse des sommes dont il est débiteur. Selon l’article 856 du même code (dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 23 juin 2006), les intérêts des dettes sujettes à rapport sont dus de plein droit à compter du jour de la succession.
Viole ces textes une cour d’appel qui, pour rejeter la demande de l’un des héritiers, retient qu’elle n’est pas justifiée, alors que les intérêts de la dette, qui était sujette à rapport, étaient dus de plein droit à compter du jour de l’ouverture de la succession.
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Sélection jurisprudentielle de la semaine : aide sociale/succession, autorité parentale, droit pénal de la famille, filiation et état civil
8 juillet 2022 - 17:12
Voici ma sélection jurisprudentielle de la semaine avant mon départ en vacances. Le forum marquera donc une pause pendant plusieurs semaines. Je souhaite à chacun un très bel été !
- AIDE SOCIALE/SUCCESSION
Le versement de l’aide sociale à l’hébergement des personnes âgées directement à l’hôpital ne s’oppose pas à sa récupération ultérieure sur succession (Civ. 2e, 7 juill. 2022, n° 21-13.527, 806 F-B) – Il résulte des articles L. 121-3 et L. 121-4 du code de l’action sociale et des familles que le conseil départemental adopte un règlement départemental d’aide sociale définissant les règles selon lesquelles sont accordées les prestations d’aide sociale relevant du département, qu’il peut décider de conditions et de montants plus favorables que ceux prévus par les lois et règlements applicables aux prestations mentionnées à l’article L. 121-1 et que, dans ce cas, le département assure la charge financière de ces décisions.
L’article L. 121-4 n’interdit pas au conseil départemental d’organiser dans le règlement départemental d’aide sociale des modalités particulières de versement de l’aide sociale destinées à en assurer l’effectivité telles que son versement direct à l’établissement d’accueil de la personne âgée.
Fait une exacte application de ces dispositions et des articles L. 132-3 à L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles, la cour d’appel qui, constatant que conformément aux dispositions du règlement départemental d’aide sociale applicable en la cause, le département a versé à l’établissement d’accueil la totalité des frais de séjour de la bénéficiaire d’une aide sociale partielle, sans déduction de la participation mise à sa charge, décide que le département, ayant agi dans l’intérêt exclusif et pour le compte de la bénéficiaire, dans l’incapacité de s’acquitter elle-même de sa contribution volontaire, est en droit d’en réclamer le remboursement à sa succession, conformément au droit commun des obligations, en même temps qu’il exerce, en application de l’article L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles, l’action en récupération de l’aide sociale accordée.
- AUTORITÉ PARENTALE
Impossibilité persistante pour un père d’avoir des contacts avec son fils : pas de violation de l’article 8 de la Conv. EDH (CEDH, 7 juill. 2022, Jurišić c/ Croatie (n° 2), n° 8000/21) – Dans un précédent arrêt rendu le 16 janvier 2020 (Jurišić c/ Croatie, n° 29419/17), la Cour européenne avait conclu que le requérant n’avait pu avoir aucun contact réel avec son fils pratiquement depuis la naissance de celui-ci, notamment parce que des décisions judiciaires en sa faveur avaient été inexécutées. Depuis cette décision de 2020, les tribunaux croates ont rendu de nouvelles décisions visant à rétablir progressivement le contact entre le requérant et son fils, alors que la mère a été reconnue coupable d’entrave. Dans cette seconde requête introduite devant la Cour européenne, le requérant se plaint, sur le terrain de l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) de la Convention européenne, d’une impossibilité persistante pour lui d’avoir des contacts avec son fils. Mais cette fois, il n’obtient pas gain de cause du fait de son propre comportement discutable davantage motivé par l’idée de faire valoir ses propres droits que par le meilleur intérêt de l’enfant (comp. Gobec c/ Slovénie, n° 7233/04, § 152, 3 oct. 2013). Les obligations positives de l’État dans des affaires de ce type sont des obligations de moyens et non de résultat.
- DROIT PÉNAL DE LA FAMILLE
Violences conjugales : la passivité des autorités judiciaires condamnables (CEDH, 7 juill. 2022, S. c/ Italie, n° 32715/19) – La Cour est d’avis que, dans le traitement judiciaire du contentieux des violences contre les femmes, il incombe aux instances nationales de tenir compte de la situation de précarité et de vulnérabilité particulière, morale, physique et/ou matérielle, de la victime et d’apprécier la situation en conséquence, dans les plus brefs délais. La Cour n’est pas convaincue que, dans le cas d’espèce, les autorités aient montré une volonté réelle de faire en sorte que le mari fût amené à rendre des comptes. Au contraire, la Cour estime que, après les interventions de la police et des procureurs qui ont fait preuve de la diligence particulière requise, les juridictions nationales ont agi au mépris de leur obligation d’assurer que le mari, inculpé de lésions, mauvais traitements, menaces et harcèlement, fût jugé rapidement et ne pût dès lors bénéficier de la prescription. Dès lors, les autorités italiennes ne peuvent passer pour avoir agi avec une promptitude suffisante et avec une diligence raisonnable. Le résultat de cette défaillance est que l’époux a joui d’une impunité presque totale.
- FILIATION/ÉTAT CIVIL
Le Conseil constitutionnel juge conforme à la Constitution l’exclusion des hommes transgenres de la PMA (Cons. const., 8 juill. 2022, n° 2022-1003 QPC) – Selon le communiqué du Conseil constitutionnel, “le Conseil constitutionnel a été saisi le 16 mai 2022 par le Conseil d’État d’une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l’article L. 2141-2 du code de la santé publique, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique. Ces dispositions ouvrent l’accès à l’assistance médicale à la procréation aux couples formés d’un homme et d’une femme ou de deux femmes ainsi qu’aux femmes non mariées. Elles privent ainsi de cet accès les hommes seuls ou en couple avec un homme. Dès lors, les personnes, nées femmes à l’état civil, qui ont obtenu la modification de la mention relative à leur sexe tout en conservant leurs capacités gestationnelles, en sont exclues.
Les critiques formulées contre ces dispositions – L’association requérante reprochait notamment à ces dispositions de priver de l’accès à l’assistance médicale à la procréation les hommes seuls ou en couple avec un homme, alors même que ceux d’entre eux qui, nés femmes à l’état civil, ont changé la mention de leur sexe, peuvent être en capacité de mener une grossesse. Selon cette association, elles instituaient, ce faisant, une différence de traitement injustifiée entre les personnes disposant de capacités gestationnelles selon la mention de leur sexe à l’état civil et étaient ainsi contraires aux principes d’égalité devant la loi et d’égalité entre les hommes et les femmes.
Le contrôle des dispositions faisant l’objet de la QPC – Par sa décision de ce jour, le Conseil constitutionnel rappelle qu’il est à tout moment loisible au législateur, statuant dans le domaine de sa compétence, d’adopter des dispositions nouvelles dont il lui appartient d’apprécier l’opportunité et de modifier des textes antérieurs ou d’abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d’autres dispositions, dès lors que, dans l’exercice de ce pouvoir, il ne prive pas de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel. L’article 61-1 de la Constitution ne confère pas au Conseil constitutionnel un pouvoir général d’appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement, mais lui donne seulement compétence pour se prononcer sur la conformité des dispositions législatives soumises à son examen aux droits et libertés que la Constitution garantit.
Selon l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse ». Le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général, pourvu que, dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit.
À cette aune, le Conseil constitutionnel relève qu’il ressort des travaux préparatoires des dispositions contestées que, en adoptant ces dispositions, le législateur a entendu permettre l’égal accès des femmes à l’assistance médicale à la procréation, sans distinction liée à leur statut matrimonial ou à leur orientation sexuelle. Ce faisant, le législateur a estimé, dans l’exercice de sa compétence, que la différence de situation entre les hommes et les femmes, au regard des règles de l’état civil, pouvait justifier une différence de traitement, en rapport avec l’objet de la loi, quant aux conditions d’accès à l’assistance médicale à la procréation. Il n’appartient pas au Conseil constitutionnel de substituer son appréciation à celle du législateur sur la prise en compte, en cette matière, d’une telle différence de situation.
Par ces motifs notamment, le Conseil constitutionnel juge conformes à la Constitution les dispositions contestées.”
NB – Cette décision sera commentée dans les colonnes de l’AJ famille par Marie Mesnil et Sophie Paricard.
La transcription de l’acte de naissance au registre de l’état civil national ne saurait conditionner la délivrance d’une carte d’identité ou d’un passeport à un enfant mineur né de parents de même sexe (CJUE, 24 juin 2022, n° aff. C-2/21, Rzecznik Praw Obywatelskich) – Les articles 20 et 21 TFUE, lus en combinaison avec les articles 7 et 24 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ainsi qu’avec l’article 4, § 3, de la directive 2004/38/CE du 29 avril 2004 (relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres) doivent être interprétés en ce sens que, s’agissant d’un enfant mineur, citoyen de l’Union dont l’acte de naissance délivré par les autorités d’un État membre désigne comme ses parents deux personnes de même sexe, l’État membre dont cet enfant est ressortissant est obligé, d’une part, de lui délivrer une carte d’identité ou un passeport, sans requérir la transcription préalable d’un acte de naissance dudit enfant au registre de l’état civil national, ainsi que, d’autre part, de reconnaître, à l’instar de tout autre État membre, le document émanant d’un autre État membre permettant au même enfant d’exercer sans entrave, avec chacune de ces deux personnes, son droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres.
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Réforme du nom : un dossier pour mesurer toutes les conséquences depuis le 1er juillet 2022
8 juillet 2022 - 16:07
En facilitant le port du nom de l’autre parent à titre d’usage, notamment pour les enfants mineurs, et en ouvrant le droit pour toute personne majeure, via un formulaire Cerfa, d’ajouter ou de substituer à son nom celui de son autre parent ou d’intervertir l’ordre de ses noms, la loi n° 2022-301 du 2 mars 2022 fait œuvre de simplification.
Cette réforme, entrée en vigueur le 1er juillet 2022, ouvre une nouvelle brèche dans les principes d’immutabilité et d’indisponibilité du nom. Faut-il s’en féliciter ? Ou faut-il craindre que les choses aillent un peu trop vite et que le changement de nom dans un contexte de violences intrafamiliales se double d’une perte à la fois d’identité et d’appartenance à une famille ?
