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Dossier 

Actualité du droit des entreprises en difficulté : quoi de neuf en ce début d’année 2021 ?

En ce début d’année 2021, l’activité reste morose avec la poursuite du soutien de l’État à des entreprises en difficultés, souvent attentistes, dépendantes d’un soutien, qui se poursuit sans que l’on puisse réellement apercevoir la sortie du tunnel et de réelles perspectives de redressement. Tout ceci devrait encourager à la prévention mais aucun mouvement fort n’est constaté de ce côté, ce qui n’est pas très rassurant. Les procédures collectives restent à bas niveau, ce qui fait redouter un fort rebond négatif (v. F. Proux, Le risque d’une déferlante de procédures judiciaires au printemps 2021 se confirme, JGP Media pour Localtis, 24 nov. 2020).

Dans un tel contexte, l’actualité sur la jurisprudence montre le reflet d’une époque révolue, compte tenu du décalage inhérent à la prise de décisions judiciaires. Examinons cependant ces décisions récentes.

par Georges Teboulle 1 mars 2021

Le relevé de forclusion pour une créance d’indemnité postérieure au jugement d’ouverture

A priori, la créance d’indemnité postérieure n’est pas soumise au délai de déclaration de créance antérieure et cette énonciation peut surprendre. Dans cette affaire, à la suite du prononcé d’un redressement judiciaire, un contrat avait été résolu et la débitrice, déboutée de sa demande en paiement, a été condamnée à verser une indemnité de procédure. Le créancier a présenté, plusieurs mois plus tard, une requête afin de déclarer cette créance, ce qui a été accepté par le juge-commissaire. Cette décision a été confirmée par le tribunal. Après une nouvelle confirmation en appel, la débitrice a soutenu que le fait générateur des créances de dépens et de l’article 700 est la décision qui les alloue. En l’espèce, ce jugement avait été rendu après l’ouverture de la procédure.

Son pourvoi a été rejeté car la Cour de cassation a considéré qu’en combinant les articles L. 622-24, alinéa 6, et L. 622-17, 1, du code de commerce, les créances postérieures au jugement d’ouverture qui ne sont pas nées pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d’observation ou en contrepartie d’une prestation fournie au débiteur pendant cette période, peuvent donner lieu à un relevé de forclusion prévu par l’article L. 622-26 du code de commerce.

La créance d’indemnité de procédure était, certes, postérieure à l’ouverture de la procédure collective mais elle ne pouvait être née pour les besoins du déroulement de la procédure. Cette créance devait être déclarée et son titulaire pouvait demander à être relevé de la forclusion encourue (Com. 9 déc. 2020 n° 19-17.579, D. 2021. 4  ; v. Éd. lég. 12 janv. 2021, note M. Dizel).

Les mesures liées à la crise de la covid

Les nouveaux avantages fiscaux en période de la crise de la covid

En novembre et décembre 2020, le dispositif covid a été aménagé et prorogé en 2021 (v. not. G. Teboul, Les récentes mesures covid pour les entreprises en difficulté : quelques réflexions, Dalloz actualité, Le droit en débats, 12 janv. 2021). La loi de finances pour 2021 (n° 2020-1721, 29 déc. 2020, 30 déc.) a créé deux dispositifs fiscaux intéressants. Le premier permet la déductibilité des abandons de créances (CGI, art. 39) et le second le report en arrière des déficits (CGI, art. 220 quinquies).

Ces deux dispositifs ont été étendus aux procédures de conciliation, ce qui s’applique aux abandons de créances consentis et aux créances de carry back constatées à compter du 1er janvier 2021 (art. 19, II ; v. B. Lagarde, Entreprises en difficulté, 2021, Traité économique et fiscal et blog de Michel di Martino sur Linkedin).

L’article 20 concerne les abandons de loyers pour cause de crise sanitaire, sous certains critères (entreprises non en difficulté au 31 décembre 2019, interdiction d’accueil au public, secteurs déterminés, seuils de salariés, etc.).

Rappelons que pour l’entreprise débitrice qui bénéficie de l’abandon, l’avantage diminue le passif et augmente l’actif, de sorte qu’une imposition peut en résulter. Les abandons de créances à caractère commercial sont déductibles lorsqu’ils sont consentis à une entreprise faisant l’objet d’un plan de sauvegarde ou de redressement judiciaire, ce qui est donc étendu à l’accord de conciliation constaté ou homologué (art. L. 611-8).

