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Détention provisoire et délai raisonnable : condamnation de la France

La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a estimé qu’une détention provisoire de quatre ans, trois mois et deux jours n’est pas raisonnable, dès lors qu’elle n’est pas strictement justifiée au regard des objectifs poursuivis par une telle détention ni étayée par des éléments pertinents et suffisants tirés de la procédure et répondant à l’argumentation du requérant.

par Mélanie Bombledle 15 octobre 2013

La détention provisoire d’une personne mise en examen ne peut être ordonnée que si elle constitue l’unique moyen de conserver les preuves ou les indices matériels nécessaires à la manifestation de la vérité, d’empêcher une pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille, de protéger la personne mise en examen, d’empêcher une concertation frauduleuse entre celle-ci et ses coauteurs ou complices, de garantir son maintien à la disposition de la justice, de mettre fin à l’infraction ou prévenir son renouvellement ou, en matière criminelle, de mettre fin au trouble exceptionnel et persistant à l’ordre public provoqué par la gravité de l’infraction, les circonstances de sa commission ou l’importance du préjudice qu’elle a causé. À cet égard, les magistrats doivent préciser expressément, d’une part, les éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure justifiant le placement et le maintien en détention provisoire et, d’autre part, les raisons pour lesquelles les objectifs précités ne sauraient être atteints par un placement sous contrôle judiciaire ou sous assignation à résidence avec surveillance électronique (C. pr. pén., art. 144).

Par ailleurs, la détention provisoire ne peut excéder une durée raisonnable, au regard de la gravité des faits reprochés à la personne mise en examen et de la complexité des investigations nécessaires à la manifestation de la vérité (C. pr. pén., art. 144-1). En application de ce principe et jusqu’à l’ordonnance de règlement, le code de procédure pénale prévoit qu’en matière criminelle, la personne mise en examen ne peut être maintenue en détention au-delà d’un délai d’un an. Néanmoins, le juge des libertés et de la détention peut prolonger la détention pour une durée de six mois par ordonnance motivée rendue après débat contradictoire, une telle décision pouvant être renouvelée sous les mêmes conditions, à condition toutefois que la durée totale de la détention provisoire ne dépasse pas deux ans lorsque la peine encourue est inférieure à vingt ans de réclusion criminelle et trois ans dans les autres cas, voire quatre ans lorsque la personne est poursuivie pour un crime commis en bande organisée. La durée de la détention provisoire peut encore être prolongée de quatre mois par la chambre de l’instruction à titre exceptionnel, lorsque les investigations du juge d’instruction doivent être poursuivies et que la mise en liberté de la personne mise en examen causerait, pour la sécurité des personnes ou des biens, un risque d’une particulière gravité. Une telle décision peut être renouvelée une fois sous les mêmes conditions (C. pr. pén., art. 145-2). Au moment de l’intervention de l’ordonnance de mise en accusation, si l’accusé est placé en détention provisoire, le mandat de dépôt décerné contre lui conserve sa force exécutoire et l’intéressé reste détenu jusqu’à son jugement devant la cour d’assises. Il doit cependant comparaître devant cette juridiction dans un délai d’un an à compter de la date à laquelle la décision de mise en accusation est devenue définitive, à défaut de quoi il doit être remis en liberté. Toutefois, si l’audience sur le fond ne peut débuter avant l’expiration de ce délai, la chambre de l’instruction peut, à titre exceptionnel, ordonner la prolongation de la détention provisoire pour une nouvelle durée de six mois, une telle prolongation pouvant être renouvelée une fois dans les mêmes formes (art. 181 C.pr. pén).

Si la notion de délai raisonnable en matière de détention provisoire échappe au contrôle de la Cour de cassation, dès lors que celle-ci retient que l’estimation de la durée de la détention provisoire relève de l’appréciation souveraine de la chambre de l’instruction (Crim. 1er oct. 2002, n° 02-84.980, Dalloz jurisprudence ; 3 juin 2003, Bull. crim. n° 111 ; D. 2004. 669 , obs. J. Pradel ; RSC 2003. 887, obs. J.-F....

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