Une chose est certaine, un contentieux nouveau risque d’apparaître en matière d’autorité parentale autour du choix du nom de l’enfant. Car là où la liberté de choix augmente, le risque de désaccord entre les deux titulaires du choix croît également. Ce qui nous a conduit, dans la première partie du dossier de l’AJ famille consacré à la réforme du nom, à vous proposer un modèle d’assignation à bref délai devant le JAF aux fins d’opposition à l’adjonction d’un nom à titre de nom d’usage de l’enfant en application du nouvel article 311-24-2 du code civil.
Plan de la première partie du dossier
- La loi relative au choix du nom issu de la filiation : liberté, égalité… simplicité !, par Pierre-Calendal Fabre
- Les apports de la loi du 2 mars 2022 relative au choix du nom issu de la filiation, par Florence Laroche-Gisserot
- Changer de nom ? Peut-être pas une si bonne idée que cela…, par Jean-Marc Ben Kemoun
- Réforme du nom de famille : l’avis d’un généalogiste, par Cédric Dolain
- Le contentieux de l’autorité parentale autour du choix du nom de l’enfant, par Florent Berdeaux
- Assignation à bref délai devant le JAF du tribunal judiciaire aux fins d’opposition à l’adjonction d’un nom à titre de nom d’usage de l’enfant, par Florent Berdeaux
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Mémento pratique « Droit de la famille » des éditions Francis Lefebvre
4 juillet 2022 - 17:05
J’ai reçu il y a quelques jours la dernière édition du Mémento pratique « Droit de la famille » des éditions Francis Lefebvre. C’est un ouvrage très précieux. Pratique et opérationnel, il permet d’obtenir rapidement une réponse à vos questions et de conseiller utilement vos clients.
Il va sans dire qu’il est à jour des dernières réformes de la matière : loi de bioéthique et ses incidences en termes de filiation, spécialement en cas de PMA ; réforme de l’intermédiation financière des pensions alimentaires ; Règlement « Bruxelles II ter » qui entrera en application le 1er août 2022, etc.
Vous y trouverez également de nombreux exemples, des tableaux synoptiques ou comparatifs ainsi que des cas pratiques.
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Droit de la famille : memento pratique (édition 2022/2023), 145 €
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Sélection jurisprudentielle de la semaine : autorité parentale, divorce, libéralités et mariage
1 juillet 2022 - 19:46
Quelques arrêts pour cette fin de semaine :
- autorité parentale
- divorce
- libéralités
- mariage
- AUTORITÉ PARENTALE
L’impossibilité pour un père d’exercer l’autorité parentale pour son enfant né hors mariage viole la Conv. EDH (CEDH, 30 juin 2022, Paparrigopoulos c/ Grèce, n° 61657/16) – Selon le communiqué de presse de la CEDH, un homme « se plaint en particulier de ne pas avoir eu la possibilité, en droit interne, de procéder à une reconnaissance de paternité volontaire, ce qui a eu pour conséquence de limiter sa responsabilité parentale envers sa fille.
Dans son arrêt de chambre, […], la Cour européenne des droits de l’homme dit, à l’unanimité, qu’il y a eu :
Violation de l’article 14 (interdiction de la discrimination) combiné avec l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) de la Convention européenne des droits de l’homme
La Cour observe que, à l’époque des faits, la législation interne ne permettait pas au requérant d’exercer l’autorité parentale, même dans le cas où cela aurait été conforme à l’intérêt supérieur de l’enfant. Ce dernier n’a pas non plus pu obtenir une décision judiciaire susceptible de pallier un refus de la mère de consentir au partage de l’autorité parentale, alors même que cette dernière ne niait pas le lien de filiation entre requérant et l’enfant. Pour la Cour, le Gouvernement n’a pas suffisamment expliqué pourquoi, à l’époque des faits, il était nécessaire que le droit interne prévoie cette différence de traitement entre les pères et les mères d’enfants nés hors mariage et d’enfants nés d’un mariage. Elle estime qu’il n’y a pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre l’absence de possibilité pour le requérant d’exercer l’autorité parentale et le but poursuivi, à savoir la protection de l’intérêt supérieur des enfants naturels.
Violation de l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale)
La Cour note que la procédure a duré neuf ans et quatre mois, et que les arguments du Gouvernement ne permettent pas d’expliquer un tel retard. Eu égard à l’obligation positive de faire preuve de diligence exceptionnelle dans des affaires similaires, elle conclut que le laps de temps écoulé ne peut pas être considéré comme raisonnable. »
- DIVORCE
Exemple d’octroi de dommages-intérêts sur le fondement de l’article 266 du code civil (Civ. 1re, 22 juin 2022, n° 20-21.201, 523 F-D) – Ayant relevé que la vie commune avait duré vingt-quatre ans et que l’épouse souffrait, plusieurs années après le départ de l’époux du domicile conjugal, d’un syndrome anxio-dépressif réactionnel, une cour d’appel a caractérisé les conséquences d’une particulière gravité que l’épouse avait subies du fait de la dissolution du mariage.
- LIBÉRALITÉS
Un époux peut faire une donation portant sur le logement familial s’il s’en réserve l’usufruit (Civ. 1re, 22 juin 2022, n° 20-20.387, 524 F-D) – Selon l’article 215, alinéa 3, du code civil, les époux ne peuvent l’un sans l’autre disposer des droits par lesquels est assuré le logement de la famille.
Cette règle, qui procède de l’obligation de communauté de vie des époux, ne protège le logement familial que pendant le mariage.
Viole ce texte une cour d’appel qui, alors que la donation de son mari, décédé en cours de procédure de divorce, en faveur de ses enfants issus d’un précédent mariage (portant sur la nue-propriété de biens immobiliers propres, dont l’un constituait le logement de la famille) n’avait pas porté atteinte à l’usage et à la jouissance du logement familial par l’épouse pendant le mariage, accueille la demande de celle-ci en annulation de la donation faite sans son consentement après avoir relevé que celle-ci a la qualité de conjoint successible, au sens de l’article 757 du code civil, et que cette qualité ne peut dépendre des agissements d’un époux à l’encontre de l’autre, mais uniquement de la loi et du régime matrimonial, retient que l’acte de donation du 8 mars 2012 a porté atteinte à l’usage et la jouissance du logement familial par elle de sorte que l’absence de mention du consentement de l’épouse dans l’acte justifie son annulation,
NB – Cette décision a déjà fait l’objet d’un premier arrêt de cassation (Civ. 1re, 22 mai 2019, pourvoi n° 18-16.666) qui avait statué dans le même sens. On comprend que la cassation se fasse dès lors sans renvoi…
- MARIAGE
Mariage polygamique : la seconde épouse a droit au paiement d’une pension de réversion (Civ. 2e, 23 juin 2022, n° 21-11.793, n° 684 F-D) – En cas de mariage d’un assuré, suivi d’un second mariage qui n’a pas été déclaré nul, la seconde épouse a la qualité de conjoint survivant au sens de l’article L. 353-1 du code de la sécurité sociale, de sorte qu’elle doit bénéficier de la pension de réversion.
Viole ce texte, privant d’effets le mariage conclu entre le défunt et la seconde épouse pour cause de bigamie, alors qu’en l’absence d’annulation de ce mariage, la veuve avait la qualité de conjoint survivant, une cour d’appel qui, pour rejeter sa demande de pension de réversion, retient que, par jugement devenu définitif, la seconde épouse a été déboutée de sa demande tendant à voir reconnaître le caractère putatif de son mariage.
NB – Cette décision, dont la solution est vouée à la désuétude, sera commentée à l’AJ famille par Fabienne Jault-Seseke.
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Actualité jurisprudentielle : aliments, assistance éducative autorité parentale, bioéthique, divorce, majeurs protégés, pacte civil de solidarité/procédure familiale, prestations familiales, régimes matrimoniaux, successions/procédure familiale
24 juin 2022 - 16:12
Comme je n’ai pas eu le temps de vous livrer l’actualité jurisprudentielle la semaine dernière, elle est particulièrement dense ce vendredi autour de plusieurs thèmes :
- aliments
- assistance éducative
- autorité parentale
- bioéthique
- divorce
- majeurs protégés
- pacte civil de solidarité/procédure familiale
- prestations familiales
- régimes matrimoniaux
- successions/procédure familiale
- ALIMENTS
En présence d’un enfant commun, le veuf reste tenu d’une obligation alimentaire à l’égard de sa belle-mère (Civ. 1re, 9 juin 2022, n° 20-13.386, 460 F-D) – Viole l’article 206 du code civil une cour d’appel qui, pour fixer la contribution alimentaire mensuelle du gendre due à sa belle-mère (bénéficiaire d’une mesure de tutelle confiée à l’UDAF de l’Indre), en sa qualité d’administrateur légal des biens de sa fille mineure (en d’autres termes la petite-fille de la créancière), le condamner en tant que de besoin, avec ses coobligés alimentaires, à régler une certaine somme mensuelle à l’UDAF de l’Indre et mettre un arriéré à sa charge, retient que celui-ci ne peut plus être tenu personnellement d’une telle obligation, en raison du décès de son épouse, qui produisait le lien d’alliance avec sa belle-mère, mais qu’il est tenu en sa qualité de représentant de sa fille mineure. Tout simplement parce que l’enfant issue de son mariage avec la fille de la créancière d’aliments n’étant pas décédée, le gendre était personnellement tenu d’une obligation alimentaire à l’égard de sa belle-mère.
NB – Pour faire le point sur les obligations alimentaires en général et celles entre alliés en particulier, je vous invite à lire la fiche d’orientation “Aliments” qui est en accès libre.
Le maintien du père dans un bien appartenant à son fils malgré un jugement d’expulsion n’est pas constitutif d’un manquement grave à ses obligations justifiant une décharge de ce dernier de tout ou partie de la dette alimentaire (Civ. 1re, 9 juin 2022, n° 20-16.817, 455 F-D) – Après avoir retenu qu’il ne pouvait être reproché au père d’avoir, dans un premier temps, occupé, avec toute sa famille, le bien immobilier appartenant à son fils et que son maintien dans les lieux et le blocage de la situation procédaient tant de données économiques que de profondes dissensions d’ordre personnel avec celui-ci, c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation que la cour d’appel a estimé que l’attitude du père ne revêtait pas le caractère de gravité exigé par l’article 207, alinéa 2, du code civil pour permettre de décharger le fils de tout ou partie de son obligation alimentaire.
NB – Sur l’appréciation souveraine des manquements, v. not. Civ. 1re, 3 avr. 1990, n° 88-18.927.