En ce qui concerne le report en arrière des déficits, l’entreprise qui y procède devient titulaire d’une créance fiscale remboursée au terme de cinq ans. En attendant, l’entreprise peut l’utiliser pour le paiement de l’impôt sur les sociétés. Il s’agit donc ici d’une exception, cette créance pouvant faire l’objet d’un remboursement anticipé, ce qui était déjà possible en sauvegarde, en redressement judiciaire ou en liquidation judiciaire, et l’est également, à présent, en conciliation (L. n° 2020-1721 préc., art. 19, 2e, art. 220 quinquies).

Un fonds de solidarité permettant d’accorder jusqu’à 200 000 € pour décembre 2020 a été créé, en cas de diminution de l’activité de 50 % ou pour les entreprises n’ayant pu accueillir du public. Les conditions sont nombreuses (décr. n° 2020-1620, 19 déc. 2020, JO 20 déc. ; décr. n° 2020-1770, 30 déc. JO 31 déc.).

Le chômage partiel

Rappelons qu’un décret du 24 décembre (décr. n° 2020-1681, JO 26 déc.) a prorogé le taux de l’indemnité d’activité partielle à 70 % selon le secteur d’activité ainsi que d’autres mesures dérogatoires. Il a également prorogé le dispositif d’activité partielle (Ord. n° 2020-1639, 21 déc. 2020, JO 23 déc. avec une prorogation jusqu’au 31 déc. 2021).

Il est possible par accord collectif de placer une partie seulement des salariés relevant d’une même catégorie professionnelle en activité partielle ou de leur appliquer une répartition différente des heures travaillées et des heures chômées lorsque cela est nécessaire pour assurer le maintien ou la reprise d’activité. Nos lecteurs seront renvoyés à ce texte pour le détail de ces mesures de prolongation dont le caractère complexe ne permet pas ici un résumé rapide.

La résiliation judiciaire d’un contrat (C. com., art. L. 641-11-1)

La résiliation d’un contrat en cours à la date du jugement ouvrant la liquidation judiciaire peut être demandée lorsque la prestation du débiteur ne porte pas sur le paiement d’une somme d’argent. Dans ce cas, le juge-commissaire ne peut prononcer la résiliation que si elle est nécessaire aux opérations de liquidation et ne porte pas une atteinte excessive aux intérêts du cocontractant (Com. 7 oct. 2020, n° 19-10.685 P, D. 2020. 2007 ; ibid. 2475, chron. S. Barbot, C. de Cabarrus, S. Kass-Danno et A.-C. Le Bras ).

Pour les loyers, l’article 14 de la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 a prorogé l’état d’urgence sanitaire au 16 février 2021. Il a également prorogé le dispositif sur les loyers impayés du fait d’une fermeture administrative. Ces entreprises ne peuvent subir d’intérêts pénalités ou toute sanction, exécution forcée ou mesures conservatoires pour retard ou défaut de paiement et cela depuis le 17 octobre 2020. Un décret du 30 décembre 2020 n° 2020-1766 détermine les seuils d’effectifs et de chiffre d’affaires pour ce dispositif, soit un effectif de moins de deux cent cinquante salariés et un seuil de chiffre d’affaires de 50 millions d’euros, une perte de chiffre d’affaires d’au moins 50 % (v. Éd. lég., 8 janv. 2021, O. René-Bazin, sur le décr. du 30 déc. 2020).

Par ailleurs, en cas de liquidation judiciaire du bailleur, le liquidateur qui souhaite céder de gré à gré un logement donné à bail doit délivrer au locataire un congé pour vendre en se conformant aux dispositions de l’article 15 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 (même arrêt).

La responsabilité du créancier

Un important arrêt (Com. 23 sept. 2020, n° 18-23.221 P, Dalloz actualité, 30 oct. 2020, obs. C. Bonnet ; D. 2020. 1886 ; RTD com. 2020. 931, obs. D. Legeais ) a estimé que les dispositions de l’article L. 650-1 du code de commerce ne concernent que la responsabilité d’un créancier pour les concours qu’il a consentis. Or, seul l’octroi estimé fautif – et non le retrait des concours – peut donner lieu à l’application de ce texte (G. Teboul, Le retrait d’un concours bancaire, LPA 19 janv. p. 7).

