En effet, cet appel à la grève est légitime lorsque l’on prend connaissance des dispositions du projet de loi gouvernemental modifiant de manière drastique les conditions de l’asile dans notre pays.
À titre d’exemple, ce projet de loi asile-immigration durcit considérablement les procédures de demande d’asile, raccourcit les délais de recours, renforce le contrôle de manière à réduire le nombre de réfugiés et à augmenter le nombre d’expulsions.
Sous couvert d’écourter les délais de procédures, il s’agira en réalité d’une limitation sans précédent de l’accès au droit et à la justice pour ces justiciables parmi les plus vulnérables. À cet égard, le projet de loi a diminué le temps passé à l’examen individualisé des demandes à six mois (recours compris), et en réduisant de moitié (un mois à deux semaines) le délai de recours en cas de refus.
À l’inverse, le projet de loi double la durée maximale de séjour en rétention administrative, de 45 à 90 jours, voire à 115 jours. Ainsi, les « damnés de la terre » pourront être incarcérés pendant le tiers d’une année dans notre pays après avoir pourtant survécu à des régimes dictatoriaux, ou bien encore à la traversée de zones de guerre, et à celle du désert ou de la Méditerranée ( qui s’est transformée en véritable cimetière marin).
La logique répressive du texte est par conséquent sans ambiguïté : deux fois moins de temps pour les droits, deux fois plus pour la rétention.
Si l’on ajoute à cela le durcissement au niveau européen du Règlement Dublin (Dublin IV interdira à tout débouté une nouvelle demande d’asile dans un autre pays de l’Union européenne), outre l’expulsion de ces migrants « dublinés » sans attendre l’arrêt de transfert tel que prévu par le projet de loi, c’est bien toute notre politique d’accueil des réfugiés et des migrants qui s’en trouve bouleversée au préjudice des droits des plus démunis.
Conformément à nos traditions, les avocats du barreau de Paris doivent exprimer leur solidarité et défendre les plus faibles, ce qui doit nous conduire immanquablement à participer à ce mouvement de grève de la Cour nationale du droit d’asile.
Cet appel à la grève (et espérons-le le succès de celle-ci) doit inciter le gouvernement à modifier significativement le projet de loi afin que celui-ci favorise l’accès au droit et la défense des droits des réfugiés et des migrants conformément aux valeurs et à l’histoire de notre pays.