- ASSISTANCE ÉDUCATIVE
La vie de l’enfant dans une tribu ne le met pas en danger (Civ. 1re, 6 juin 2022, n° 20-20.509, 461 F-D) – Après avoir relevé que, pour décider de retirer l’enfant au clan [K] et le confier à sa mère biologique, le juge des enfants s’était essentiellement interrogé sur la validité de l’adoption coutumière et que ce débat, qui n’avait pas encore été tranché, était insuffisant pour affirmer que l’enfant serait en danger au sein de la tribu Témela ou que les conditions de son éducation y seraient gravement compromises, c’est par une appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis que la cour d’appel, qui n’était pas tenue d’ordonner une mesure d’investigation, a retenu qu’il n’était pas autrement démontré que l’enfant se trouvait en situation de danger au sens de l’article 375 du code civil.
- AUTORITÉ PARENTALE
Le juge doit rechercher si l’intérêt de l’enfant commande de fixer sa résidence au domicile de la mère ou du père (Civ. 1re, 9 juin 2022, n° 20-22.354, 462 F-D) – Il résulte des articles 373-2-6 et 373-2-11 du code civil que, lorsqu’il statue sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale, le juge prend en considération l’intérêt supérieur de l’enfant.
Ne donne pas de base légale à sa décision une cour d’appel qui, pour rejeter la demande de la mère tendant à ce que la résidence habituelle de son fils soit fixée auprès d’elle, retient que le premier juge avait fait observer que, pour justifier son départ avec sa seule fille, celle-ci invoquait le comportement agressif du père, sans apporter d’autre preuve qu’un avis à victime, et que, en appel, elle ne produit aucun autre document à l’appui de ses allégations. Il lui incombait de rechercher si l’intérêt de l’enfant commandait de fixer sa résidence au domicile de la mère ou du père.
- BIOÉTHIQUE
Les gamètes ne sont pas des biens (Civ. 1re, 15 juin 2022, n° 21-17.654, 492 FS-B) – Des gamètes humains ne constituent pas des biens au sens de l’article 1 du Protocole additionnel n° 1 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, eu égard à la portée économique et patrimoniale attachée à ce texte (CEDH, arrêt du 27 août 2015, n° 46470/11, [GC], § 215) et seule la personne peut en disposer.
- DIVORCE
Divorce : à quelle date se placer pour apprécier la demande de prestation compensatoire ? (Civ. 1re, 9 juin 2022, n° 20-22.793 (n° 471 FS-B) – Il résulte des articles 260 et 270 du code civil que, pour apprécier la demande de prestation compensatoire, le juge se place à la date à laquelle la décision prononçant le divorce acquiert force de chose jugée. Selon l’article 909 du même code, l’intimé dispose, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, d’un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l’appelant prévues à l’article 908 pour conclure et former, le cas échéant, appel incident.
Il s’en déduit que, lorsque ni l’appel principal ni, le cas échéant, l’appel incident ne portent sur le prononcé du divorce, celui-ci acquiert force de chose jugée à la date du dépôt des conclusions de l’intimé mentionnées à l’article 909 du code de procédure civile.
Ayant constaté que l’épouse n’avait pas relevé appel du prononcé du divorce et que les conclusions déposées par l’époux, intimé, dans le délai de l’article 909 du code de procédure civile n’avaient pas étendu sa saisine, la cour d’appel en a déduit à bon droit que le chef du jugement prononçant le divorce avait acquis force de chose jugée à la date de ces conclusions et que c’est à cette date que devait être appréciée la demande de prestation compensatoire.
NB – V. l’arrêt du même jour : Civ. 1re, 9 juin 2022, n° 20-23.695 – Comp : Civ. 1re, 15 nov. 2017, n° 16-26.523. Dominique D’Ambra la commentera dans le numéro de juillet/août de l’AJ famille !
Dommages-intérêts dans le cadre d’un divorce pour faute : il convient de ne pas se tromper de fondement (Civ. 1re, 9 juin 2022, n° 20-22.746, 456 F-D) – Les dommages-intérêts prévus par l’article 266 du code civil réparent le préjudice causé par la rupture du lien conjugal, tandis que ceux prévus par l’article 1240 indemnisent celui résultant de toute autre circonstance.
Viole le premier par fausse application et le second par refus d’application une cour d’appel qui, pour condamner l’époux à payer à l’épouse des dommages-intérêts sur le fondement de l’article 266 du code civil, retient que celle-ci a été contrainte de fuir les agressions physiques de son conjoint, qui l’ont obligée à quitter son lieu de vie habituel pour se réfugier dans un foyer d’urgence, source de difficultés matérielles et psychologiques, alors qu’elle statue par des motifs impropres à caractériser les conséquences d’une particulière gravité subies par l’épouse du fait de la dissolution du mariage.
Le JAF n’a pas à vérifier la réalité des formalités accomplies par la juridiction marocaine et mentionnées dans la décision dont l’opposabilité était invoquée (Civ. 1re, 9 juin 2022, n° 21-15.791, 458 F-D) – Il résulte de la combinaison des articles 16 et 19 de la Convention franco-marocaine d’aide mutuelle judiciaire, d’exequatur des jugements et d’extradition du 5 octobre 1957 que le juge saisi d’une demande de reconnaissance d’un jugement marocain vérifie si elle émane d’une juridiction compétente, si les parties ont été légalement citées, représentées ou déclarées défaillantes, si elle est, d’après la loi marocaine, passée en force de chose jugée et susceptible d’exécution, si elle ne contient rien de contraire à l’ordre public français et n’est pas contraire à une décision judiciaire française et possédant à son égard l’autorité de la chose jugée.
Pour déclarer recevable la requête en divorce, l’arrêt retient que, si le jugement marocain mentionne un domicile commun au Maroc et la représentation de l’épouse par un avocat, l’épouse était absente à l’audience de conciliation du 13 décembre 2017, qu’il résulte de son passeport qu’elle est rentrée en France en octobre 2017 et n’est pas retournée au Maroc, et qu’elle n’a donc pas été convoquée à son adresse réelle en France, de sorte que la procédure suivie devant le juge marocain n’était pas contradictoire. En statuant ainsi, alors qu’il n’entrait pas dans ses attributions de vérifier la réalité des formalités accomplies par la juridiction marocaine et mentionnées dans la décision dont l’opposabilité était invoquée, la cour d’appel a violé les textes susvisés.
- MAJEURS PROTÉGÉS
La personne protégée doit être régulièrement convoquée à l’audience pour y être entendue (Civ. 1re, 9 juin 2022, n° 21-10.372, 465 F-D) – Selon les articles 1244, 1244-1 et 1245 du code de procédure civile, en cas d’appel d’une décision du juge des tutelles, le greffe de la cour convoque, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, les personnes auxquelles la décision a été notifiée et, à l’audience, la cour entend le majeur à protéger ou protégé, sauf application des dispositions du second alinéa de l’article 432 du code civil.
Viole ces texte une cour d’appel qui décharge un tuteur de ses fonctions et désigne pour le remplacer une association, après avoir constaté que la personne protégée n’était ni présente, ni représentée à l’audience, alors qu’il ressort des pièces de la procédure que la personne protégée n’avait pas été régulièrement convoquée à l’audience pour y être entendue.
- PACTE CIVIL DE SOLIDARITÉ/PROCÉDURE FAMILIALE
Partage : en appel sont irrecevables les prétentions qui ne sont pas mentionnées dans le dispositif des premières conclusions (Civ. 1re, 9 juin 2022, n° 19-24.368, 468 F-B) – Aux termes de l’article 910-4, alinéa 1, du code de procédure civile, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond. L’irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures. En application du l’alinéa 2 de ce texte, l’irrecevabilité prévue par l’alinéa 1 ne s’applique pas aux prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses. Tel est le cas en matière de partage où, les parties (partenaires pacsés en l’occurrence) étant respectivement demanderesses et défenderesses quant à l’établissement de l’actif et du passif, toute demande doit être considérée comme une défense à une prétention adverse.
Pour déclarer irrecevables la demande de la femme visant à ce qu’il soit dit et jugé qu’il ne peut être mis à sa charge une somme correspondant au surcoût de travaux dirigés par son ex-partenaire, sa demande relative à une estimation immobilière et sa demande visant à voir dire et juger qu’elle dispose d’une créance à son encontre au titre de sa sur-contribution aux dépenses de la vie commune, l’arrêt, après avoir rappelé les termes des articles 910-4, alinéa 1er, et 954, alinéa 3, du code de procédure civile, relève que, par ses premières conclusions, elle demandait à voir débouter sont ex-partenaire de l’ensemble de ses moyens, demandes et fins, de rejeter des débats une pièce communiquée par ce dernier, de lui attribuer un immeuble indivis moyennant le versement d’une soulte à déterminer en fonction de sa valorisation et des droits respectifs, de fixer une contribution mensuelle du père à l’entretien et à l’éducation de leur enfant, de dire que celui-ci devrait abandonner une partie de sa soulte sur l’immeuble en usufruit pour l’entretien et l’éducation de leur enfant et de le condamner au paiement de dommages-intérêts et d’une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile. L’arrêt précise que la femme sollicitait enfin la confirmation du jugement déféré pour le surplus.
L’arrêt en déduit que le dispositif de ces conclusions ne comportait ni demande relative à la créance de l’ex-partenaire telle qu’elle avait été fixée en première instance, ni demande relative à l’estimation immobilière, de sorte que, par ces conclusions, la femme avait restreint la saisine de la cour d’appel à ce qui était expressément demandé dans le dispositif de celles-ci et qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur ces demandes, qui ne constituaient pas davantage une défense à une prétention adverse.
En statuant ainsi, alors que ses dernières conclusions d’appel comportaient, selon les constatations de la cour d’appel, ces trois prétentions, lesquelles avaient trait au partage de l’indivision liant les parties, la cour d’appel a violé le texte susvisé.
NB – Cette décision sera commentée par Dominique D’Ambra dans le prochain numéro de l’AJ famille et est à rapprocher de celle du même jour (n° 20-20.688, v. ci-dessous).
- PRESTATIONS FAMILIALES
Précisions sur la notion de « prestations familiales » au sens du Règlement (CE) 883/2004 sur la coordination des systèmes de sécurité sociale (CJUE, 16 juin 2022, Commission c/ Autriche, C‑328/20) –
Saisie par la Commission européenne d’un recours en manquement à l’encontre de la législation de l’Autriche, la CJUE précise que les allocations familiales et le crédit d’impôt pour enfant à charge dont il est question constituent des prestations familiales qui ne peuvent faire l’objet d’aucune réduction, modification, suspension, suppression ou confiscation du fait que le bénéficiaire ou les membres de sa famille résident dans un État membre autre que celui où se trouve l’institution débitrice. Or, la législation autrichienne ne peut prévoir un mécanisme d’adaptation, applicable uniquement en cas de résidence de l’enfant en dehors du territoire autrichien et qui affecte essentiellement les travailleurs migrants.