Rappelons que ce texte prévoit une irresponsabilité de principe du prêteur avec des exceptions fort difficiles à démontrer, ce qui protège la responsabilité du prêteur. Ce dispositif protecteur n’est donc pas applicable en cas de retrait du concours, ce qui est évidemment une précision importante (J. Lasserre-Capdeville, Nouvelle précision sur le champ d’application de l’irresponsabilité de l’article L. 650-1 du code de commerce, Gaz. Pal. 12 janv. 2021, p. 57, avec notamment l’examen de l’article L. 313-12 du code monétaire et financier sur le délai de préavis de soixante jours).

Le recours contre une décision fixant une date de cessation des paiements

Un dirigeant ou un ancien dirigeant ou un créancier qui sont informés par la publication d’un jugement de report de la date de cessation des paiements peuvent formuler une tierce opposition à la décision de report s’ils n’y étaient pas parties. Cela est en effet explicable, dès lors que ce report peut avoir une incidence sur leur droit (C. com., livre VI, titre V ; C. com., art. L. 632-1 et L. 632-2). Cette décision est donc un rappel utile (Com. 17 juin 2020, n° 18-25.262, D. 2020. 1357 ; RTD com. 2020. 712, obs. A. Martin-Serf  ; JCP E 2020. 1353, n° 3, obs. Pétel ; APC 2020, n° 187, obs. Lafaurie ; Dr. sociétés 2020, n° 106, note Legros ; RJDA 2020, n° 514).

Par ailleurs, une décision du 9 décembre 2020 (Com. 9 déc. 2020, n° 19-14.437, D. 2021. 5 ) a indiqué qu’une créance fiscale faisant l’objet d’un recours ne peut être incluse dans le passif exigible. Il faut se placer à la date du report, lorsqu’il s’agit de statuer sur une telle demande (Com. 21 févr. 2012, n° 11-11.295).

Signalons, sur la question de la résolution du plan assortie de l’ouverture d’une liquidation judiciaire, la nécessité de caractériser un état de cessation des paiements (B. Ferrari, La résolution d’un plan assortie de l’ouverture d’une liquidation judiciaire suppose la caractérisation de la cessation des paiements, Gaz. Pal. 12 janv. 2021, p. 74). Dans cette affaire, la Cour de cassation a affirmé à nouveau la nécessité d’analyser les critères légaux de la cessation des paiements au jour où elle statue. Il faut en effet constater que pour le prononcé de la résolution, seule la preuve de l’état de cessation des paiements importe, indépendamment des éventuelles inexécutions du plan. En l’espèce, le tribunal s’était fondé sur la présence de deux dividendes du plan impayés et la présence d’une dette nouvelle apparue durant l’exécution du plan pour caractériser l’état de cessation des paiements. Or cette démarche est insuffisante. Le commentateur a justement indiqué que cette solution paraît logique et s’inscrit dans la lignée de la jurisprudence de la Cour de cassation.

L’organisation du vote des comités

Cette question est intéressante en cette période de transposition de la directive « restructuration et insolvabilité » qui vise à créer des classes de créanciers à la place des actuels comités de créanciers. Il s’agira en effet de se fonder sur la nature de la créance et pas seulement sur la catégorie des créanciers (notamment les créanciers financiers, cette dénomination du comité n’ayant aucune incidence sur la nature de la créance, par exemple privilégiée ou non).

Dans une affaire récente (Paris, ch. 5-9, 22 oct. 2020, n° 20-06.785, Gaz. Pal. 12 janv. 2021, p. 77, note G.C. Giorgini), la cour d’appel de Paris avait indiqué que l’administrateur, qui est seul compétent pour décider des modalités de déroulement du vote par les comités des créanciers, peut valablement prévoir que seules les voix des créanciers seront comptabilisées.

Sous peine d’irrecevabilité, le créancier absent doit former sa contestation dans un délai de dix jours à compter du vote du comité de créanciers auquel il appartient et non à compter de la date de transmission du compte rendu de la consultation. Le créancier prétendait avoir été placé dans l’impossibilité d’agir mais il ne s’agissait évidemment pas d’un cas de force majeure et il ne pouvait ignorer la réunion du comité à laquelle il n’avait pas assisté.

Précisons au passage qu’il est bienvenu que l’administrateur dispose d’un large pouvoir d’organisation du déroulement du vote.

Les effets de la clôture de la liquidation judiciaire à l’égard de la caution

Dans cette affaire, la confusion des patrimoines était intervenue. Après la clôture de la liquidation judiciaire, le débiteur peut faire exécuter une décision obtenue durant la procédure par le liquidateur. Dès lors que la confusion des patrimoines cesse au jour de la clôture, ses effets ne peuvent plus être opposés par la caution au débiteur (Com. 21 oct. 2020, n° 19-15.545, Rev. prat. rec. 2021. 25, chron. P. Roussel Galle et F. Reille ; Gaz. Pal. 12 janv. 2021, p. 79, note B. Ferrari).

