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Vaccin contre l’hépatite B et sclérose en plaques : présomption de causalité et de défectuosité

Dans cet arrêt du 10 juillet 2013, la Cour de cassation se prononce à nouveau sur la responsabilité des fabricants de vaccins contre l’hépatite B à la suite de l’apparition d’une sclérose en plaques chez une personne vaccinée.

par Thibault Douvillele 25 juillet 2013

Une femme reçoit entre 1986 et 1993 des injections renouvelées de vaccin contre l’hépatite B. Elle commence à se plaindre d’épisodes de paresthésie des mains à partir de la fin de l’année 1992. En 1995, elle est victime d’un état de fatigue et de troubles sensitifs. Elle est obligée de cesser de travailler en juillet 1998. Finalement, en décembre 1998, une sclérose en plaques est diagnostiquée. Elle intente une action en responsabilité contre le fabricant des vaccins. La cour d’appel rejette cette demande. Elle estime que le lien entre la vaccination et le déclenchement de la sclérose en plaques est établi mais elle considère dans le même temps que « la seule implication du produit dans la maladie ne suffit pas à établir son défaut ni le lien de causalité entre ce défaut et la sclérose en plaques » et que l’arrêt des campagnes de vaccination systématique contre l’hépatite B « ne peut contribuer à établir le caractère défectueux du produit ». Un pourvoi principal est formé par la victime tandis qu’un pourvoi incident est formé par le laboratoire. La Cour de cassation rejette le pourvoi incident et casse l’arrêt sur le pourvoi principal.

Le pourvoi incident reprochait à la cour d’appel d’avoir considéré comme établi « le lien entre le déclenchement de la sclérose en plaques et la vaccination de [la patiente] ». Tout d’abord, pour l’auteur du pourvoi, aucune preuve scientifique ne vient démontrer le lien de causalité entre le produit et le dommage qui ne pouvait pas être présumé. Ensuite, il estime que le lien de causalité entre le vaccin et la sclérose en plaques ne peut être caractérisé que si un bref délai s’est écoulé entre la vaccination et le déclenchement de la maladie, ce qui n’était pas le cas en l’espèce, que l’on s’attache à la date de la première vaccination en 1986 ou de la dernière en 1992.

Pour rejeter ce pourvoi, la Cour de cassation approuve le raisonnement de la cour d’appel aux termes duquel « l’impossibilité de prouver scientifiquement tant le lien de causalité que l’absence de lien entre la sclérose en plaques et la vaccination contre l’hépatite B, laisse place à une appréciation au cas par cas, par présomptions, de ce lien de causalité ». Autrement dit, la preuve du lien de causalité entre le vaccin et la maladie peut être rapportée par présomption si une preuve scientifique, positive ou négative, ne peut pas être rapportée comme c’est le cas en l’espèce. Ici, les présomptions sont tirés « de l’état antérieur de la victime, de son histoire familiale, de son origine ethnique, du temps écoulé entre les injections et le déclenchement de la maladie et du nombre anormalement important des injections pratiquées ».

Le pourvoi principal reprochait à la cour d’appel d’avoir rejeté les prétentions de la victime. La Cour de cassation casse l’arrêt au visa de l’article 1386-4 du code civil, qui pose le critère de la défectuosité d’un produit. Elle considère, d’une part, que les juges du fond ne pouvaient pas rejeter la demande de la victime en se fondant sur un simple bilan risque/bénéfice de la vaccination contre l’hépatite B et, d’autre part, de ne pas avoir vérifié si, à partir des éléments permettant de présumer l’existence d’un lien de causalité entre la vaccination et le produit, ne pouvait pas être tiré une présomption de défectuosité des doses du vaccin administré.

L’arrêt commenté s’inscrit dans la suite directe d’un précédent arrêt du 26 septembre 2012 qui avait déjà retenu que la cour d’appel ne...

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