- RÉGIMES MATRIMONIAUX
Contribution aux charges du mariage : exclusion de l’apport en capital de fonds personnels (Civ. 1re, 9 juin 2022, n° 20-21.277, 467 F-B) – Il résulte de l’article 214 du code civil que, sauf convention contraire des époux, l’apport en capital de fonds personnels, effectué par un époux séparé de biens pour financer la part de l’autre lors de l’acquisition d’un bien indivis affecté à l’usage familial, ne participe pas de l’exécution de son obligation de contribuer aux charges du mariage.
Viole ce texte la cour d’appel qui, pour rejeter la demande de créance de l’époux marié sous le régime de la séparation de biens au titre de l’acquisition d’un appartement, après avoir constaté que l’immeuble avait été financé pour partie au moyen d’un apport en capital provenant d’un compte courant d’associé de celui-ci, relève que le contrat de mariage des époux stipule que chacun sera réputé avoir fourni au jour le jour sa part contributive, en sorte qu’ils ne seront assujettis à aucun compte entre eux, que l’importante disparité de revenus entre eux devait conduire l’époux à contribuer de façon plus importante aux charges du mariage, que l’épouse alimentait aussi le compte commun par le versement de ses allocations chômage et familiales, que l’immeuble avait constitué le domicile conjugal et qu’ainsi les paiements effectués par l’époux participaient de son obligation de contribuer aux charges du mariage, sans dépasser une contribution normale.
NB – Cette décision sera prochainement commentée par Jérôme Casey dans les colonnes de l’AJ famille (V. déjà Civ. 1re, 3 oct. 2019 n° 18-20.828, AJ fam. 2019. 604, obs. J. Casey et Civ. 1re, 17 mars 2021, n° 19-21.463, AJ fam. 2021. 314, obs. J. Casey ; 9 févr. 2022, n° 20-14.272, D. 2022. 764, obs. J.-J. Lemouland et D. Vigneau).
- SUCCESSIONS/PROCÉDURE FAMILIALE
Calcul de l’indemnité de réduction (Civ. 1re, 22 juin 2022, n° 21-10.570, 608 FS-B) – Aux termes de l’art. 924-2 c. civ., le montant de l’indemnité de réduction se calcule d’après la valeur des biens donnés ou légués à l’époque du partage ou de leur aliénation par le gratifié et en fonction de leur état au jour où la libéralité a pris effet.
En l’absence d’indivision entre le bénéficiaire de la libéralité et l’héritier réservataire et, par conséquent, en l’absence de partage, le montant de l’indemnité de réduction se calcule d’après la valeur des biens donnés ou légués à l’époque de sa liquidation ou de leur aliénation par le gratifié. Viole cet article 924-2, alors que l’indemnité de réduction devait être calculée conformément à ce texte, la cour d’appel qui, pour rejeter la demande de l’un des fils du défunt tendant à voir incluse, dans la mission de l’expert désigné, la détermination de la valeur des biens donnés ou légués à la date la plus proche du paiement de l’indemnité de réduction en application de cet article, retient que, en l’absence d’indivision et donc de partage, le légataire universel détient la propriété des biens légués à la date du décès, qui est celle de la jouissance divise, de sorte que c’est à cette date que l’indemnité de réduction est due au réservataire et doit donc être liquidée.
NB – Cette décision sera prochainement commentée par Nathalie Levillain dans les colonnes de l’AJ famille.
Remplacement du notaire initialement désigné pour les opérations de partage (Civ. 1re, 22 juin 2022, n° 20-22.712, 534 F-B) – Il résulte de la combinaison des articles 1364 et 1371, alinéa 2, du code de procédure civile que, si les copartageants peuvent choisir d’un commun accord le remplaçant du notaire initialement désigné, celui-ci ne peut poursuivre les opérations de partage sans être désigné par le tribunal ou le juge commis.
Pour rejeter la demande d’une des filles des défunts tendant à la désignation d’un nouveau notaire pour procéder aux opérations de comptes, liquidation et partage des successions de ses parents, l’arrêt retient, d’une part, que, par arrêté du garde des sceaux du 9 novembre 2011, publié le 23 novembre 2011, deux personnes ont été nommées notaires associés en remplacement du premier notaire désigné par jugement et qu’elles ont prêté serment en cette qualité devant le tribunal le 7 décembre 2011, d’autre part, qu’aucune partie n’a sollicité la désignation d’un nouveau notaire en novembre 2011 et qu’il apparaît que les héritières ont considéré que l’un des deux notaires, successeur du premier, poursuivrait les opérations de partage avec tous les documents dont disposait celui-ci.
En statuant ainsi, par des motifs inopérants, alors qu’il résultait de ses propres constatations qu’il n’avait pas été pourvu au remplacement du notaire initialement désigné par une décision du tribunal ou du juge commis à la surveillance des opérations de partage, la cour d’appel a violé les textes susvisés.
NB – Cette décision sera prochainement commentée par Jérôme Casey dans les colonnes de l’AJ famille.
Ne peut être déclarée parfaite l’acceptation à concurrence de l’actif net qui ne comporte ni élection de domicile ni la qualité en vertu de laquelle les déclarants sont appelés à la succession (Civ. 1re, 9 juin 2022, n° 20-17.776, 463 F-D) – Viole l’obligation pour le juge de ne pas dénaturer l’écrit qui lui est soumis une cour d’appel qui, pour déclarer parfaite l’acceptation à concurrence de l’actif net de la succession par l’épouse et la fille du défunt, retient que les déclarations établies par celles-ci comportent l’ensemble des mentions légales, alors que ces déclarations ne comportaient ni élection de domicile ni mention de la qualité en vertu de laquelle les déclarantes étaient appelées à la succession.
NB – Cette décision sera prochainement commentée par Nathalie Levillain dans les colonnes de l’AJ famille.
Recevabilité d’une demande d’augmentation du quantum des demandes de rapport qui s’analyse en une défense aux prétentions adverses (Civ. 1re, 9 juin 2022, n° 20-20.688, 473 FS-B) – En application de l’alinéa 2 de l’article 910-4 du code de procédure civile, l’irrecevabilité prévue par son alinéa 1er ne s’applique pas aux prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses. Tel est le cas en matière de partage où, les parties étant respectivement demanderesses et défenderesses quant à l’établissement de l’actif et du passif, toute demande doit être considérée comme une défense à une prétention adverse.
Viole ce texte la cour d’appel qui, pour déclarer irrecevables les prétentions nouvelles formées par l’un des trois enfants des défunts au titre des rapports dus par les deux autres héritiers dans ses conclusions déposées postérieurement au 20 février 2019, retient que, en l’absence de survenance ou de révélation d’un fait postérieur à leurs écritures déposées dans les délais des articles 908, 909 et 910 du code de procédure civile, ne sont recevables que les prétentions formées par lui dans ses conclusions du 26 novembre 2018 formant appel incident et que les prétentions contenues dans les conclusions postérieures se heurtent à l’irrecevabilité édictée par l’article 910-4 du même code, alors que les prétentions formées par dans les dernières conclusions portaient sur de nouvelles demandes de rapports dus par les deux autres héritiers et avaient donc trait au partage de l’indivision successorale, de sorte qu’elles devaient s’analyser en une défense aux prétentions adverses, la cour d’appel a violé le texte susvisé.
NB – Cette décision, qui sera prochainement commentée par Jérôme Casey dans les colonnes de l’AJ famille, est à rapprocher de l’arrêt du même jour (n°19-24.368, supra).
L’héritier ne peut invoquer le manquement contractuel à l’égard du défunt qui aurait pu être effacé (Com. 15 juin 2022, n° 19-25.750, 398 F-B) – Il résulte de l’article 1165 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016, et de l’article 1382, devenu 1240, de ce code que le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage. Un héritier ne peut agir sur ce fondement en invoquant un manquement contractuel commis envers son auteur qu’en réparation d’un préjudice qui lui est personnel. N’est pas un préjudice personnel subi par l’héritier celui qui aurait pu être effacé, du vivant de son auteur, par une action en indemnisation exercée par ce dernier ou qui peut l’être, après son décès, par une action exercée au profit de la succession en application de l’article 724 du code civil.
En l’occurrence, sur les conseils de deux établissements financiers, une femme avait souscrit auprès du premier un prêt remboursable in fine d’un montant de 1 143 367,63 euros, arrivant à échéance en 2008, et versé le capital ainsi prêté sur un contrat d’assurance vie, souscrit par l’intermédiaire du second, dont le rachat devait permettre le remboursement du prêt à son terme. Seulement le rachat n’a pas permis le remboursement du prêt dans son intégralité. Les 684 982,56 euros restant ont été remboursés au moyen d’une ouverture de crédit utilisable par découvert en compte consentie par le premier établissement. Au décès de l’emprunteuse, ses enfants et héritiers, ont assigné les deux établissements en indemnisation de préjudices résultant de manquements à leurs obligations d’information et de conseil envers leur mère ayant aggravé le passif de la succession de leur mère et les contraignant à payer sur leurs deniers personnels le reliquat des sommes dues au titre des prêts accordés. En vain, en appel comme en cassation :
- d’une part, ayant retenu que les héritiers invoquaient un préjudice, causé par les manquements des établissements financiers, correspondant à la somme qu’avait dû emprunter la défunte pour rembourser le solde du prêt non couvert par le rachat du contrat d’assurance-vie, augmentée des intérêts payés par celle-ci au titre du prêt in fine et du crédit souscrit pour son remboursement, la cour d’appel en a exactement déduit qu’ils se prévalaient ainsi, non d’un préjudice qu’ils auraient personnellement subi, mais d’un préjudice subi par leur mère dont la réparation ne pouvait être poursuivie que sur un fondement contractuel ;
- d’autre part, en faisant valoir que, en cas de rejet de leurs demandes de réparation des préjudices causés par les manquements reprochés, ils seraient tenus de payer sur leurs deniers personnels les sommes restant dues au titre du crédit souscrit par leur mère pour rembourser le prêt in fine à son terme, les héritiers ne se prévalaient d’aucun préjudice qui n’aurait pu être effacé par une action en indemnisation exercée par leur mère, de son vivant, ou, après le décès de celle-ci, par un de ses héritiers en application de l’article 724 du code civil.
NB – Cette décision sera prochainement commentée par Jérôme Casey dans les colonnes de l’AJ famille.
Intérêt direct et légitime d’une agence immobilière à identifier les héritiers du défunt (Civ. 1re, 9 juin 2022, n° 20-14.227, 466 F-D) – Vu l’article 36 de la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 dispose : « Hormis le cas des successions soumises au régime de la vacance ou de la déshérence, nul ne peut se livrer ou prêter son concours à la recherche d’héritier dans une succession ouverte ou dont un actif a été omis lors du règlement de la succession s’il n’est porteur d’un mandat donné à cette fin. Le mandat peut être donné par toute personne qui a un intérêt direct et légitime à l’identification des héritiers ou au règlement de la succession./ Aucune rémunération, sous quelque forme que ce soit, et aucun remboursement de frais n’est dû aux personnes qui ont entrepris ou se sont prêtées aux opérations susvisées sans avoir été préalablement mandatées à cette fin dans les conditions du premier alinéa. »
En l’occurrence, une agence immobilière, qui avait reçu mandat d’un client de rechercher un bien, avait, une fois celui-ci trouvé – un appartement appartenant à une femme décédée -, mandaté une société de généalogie (la société) de rechercher les héritiers de la propriétaire, laquelle, à son tour, a fait signer à la nièce de la défunte un contrat de révélation de succession et un mandat de représentation en vue du règlement de celle-ci, moyennant le versement d’une quotité de l’actif devant lui revenir. C’est alors que la société lui a révélé qu’elle était héritière de sa tante. Seulement, la nièce l’a finalement assignée en nullité du contrat de révélation. Avec succès, si bien que la Société s’est pourvue en cassation.
Pour rejeter l’ensemble des demandes formées par la société de généalogie sur le fondement du contrat de révélation de succession et la condamner à payer à la nièce de la défunte la somme totale de 126 171 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 octobre 2014, l’arrêt retient qu’il n’est pas justifié que l’agence immobilière (qui l’aurait mandatée) ait eu un intérêt direct et légitime à l’identification des héritiers ou au règlement de la succession de la tante, dès lors qu’il n’est pas établi qu’un mandat de vente (de la part de la défunte) ait été confié à cette agence préalablement au prétendu mandat confié à la société, de sorte qu’aucun mandat de recherche conforme aux dispositions légales n’a pu être donné à celle-ci.
En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si l’agence immobilière ayant prétendument mandaté la société n’avait pas un intérêt direct et légitime à identifier les héritiers de la défunte en ce que des clients entendant acquérir un appartement dépendant de la succession lui auraient confié un mandat de recherche, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision.
NB – Cette décision sera prochainement commentée par Nathalie Levillain dans les colonnes de l’AJ famille.
Les libéralités faites en usufruit s’imputent en assiette (Civ. 1re, 22 juin 2022, n° 20-23.215, 522 FS-B) – Il résulte de l’article 913 du code civil qu’aucune disposition testamentaire ne peut modifier les droits que les héritiers réservataires tiennent de la loi. Aux termes de l’article 919-2 du même code, la libéralité faite hors part successorale s’impute sur la quotité disponible. L’excédent est sujet à réduction. Il s’en déduit que les libéralités faites en usufruit s’imputent en assiette.
Viole ces textes une cour d’appel qui, pour rejeter la demande en réduction du legs formée par la fille de la défunte, retient que la valeur de l’usufruit du bien immobilier légué par sa mère à sa compagne, estimé à soixante pour cent de sa valeur en pleine propriété, est inférieure au montant de la quotité disponible, alors que l’atteinte à la réserve devait s’apprécier en imputant le legs en usufruit sur la quotité disponible, non après conversion en valeur pleine propriété, mais en assiette.
NB – Cette décision sera prochainement commentée par Nathalie Levillain dans les colonnes de l’AJ famille.
Appréciation distincte des créances réclamées au titre de l’acquisition et au titre de l’amélioration du bien de l’autre époux séparé de biens (Civ. 1re, 22 juin 2022, n° 20-20.202, 533 F-B) – Il résulte de la combinaison des articles 1543, 1479, alinéa 2, 1469, alinéa 3 du code civil , d’une part, que, lorsque les fonds d’un époux séparé de biens ont servi à acquérir et/ou à améliorer un bien personnel de l’autre, sa créance contre ce dernier ne peut être moindre que le profit subsistant ni moindre que le montant nominal de la dépense faite, d’autre part, que le profit subsistant, qui représente l’avantage réellement procuré au fonds emprunteur, se détermine d’après la proportion dans laquelle les fonds empruntés au patrimoine de l’époux appauvri ont contribué au financement de l’acquisition ou de l’amélioration du bien personnel de son conjoint.
Mais la créance réclamée par un époux au titre des dépenses d’acquisition du bien de l’époux doit être évaluée distinctement de celle réclamée au titre des dépenses d’amélioration, le calcul du profit subsistant s’effectuant en établissant la proportion de sa contribution au paiement du coût global de l’acquisition puis en l’appliquant à la valeur du bien au jour de la liquidation de la créance selon son état lors de l’acquisition. Et, réciproquement, la créance réclamée au titre des dépenses d’amélioration du bien de l’autre doit être évaluée distinctement de celle réclamée au titre des dépenses d’acquisition, le calcul du profit subsistant s’effectuant en établissant la proportion de sa contribution au paiement des travaux puis en l’appliquant à la différence existant entre la valeur au jour de la liquidation du bien amélioré et celle qui aurait été la sienne sans les travaux.
NB – Cette décision sera prochainement commentée par Jérôme Casey dans les colonnes de l’AJ famille.
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Assistance éducative : collégialité, présence du greffier, inexécution des décisions… De quoi alimenter la réflexion !
17 juin 2022 - 20:01
Le colloque de l’Association française des magistrats de la jeunesse et de la famille s’est tenu aujourd’hui au tribunal judiciaire de Paris autour d’un thème des plus intéressants et d’actualité : « Le juge des enfants : interroger les problématiques professionnelles à l’aune des nouvelles réformes » (pour le détail du programme, v. notre brève du 7 juin 2022). Il aurait pu être ajouté « à l’aune des évolutions tant de la société que de la place mais aussi de la maturité de l’enfant ». Cela est apparu clairement lors des échanges. D’un côté, une place croissante accordée à l’enfant – au centre de tout – ; de l’autre, l’inadaptation des réponses apportées et l’inexécution des décisions qui le concerne. Pourtant, tous les magistrats présents, prompts à se remettre en question, avaient à cœur de trouver des solutions pour améliorer le sort des enfants en assistance éducative.
Mais au-delà de la sempiternelle question des moyens (de personnels, d’investigations, etc.), force est de constater que les avis divergent sur les chemins à emprunter.
Je prendrai l’exemple de la collégialité. J’étais moi-même, avant d’assister aux échanges d’aujourd’hui (si l’on met de côté le problème de l’affaiblissement de la spécialisation de la justice des mineurs), assez convaincue par l’utilité de la nouvelle disposition de l’article L. 252-6 du code de l’organisation judiciaire qui permet au juge des enfants, à tout moment de la procédure, d’ordonner son renvoi à la formation collégiale du tribunal judiciaire, qui statue alors comme juge des enfants. À plusieurs ne juge-t-on pas mieux ? Le juge n’est-il pas moins isolé pour faire face à une complexification croissante des dossiers ? Les avis divergent. La collégialité pourrait ajouter une strate supplémentaire de complexité : faut-il nécessairement faire droit à la demande de collégialité d’une partie ? Si le juge des enfants, parce qu’il est minoritaire, se voit finalement imposer une décision à laquelle il ne souscrit pas complètement, comment va-t-il ensuite la gérer ? La décision modificative doit-elle également être prise collégialement pour respecter le parallélisme des formes ? Une décision prise par le juge des enfants seul ne sera-t-elle pas plus fragile, plus susceptible d’être remise en question ? Le juge des enfants ne perdra-t-il pas de son autorité ? La famille ne va-t-elle pas se sentir encore davantage jugée, persécutée ou ne va-t-elle pas s’inquiéter de la solennité de l’audience ? Finalement, en l’absence de l’enfant, le sujet de l’audience ne devient-il pas celui des parents dans l’exercice de leur autorité parentale alors qu’il devrait rester celui de l’enfant ? Je pourrais ainsi poursuivre… tant les détracteurs de la collégialité me semblaient regorger d’arguments (sur la question de la collégialité, v. égal. A. Gouttenoire, L’audience et l’audition de l’enfant dans la procédure d’assistance éducative, in dossier « Réforme de la protection des enfants », AJ fam. 2022. 251).
En revanche, sur la question de la présence du greffier normalement obligatoire lors de l’audience d’assistance éducative – ce qui, dans la réalité, est loin d’être le cas, comme le souligne une enquête de l’AFMJF réalisée en mai dernier qui relève la priorité donnée aux audiences pénales – tous ont clamé sa nécessité, notamment parce qu’elle permet aux magistrats de rester concentrés sur leur tâche sans avoir à prendre eux-mêmes des notes d’audience et, accessoirement, parce que sa présence est requise à peine de nullité de la décision du juge !
Quoi qu’il en soit, félicitations aux organisateurs de ce bel événement et saluons l’engagement de tous les acteurs présents de la protection de l’enfance, dont les avocats bien entendu, leur non-présence systématique aux côtés de l’enfant ayant encore été une énième fois déplorée (v. sur la question, D. Attias, Un rendez-vous raté, perspectives d’une nouvelle fonction pour l’avocat d’enfants, in dossier précité, AJ fam. 2022. 256). Preuve que l’unanimité ne suffit pas toujours à faire bouger les lignes…
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Réforme de la protection des enfants : un dossier complet
14 juin 2022 - 07:13
Comme le rappelle la circulaire du 3 mai 2022 relative aux dispositions immédiatement applicables issues de la loi n° 2022-140 du 7 févr. 2022 relative à la protection des enfants (NOR : JUSF2207619C), cette loi s’inscrit dans la continuité des lois n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance et n° 2016-297 du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant. Cette réforme de la protection des enfants, qui apporte de réelles avancées tout en restant insuffisante, méritait que l’AJ famille y consacre deux numéros.
Le premier volet du dossier, publié le mois dernier, est consacré aux améliorations des garanties procédurales en matière d’assistance éducative : collégialité de la juridiction « juge des enfants », audition individuelle de l’enfant, représentation de l’enfant mineur par un administrateur ad hoc… même si la désignation d’un avocat pour l’enfant capable de discernement demeure une simple faculté. Il est également question du choix fait par le législateur de privilégier l’accueil de l’enfant chez un tiers digne de confiance et d’assouplir les conditions dans lesquelles le juge des enfants peut autoriser la personne, les services ou l’établissement à qui l’enfant est confié à exercer des actes non usuels relevant de l’autorité parentale.
L’analyse de la réforme de la protection des enfants se poursuit dans le second volet du dossier, publié ce mois-ci, autour de la reconnaissance légale du parrainage de proximité et de la possibilité pour le juge des enfants de prononcer non seulement des mesures de milieu ouvert renforcées ou intensifiées pour une durée maximale d’un an renouvelable, mais également une médiation familiale après avoir obtenu l’accord des parents. Aux fins de lutter plus efficacement contre la maltraitance, dont une définition est désormais inscrite au sein du code de l’action sociale et des familles, un éclairage est apporté sur les mesures qui ont été créées pour garantir l’accueil des enfants et vérifier le parcours des personnes qui en ont la charge par des contrôles systématiques renforcés. L’effort de rationalisation qui a été trouvé dans la gouvernance est également souligné. Enfin, un focus est fait sur les mineurs isolés étrangers : les enfants pauvres de la réforme …
Plan du dossier
- l’égalité des plus faibles devant la loi, par Perrine Goulet
- L’audience et l’audition de l’enfant dans la procédure d’assistance éducative, par Adeline Gouttenoire
- Les droits du jeune enfant en assistance éducative, par Laurent Gebler
- Un rendez-vous raté, perspectives d’une nouvelle fonction pour l’avocat d’enfants, par Dominique Attias
- L’extension des compétences du juge des enfants en matière d’autorité parentale : un risque pour la protection de l’enfant ?, par Caroline Siffrein-Blanc
- Actes usuels/non usuels de l’autorité parentale, par Valérie Avena-Robardet et Caroline Siffrein-Blanc
- L’accueil de l’enfant chez un proche, les particularités du droit français, par Flore Capelier
- Le parrainage de proximité : une reconnaissance légale bienvenue ?, par David Pioli
- Entretien avec Nicole Galy, fondatrice et présidente d’honneur de l’association Horizon parrainage, par Frédérique Eudier
- Possibilité pour le juge de prononcer des mesures de milieu ouvert renforcées ou intensifiées, par Salvatore Stella
- La médiation familiale, une nouveauté pour le juge des enfants, par Christina Rinaldis
- Définir la maltraitance : ambitions, méthode et effets attendus de la nouvelle définition de 2022, par Alice Casagrande
- L’impact de la loi du 7 févr. 2022 dans les services de placements familiaux, par Cathy Blanc Chardan et Sylvain Brenet
- La gouvernance de la protection de l’enfance, par Josiane Bigot
- Les mineurs isolés étrangers : enfants pauvres de la réforme, par Christophe Daadouch et Jean-François Martini
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Réforme de l’adoption : un dossier incontournable
13 juin 2022 - 12:09
L’ouverture de l’adoption – plénière comme simple – à toutes les formes de conjugalité est à n’en pas douter la mesure phare de la loi n° 2022-219 du 21 février dernier entrée en vigueur le 23 févr. 2022. En réalité, il est bien d’autres évolutions qui ont été synthétisées, pour le dossier du mois d’avril de l’AJ famille, dans un tableau, avec quelques focus sur des points particuliers comme :
- l’adoption forcée de l’enfant conçu par AMP au sein d’un couple de femmes séparées ;
- les nouveautés qui impactent le conseil des familles ;
- le regard de notaires sur la réforme ;
- les nouvelles garanties en matière d’adoption internationale ;
- la règle de conflits de lois commune aux époux ;
- et la pérennisation, par la loi n° 2022-140 du 7 févr. 2022, de l’Agence française de l’adoption au sein d’un nouveau groupement d’intérêt public.
Le dossier s’achève sur deux modèles de requêtes, l’une en adoption plénière de l’enfant du conjoint/partenaire/concubin et l’autre contentieuse en adoption plénière de l’enfant de la mère inscrite dans l’acte de naissance.
J’en profite pour remercier tous les auteurs qui ont fait du numéro d’avril de l’AJ famille un numéro indispensable pour les praticiens, ainsi que Pascale Salvage-Gerest qui m’a beaucoup aidée dans son élaboration et qui avait commenté la loi dès sa parution (AJ fam. 2022. 136).
- Adoption : entre concurrence et complémentarité, par Anne Raynaud
- Règles relatives à l’adoption plénière et à l’adoption simple, par Edith Launay et Raphaëlle Wach
- L’ouverture de l’adoption aux couples non mariés, par Maïté Saulier
- D’un bricolage à l’autre : l’adoption forcée de l’enfant conçu par AMP au sein d’un couple de femmes aujourd’hui séparées, par Laurence Brunet et Marie Mesnil
- Le conseil de famille des pupilles de l’État revisité par la loi du 21 février 2022, par Anne Royal
- Loi du 21 février 2022 visant à reformer l’adoption : l’adaptation du système français de l’adoption internationale aux enjeux actuels, par Morgane Coqué, Floriane Choplain, Camille Simon-Koller et Morgane Pétrignet
- L’Agence française de l’adoption version 2022, par Frédérique Eudier
- Annotations sur l’article 370-3 nouveau du code civil, par Jérémy Houssier
- Le regard de notaires sur la réforme de l’adoption, par Guillaume Soudey et Mathieu Mouton-Uhlig
- Focus sur les nouveaux empêchements à mariage, par Amélie Dionisi-Peyrusse
- Requête en adoption plénière de l’enfant du conjoint / partenaire / concubin, par Florent Berdeaux
- Requête contentieuse en adoption plénière de l’enfant de la mère inscrite dans l’acte de naissance, par Florent Berdeaux
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Actualité jurisprudentielle de la semaine : divorce, libéralités, mineurs, majeurs protégés et successions
11 juin 2022 - 07:25
Voici l’actualité jurisprudentielle que j’ai relevée cette semaine et la semaine dernière pour ces matières :
- divorce
- libéralités
- majeurs protégés
- mineurs
- successions
- DIVORCE
Refus de renvoi d’une QPC à propos du paiement de la pension alimentaire au titre du devoir de secours jusqu’à la dissolution du mariage (Crim. 18 mai 2022, n° 21-86.978, 00745 F-D) – Il était demandé à la Chambre criminelle de la Cour de cassation le renvoi de deux questions prioritaires de constitutionnalité :
Les articles 254, 260, 2°, et 270, alinéa 1er, du code civil, tels qu’interprétés par la jurisprudence, qui subordonnent la cessation du versement d’une pension alimentaire au caractère définitif du divorce, ne portent-ils pas atteinte : 1. au droit de propriété ; 2. au principe d’égalité entre les époux débiteurs d’une pension alimentaire dont le divorce est acquis ? D’une part, parce qu’ils imposent à l’époux débiteur d’une pension alimentaire de continuer à verser cette pension en cas d’appel des dispositions du jugement relatives au prononcé du divorce, même lorsque le principe du divorce est acquis et ne peut plus être remis en cause par le juge d’appel, et ce jusqu’à l’intervention de son arrêt ; d’autre part, en laissant le seul époux dont le prononcé du divorce a fait l’objet d’un recours débiteur d’une pension alimentaire, même lorsque le principe du divorce ne peut plus être remis en cause par le juge d’appel, et ce jusqu’à l’intervention de son arrêt.
La Cour de cassation s’y refuse aux motifs que les questions posées ne présentent pas un caractère sérieux :
- d’une part, le paiement d’une pension alimentaire, dont le principe est prévu par la loi et le montant est fixé par le juge, compte tenu des circonstances particulières de chaque affaire, intervient en exécution du devoir de secours, qui naît du mariage et ne disparaît qu’avec lui, conformément au principe constitutionnel de garantie de la sécurité matérielle de l’individu et de la famille, affirmé par le Préambule de la Constitution de 1946 ;
- d’autre part, la poursuite de ce paiement jusqu’à la dissolution du mariage ne méconnaît pas le principe d’égalité, car les débiteurs d’une pension alimentaire qui se trouvent dans une même situation au regard d’une procédure de divorce sont tenus des mêmes obligations contributives.
- LIBÉRALITÉS
Libéralités faites à un auxiliaire médical : renvoi d’une QPC au Conseil constitutionnel (Civ. 1re, 24 mai 2022, n° 22-40.005, 521 FS-D) – « Les dispositions de l’article 909, alinéa 1er du code civil, qui interdisent à une personne de gratifier les auxiliaires médicaux qui lui ont procuré des soins au cours de sa dernière maladie, sont-elles contraires aux articles 2, 4, 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen en ce qu’elles portent atteinte au droit de disposer librement de ses biens en dehors de tout constat d’inaptitude du disposant ? »
La question présente un caractère sérieux en ce que, ayant pour conséquence de réduire le droit de disposer librement de ses biens de la personne soignée pour la maladie dont elle meurt hors tout constat d’inaptitude de celle-ci, l’article 909, alinéa 1er, du code civil serait susceptible de porter une atteinte disproportionnée au droit de propriété protégé par l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789.
En conséquence, il y a lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel.
NB : on fera évidemment le rapprochement avec la décision du Conseil qui, le 12 mars 2021, a déclaré inconstitutionnelle l’incapacité de recevoir à titre gratuit des auxiliaires de vie du 2 ° de l’article L. 7231-1 du code du travail (v. Cons. const., 12 mars 2021, n° 2020-888 QPC, AJ fam. 2021. 230, obs. D. Pollet et J. Casey).
- MAJEURS PROTÉGÉS
Le juge ne peut supprimer le droit de vote du majeur sous tutelle (Civ. 1re, 18 mai 2022, n° 20-22.876, 333 F-D) – Aux termes de l’article L. 72-1, alinéa 1er, du code électoral, le majeur protégé exerce personnellement son droit de vote pour lequel il ne peut être représenté par la personne chargée de la mesure de protection le concernant. Viole ce texte l’arrêt qui supprime le droit de vote de la majeure placée sous tutelle.
NB – Nous rappellerons qu’en abrogeant l’art. L. 5 c. élect., la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 a mis fin à la possibilité donnée au juge, lors de l’ouverture ou du renouvellement d’une mesure de tutelle, de se prononcer sur la capacité électorale du majeur protégé (É. Pecqueur, Sort des majeurs protégés dans la réforme, AJ fam. 2019. 266 ; Ch. Gamaleu Kameni, Brèves réflexions sur le droit de vote des majeurs protégés au regard de la loi du 23 mars 2019, AJ fam. 2019. 515. – v. égal. CEDH 15 févr. 2022, n° 26081/17, AJ fam. 2022. 165, obs. É. Bertin).
- MINEURS
Enlèvement international et délit de soustraction de mineur (Crim, 1er juin 2022, n° 21-81.813, n° 00577 F-B) – Pour dire établi le délit de soustraction de mineur à l’encontre d’une mère qui, pour sa défense, objectait que le père n’avait ni droit de garde, ni autorité parentale à l’égard de l’enfant, une cour d’appel énonce que la mère ne pouvait ignorer le sens de la décision rendue par la juridiction bordelaise, qui avait refusé d’ordonner le retour de l’enfant en Turquie. Les juges relèvent qu’à la date des faits, alors que le juge aux affaires familiales avait admis la compétence du juge turc, aucune décision française n’avait reconnu au père l’autorité parentale sur l’enfant. Ils ajoutent que depuis la fuite de Turquie de son père, en décembre 2012, son fils mineur résidait chez ce dernier en France (en octobre 2015, le tribunal d’Istanbul a prononcé le divorce et accordé la garde de l’enfant à la mère ; le père a relevé appel de ce jugement). Ils concluent que les éléments constitutifs de l’infraction, consistant à soustraire l’enfant mineur des mains de son père chez qui il avait sa résidence habituelle, sont caractérisés, ainsi que la circonstance aggravante. En l’état de ces seuls motifs, la cour d’appel a justifié sa décision.
- SUCCESSIONS
Conditions de validité de la déclaration de renonciation à succession faite devant la juridiction de l’État membre dans lequel l’héritier a sa résidence habituelle (CJUE, 2 juin 2022 aff. C‑617/20, T.N.) – Les articles 13 et 28 du Règlement (UE) n° 650/2012 du 4 juillet 2012 dit “Successions” doivent être interprétés en ce sens qu’une déclaration concernant la renonciation à la succession faite par un héritier devant une juridiction de l’État membre de sa résidence habituelle est considérée comme valable quant à la forme dès lors que les exigences de forme applicables devant cette juridiction ont été respectées, sans qu’il soit nécessaire, aux fins de cette validité, qu’elle remplisse les exigences de forme requises par la loi applicable à la succession.
Point de départ des intérêts des sommes données sujettes à rapport (Civ. 1re, 18 mai 2022, n° 20-20.117, 409 F-D) – Selon l’article 856, alinéa 2, du code civil, les intérêts des choses sujettes à rapport ne sont dus qu’à compter du jour où le montant du rapport est déterminé. Il en résulte que, lorsque le montant du rapport est fixé par l’acte de donation à la valeur du bien au jour de la donation, les intérêts courent à compter du jour du décès.
Pour dire que les intérêts sur les sommes de 38 200 euros et 1 555 euros rapportables par le fils du couple décédé au titre des donations des 23 mars 2001 et 19 juillet 2005 courront au taux légal à compter de la date où il est rendu, l’arrêt, après avoir fixé, au regard des stipulations dérogatoires de ce second acte, la valeur sujette au rapport à celle des biens donnés au 19 juillet 2005, retient que le montant du rapport est déterminé à cette date. En statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses constatations que le montant du rapport avait été fixé par l’acte de donation du 19 juillet 2005 à la valeur des biens au jour de la donation, de sorte que les intérêts sur les sommes données étaient dus à compter du 1er avril 2009, date du décès du donateur, la cour d’appel a violé le texte susvisé.
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Réforme du nom : la circulaire et le formulaire Cerfa !
8 juin 2022 - 11:10
La loi n° 2022-301 du 2 mars 2022 relative au choix du nom issu de la filiation apporte, au 1er juillet 2022, plusieurs modifications aux règles relatives au nom d’usage, au changement de nom et au changement de prénom. La réforme du nom sera précisément le thème du dossier de juillet de l’AJ famille qui promet d’être très intéressant.
La circulaire d’application vient d’être publiée. Elle est accompagnée de trois fiches et sept annexes :
- Fiche 1 – Les règles relatives au nom d’usage à raison du mariage et de la filiation
Annexe 1-1 – Modèle d’accord parental relatif au nom d’usage de l’enfant mineur
Annexe 1-2 : modèle de consentement du mineur de plus de 13 ans à son nom d’usage
- Fiche 2 – Les règles relatives au changement de nom aux fins d’adjonction ou de substitution du nom du parent qui n’a pas transmis le sien
Annexe 2-1 – Modèle de changement de nom d’une personne majeure
Annexe 2-2 – Libellés des mentions relatives au changement de nom
Annexe 2-3 – Notification au demandeur du changement de nom
Annexe 2-4 – Lettre-type notifiant au demandeur la décision de refus du procureur de la République
Annexe 2-5 – Modèle de consentement du mineur de treize ans et plus à son changement de nom à l’occasion de la procédure de retrait de l’autorité parentale
- Fiche 3 – Le changement de prénom d’un majeur protégé
Le formulaire Cerfa n° 16229*01 est d’ores et déjà disponible en cliquant ICI, de même que sa notice n° 52372#01 en cliquant ICI.
Lire la Circulaire du 3 juin 2022 de présentation des dispositions issues de la loi n° 2022-301 du 2 mars 2022 relative au choix du nom issu de la filiation (NOR : JUSC2215808C)
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Le juge des enfants : interroger les problématiques professionnelles à l’aune des nouvelles réformes
7 juin 2022 - 11:25
L’association française des magistrats de la jeunesse et de la famille organise un colloque, les 17 et 18 juin, sur le thème : « Le juge des enfants : interroger les problématiques professionnelles à l’aune des nouvelles réformes ».
- Programme
Le 17 juin 2022
9 h : Propos introductif de Madame Charlotte Caubel, Directrice de la Protection Judiciaire de la Jeunesse
1) Les enjeux procéduraux de l’audience : – La collégialité ; – La place du greffe à l’audience
2) La place de l’enfant : – L’appréciation du discernement ; – Désignation et rôles respectifs de l’avocat et de l’administrateur ad hoc ; – Les modalités de l’audition de l’enfant.
14 h : 1) L’inexécution des décisions de justice ; 2) Quelles perspectives pour le milieu ouvert
Avec l’aimable participation de :
. Madame Laurence Bellon (1re Vice présidente auprès du tribunal pour enfants de Marseille)
. Maître Josine Bitton (Avocate au barreau de Bobigny)
. Madame Muriel Eglin (1re Vice-présidente auprès du tribunal pour enfants de Bobigny
. Madame Geneviève Gueydan (Inspectrice générale des affaires sociales / IGAS)
. Madame Emmanuelle Lajus-Thizon (Magistrate , en charge de la coordination de la formation Juge des enfants à l’École Nationale de la Magistrature)
. Madame Anne Kiriakides (Vice-présidente auprès du tribunal pour enfants d’Avignon)
. Monsieur Bernard Bonne (Sénateur)
. Monsieur Adrien Demeester (Directeur de greffe auprès du tribunal judiciaire de Saint-Omer)
. Monsieur Laurent Gebler (Président de chambre auprès de la Cour d’appel de Paris)
. Monsieur Bruno Piketty (Chef de service auprès de AEF/ Paris)
. Monsieur Samuel Van de Vyvere (Directeur en protection de l’enfance auprès de la Sauvegarde du Nord)
Le 18 juin 2022
9 h : 1) Le Code de la Justice Pénale des Mineurs, quel bilan 9 mois après sa mise en oeuvre
Intervention de Madame Anne Coquet, sous-directrice des missions de protection judiciaire et d’éducation auprès de la Protection Judiciaire de la Jeunesse, et de Madame Magali Berlin, chargée de mission CJPM auprès de la Protection Judiciaire de la Jeunesse
2) Table ronde juge des enfants /avocat/PJJ : échange avec les participants
Avec l’aimable participation de :
. Madame Pascale Bruston (1re Vice-présidente auprès du tribunal pour enfants de Paris)
. Madame Alice Grunenwald (1re Vice-présidente auprès du tribunal pour enfants de Saint Etienne)
. Maître Isabelle Oger Ombredane (Avocate au barreau d’Angers)
. Madame Marion Wiszniak (Directrice des missions éducatives auprès de la DIRPJJ Sud-Ouest)
14 h : Assemblée générale annuelle.
(Réservée aux adhérents)
- Lieu
TRIBUNAL JUDICIAIRE
Parvis du Tribunal de Paris
Salle de l’auditorium
29-45 avenue de la Porte de Clichy
75859 PARIS CEDEX 17
- Inscription
contact@afmjf.fr
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Bilan de la réforme de la procédure de divorce : questionnaires à remplir
30 mai 2022 - 15:10
Afin de tirer le bilan de la réforme de la procédure de divorce opérée par la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, entrée en vigueur le 1er janvier 2021, l’AJ famille publiera prochainement dans ses colonnes un dossier sur ce thème, enrichi des retours d’expérience des avocats, des magistrats et des notaires.
Pour ce faire, nous vous serions très reconnaissants de répondre aux questionnaires suivants en fonction de votre profil :
Merci beaucoup pour votre précieuse participation !
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Actualité jurisprudentielle de la semaine : filiation/nationalité, enlèvement d’enfants, action en indemnisation au nom du mineur
27 mai 2022 - 09:19
Voici quelques arrêts relevés cette fin de semaine, en tout cas pour ceux qui n’ont pas la chance de faire le pont…
- FILIATION/ NATIONALITÉ/DIP
De l’effet collectif attaché à l’acquisition de la nationalité française (Civ. 1re, 25 mai 2022, n° 20-50.035, 412 FS-B) – Il résulte de l’article 84 du code de la nationalité, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 93-933 du 22 juillet 1993, que l’effet collectif attaché à l’acquisition de la nationalité française ne s’étend qu’aux enfants dont la filiation a été établie avant cette acquisition par leur auteur.
Viole ce texte et l’article 311-14 du code civil, selon lequel la filiation est régie par la loi personnelle de la mère au jour de la naissance de l’enfant, la cour d’appel qui, pour déclarer française une personne née d’une mère étrangère, retient que son acte de naissance établit sa filiation à l’égard de son père et qu’elle bénéficie de l’effet collectif attaché à la déclaration d’acquisition de la nationalité française souscrite par celui-ci, sans rechercher, ainsi qu’il le lui incombait, si sa filiation avait été établie, selon la loi de sa mère, avant l’acquisition par son père de la nationalité française.
NB – Cette décision sera prochainement commentée dans l’AJ famille par Aziber Didot – Seïd Algadi.
- MINEURS
Incrimination pénale visant spécifiquement l’enlèvement international de mineurs (CJUE, 16 mai 2022, n° C-724/21) – L’article 21 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une législation d’un État membre (en l’occurrence l’art. 235 du code pénal allemand) en vertu de laquelle le fait, pour un parent, de soustraire son enfant au curateur investi du droit de fixer le lieu de sa résidence (en vertu d’une délégation partielle de l’autorité parentale, dite « curatelle pour protection complémentaire » [« Ergänzungspflegeschaft »]), dans le but de le déplacer à l’étranger, est passible de sanctions pénales, même en l’absence de recours à la violence, à la menace d’un mal sensible ou à la ruse, tandis que, lorsque l’enfant se trouve sur le territoire du premier État membre, ce même fait n’est punissable qu’en cas de recours à la violence, à la menace d’un mal sensible ou à la ruse. La Cour souligne pour ce faire que :
- lorsqu’une disposition d’un État membre, telle que l’article 235 du code pénal allemand, opère une distinction selon que l’enfant est déplacé, par son parent, sur le territoire de cet État membre ou en dehors de celui-ci, notamment vers un autre État membre, elle établit une différence de traitement qui est susceptible d’affecter, voire de restreindre la liberté de circulation des citoyens de l’Union, au sens de l’article 21 TFUE (§ 24) ;
- une telle restriction à la libre circulation des citoyens de l’Union qui, comme dans l’affaire au principal, est indépendante de la nationalité des personnes concernées peut être justifiée si elle est fondée sur des considérations objectives d’intérêt général et si elle est proportionnée à l’objectif légitimement poursuivi par la législation nationale en cause (§ 25) ; ce que la juridiction de renvoi devra vérifier (§ 26) ;
- eu égard aux règles et à l’esprit du règlement no 2201/2003 du Règlement “Bruxelles II bis”, lequel est fondé, ainsi qu’il ressort de ses considérants 2 et 21, sur le principe de la reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires ainsi que sur le principe de la confiance mutuelle, une incrimination pénale prévoyant que le seul fait pour un parent ou les deux parents d’un enfant de soustraire celui-ci à l’autre parent, au tuteur ou au curateur dans le but de le déplacer vers ou de le retenir dans un autre État membre donne lieu à des sanctions pénales même en l’absence de recours à la violence, à la menace d’un mal sensible ou à la ruse, va au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l’objectif poursuivi, dans un contexte où le fait de déplacer un enfant sur le territoire de l’État membre concerné ne donne lieu à sanction qu’en cas de recours à la violence, à la menace d’un mal sensible ou à la ruse.
Recevabilité de l’action en indemnisation au nom du mineur (Civ. 2e, 25 mai 2022, n° 20-17.101, 550 F-B) – En cas de demande d’indemnisation formée devant le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (le FIVA) au nom d’un mineur, c’est à bon droit qu’une cour d’appel, après avoir exactement retenu que le délai de deux mois prévu pour la saisir de la contestation de l’offre présentée par le FIVA n’avait pas couru à l’égard du père de l’enfant, qui n’en avait pas reçu notification, juge qu’est recevable l’action engagée devant elle par l’administrateur ad hoc représentant l’enfant, désigné par le juge des tutelles, en contestation de cette offre d’indemnisation, peu important que le juge des tutelles ait été saisi plus de deux mois après que cette offre avait été notifiée à la mère de l’enfant.
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Sélection jurisprudentielle de la semaine : autorité parentale/mineurs, divorce, indivision et mariage/DIP
20 mai 2022 - 17:01
Voici ma livraison hebdomadaire de la veille jurisprudentielle. Au menu :
- autorité parentale/mineurs
- divorce
- indivision
- mariage/DIP
- AUTORITÉ PARENTALE/MINEURS
Les tiers comme les titulaires de l’exercice de l’autorité parentale ne peuvent obtenir du directeur d’établissement l’admission en soins psychiatriques contraints d’un mineur (Cass. avis, 18 mai 2022, n° 22-70.003, 15005 +B+R) – La Cour de cassation est d’avis que l’article L. 3211-10 du code de la santé publique s’analyse comme interdisant toute mesure d’hospitalisation d’un mineur décidée sur le fondement de l’article L. 3212-1 du même code par le directeur d’établissement à la demande d’un tiers ou des titulaires de l’exercice de l’autorité parentale. En d’autres termes, l’admission en soins psychiatriques contraints sur décision du directeur d’établissement à la demande d’un tiers ou des titulaires de l’exercice de l’autorité parentale est exclue.
NB – Cet avis sera prochainement commenté dans l’AJ famille par Valéry Montourcy.
- DIVORCE
Procédure collective à l’encontre de l’entrepreneur individuel en instance de divorce : l’attribution à son conjoint de l’ancien logement familial rend les droits qu’il détenait sur celui-ci saisissables… (Com., 18 mai 2022, n° 20-22.768, 298 F-B) – Dès lors que la jouissance de l’ancien logement familial est attribuée au conjoint de l’entrepreneur “failli”, ce logement ne peut plus être qualifié de résidence principale pour l’entrepreneur et n’est plus de droit insaisissable en application de l’article L. 526-1 du code de commerce.
Il résulte de la combinaison des articles L. 526-1 du code de commerce et 255, 3° et 4°, du code civil que, lorsque, au cours de la procédure de divorce de deux époux dont l’un exerce une activité indépendante, le juge aux affaires familiales a ordonné leur résidence séparée et attribué au conjoint de l’entrepreneur la jouissance du logement familial, la résidence principale de l’entrepreneur, à l’égard duquel a été ouverte postérieurement une procédure collective, n’est plus située dans l’immeuble appartenant aux deux époux dans lequel se trouvait le logement du ménage. Les droits qu’il détient sur ce bien ne sont donc plus de droit insaisissables par les créanciers dont les droits naissent à l’occasion de son activité professionnelle. Par conséquent, a violé ces textes la cour d’appel qui, pour déclarer irrecevable la demande du liquidateur tendant à la réalisation de l’immeuble au titre des opérations de liquidation, retient que la décision judiciaire attribuant la jouissance exclusive de la résidence de la famille à l’épouse de l’entrepreneur est sans effet sur les droits de ce dernier sur le bien et sur son insaisissabilité légale.
NB – On voit là tout l’intérêt du nouvel article L. 526-22 du code de commerce, créé par la loi n° 2022-172 du 14 février 2022 en faveur de l’activité professionnelle indépendante et en vigueur depuis le 15 mai 2022, qui fait échapper de plein droit les biens immobiliers personnels de l’entrepreneur au recours des créanciers professionnels, sans pour autant, du reste, modifier l’article L. 526-1 (V. notre éditorial coécrit avec Jérôme Casey, AJ fam. 2022. 169).
Cette décision sera commentée à l’AJ famille par Jérôme Casey.
Prescription des créances entre époux (Civ. 1re, 18 mai 2022, n° 20-20.725, 392 F-B) – Il résulte des articles 815, 1479, alinéa 1er, 1543 et 2224 du code civil que les créances qu’un époux séparé de biens peut faire valoir contre l’autre et dont le règlement ne constitue pas une opération de partage se prescrivent, en matière personnelle ou mobilière et en l’absence de disposition particulière, selon le délai de droit commun édicté par l’article 2224 du code civil. Viole ces textes, l’article 815 du code civil par fausse application et les autres par refus d’application, une cour d’appel qui, pour rejeter la demande de l’époux tendant à la mainlevée de la saisie conservatoire pratiquée par l’épouse en raison de la prescription de la créance alléguée par celle-ci, retient que, dès l’ordonnance de non-conciliation, le régime matrimonial devient une indivision post-matrimoniale et que l’action aux fins de partage est imprescriptible.
Il résulte de la combinaison des articles 2224 (durée de 5 ans de la prescription) et 2236 (suspension de la prescription entre époux) du code civil que le délai de droit commun par lequel se prescrivent, en l’absence de dispositions particulières, les créances entre époux en matière personnelle ou mobilière commence à courir lorsque le divorce a acquis force de chose jugée. Pour rejeter la demande de l’époux, l’arrêt retient que, si une demande relative à une créance entre époux devait être considérée comme une demande connexe, le délai de prescription de cinq ans ne commencerait à courir qu’à compter du projet de partage du 28 juin 2018, qui a fait naître le principe de la créance. En statuant ainsi, alors que le fait générateur de la créance alléguée par l’épouse était le transfert de valeurs depuis son patrimoine vers celui de l’époux et ne pouvait être recherché dans le projet de partage qui en établissait le compte, la cour d’appel a également violé les articles 2224 et 2236 du code civil.
- INDIVISION
Prescription de créances entre concubins indivis (Civ. 1re, 18 mai 2022, n° 20-22.234, 390 FS-B) – Ne donne pas de base légale à sa décision au regard de l’article 2241 du code civil (demande en justice interruptive de prescription) une cour d’appel qui, sans constater que l’assignation contenait une réclamation, ne serait-ce qu’implicite, à ce titre, a, pour ordonner l’homologation du projet de partage établi le 13 octobre 2016, relevé que le concubin a engagé l’action en liquidation et partage de l’indivision par assignation du 29 octobre 2007 et retenu que, la procédure n’ayant pas abouti à ce stade au partage de l’indivision, la prescription n’a pas repris son cours, de sorte qu’il est recevable à invoquer des impenses au titre de prêts.
Dès lors, en application de l’article 624 du code de procédure civile, la cassation de la disposition de l’arrêt ayant ordonné l’homologation du projet de partage établi le 13 octobre 2016 entraîne la cassation des chefs du dispositif renvoyant les parties devant le notaire en charge des opérations de liquidation aux fins d’établissement de l’état liquidatif définitif et ordonnant à celui-ci de procéder aux rectifications nécessaires.
- MARIAGE/DIP
Action en nullité d’un mariage célébré en Tunisie entre deux Tunisiens fondée sur le défaut d’intention matrimoniale de l’autre : la loi française est applicable (Civ. 1re, 18 mai 2022, n° 21-11.106, 391 FS-B) – Aux termes de l’article 202-1 du code civil, les qualités et conditions requises pour pouvoir contracter mariage sont régies, pour chacun des époux, par sa loi personnelle. Quelle que soit la loi personnelle applicable, le mariage requiert le consentement des époux, au sens de l’article 146 et du premier alinéa de l’article 180 du code civil. Quant à l’article 146, il dispose : « Il n’y a pas de mariage lorsqu’il n’y a point de consentement. »
Se trouve légalement justifié l’arrêt d’une cour d’appel qui a fait application de la loi française : elle a relevé que l’épouse, de nationalité tunisienne, se prévalait d’un défaut d’intention matrimoniale de son mari ; il en résulte que l’action était en réalité fondée sur l’article 146 du code civil, de sorte que la loi française était applicable.
NB – Cet arrêt sera prochainement commenté dans l’AJ famille par Fabienne Jault-Seseke.
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