En l’espèce, le passif avait été éteint au moment de la clôture de la liquidation judiciaire. L’un des associés caution avait été condamné à payer au liquidateur du bailleur plusieurs sommes. Les condamnations n’avaient pas été exécutées. Pour pallier cette carence, le bailleur a fait pratiquer une saisie-attribution sur les comptes de l’associé caution. Le débiteur a demandé au juge de l’exécution l’annulation et la mainlevée de la saisie et ses demandes ont été rejetées.

L’associé caution avait contesté la régularité de la mesure d’exécution pratiquée postérieurement à la clôture de la liquidation judiciaire. La Cour de cassation a cependant considéré que le bailleur pouvait faire exécuter après la clôture de la procédure, un titre obtenu par son liquidateur durant la procédure collective.

Selon le demandeur, la vente de l’immeuble du bailleur avait permis de payer son passif, en raison de l’extension de la procédure sur le fondement de la confusion des patrimoines. Le bailleur ne pouvait donc ensuite exercer un recours contre la caution en raison de l’extinction de la dette.

Or la Cour de cassation a considéré que la confusion des patrimoines résultant de l’extension de la procédure a pris fin à la clôture pour extinction du passif. Ainsi, les contestations tirées des effets de cette confusion ne pouvaient plus être soulevées.

La revendication du prix à l’encontre du sous-acquéreur

Dans cette affaire, il a été jugé que la décision statuant sur la revendication ne prive pas l’affactureur créancier, en vertu de son contrat, de demander à ce que soit tranché le conflit qui l’oppose au vendeur bénéficiaire d’une clause de réserve de propriété sur le même débiteur (Com. 9 déc. 2020, n° 19-16.542, D. 2021. 4 ; Rev. sociétés 2021. 208, obs. F. Reille ).

En l’espèce, la Cour de cassation a visé les articles 2372 du code civil et L. 624-18 du code de commerce. Le code civil dispose que le droit de propriété du bien retenu à titre de garantie par l’effet de la clause de réserve de propriété se reporte sur la créance du débiteur à l’égard du sous-acquéreur. Or l’article L. 624-18 du code de commerce prévoit que la revendication du prix ou de la partie du prix des biens vendus avec réserve de propriété, qui n’a pas été payé ni réglé en valeur ni compensé, tend à rendre opposable à la procédure le report du droit de propriété du vendeur initial du prix de revente.

La conséquence est que l’autorité de la chose jugée attachée à la décision statuant sur la revendication ne prive pas l’affactureur de demander à son profit le paiement de la créance. Or les juges du fond avaient rejeté la demande en paiement de l’affactureur. Un arrêt de cassation a été rendu.

Signalons aussi sur le même sujet l’action en responsabilité engagée contre un liquidateur judiciaire qui avait fait procéder à une réalisation d’actif faisant l’objet d’une clause de réserve de propriété dont il connaissait l’existence, et cela sans accord du vendeur à qui il aurait dû payer le solde du prix restant dû sur le matériel. Dans cette hypothèse, la responsabilité du liquidateur judiciaire a été retenue (Com. 21 oct. 2020, n° 19-15.685).

La transaction conclue par un liquidateur

Une décision (Com. 9 déc. 2020, n° 19-17.258, D. 2021. 5 ) est intervenue dans une instance où, à la suite de l’extension d’une liquidation judiciaire, le liquidateur avait assigné le dirigeant en comblement de l’insuffisance d’actif et pour une mesure de faillite personnelle.

Le juge-commissaire avait autorisé le liquidateur à transiger (C. com., art. L. 642-24). La société visée avait payé une indemnité et avait abandonné des créances en contrepartie de la renonciation à cette action. La transaction avait été homologuée, mais le ministère public avait interjeté appel. En appel, la demande d’homologation de la transaction a été rejetée avec l’indication que le liquidateur peut compromettre et transiger sur les contestations qui intéressent collectivement les créanciers.

Il était reproché au liquidateur de n’avoir pas disposé du pouvoir de transiger pour ce qui dépassait l’intérêt collectif des créanciers et touchait à l’intérêt général. La Cour de cassation a rejeté le pourvoi en précisant que, pour transiger, il faut avoir la capacité de disposer des objets compris dans la transaction. Or les mesures d’interdiction et de faillite personnelle tendent à la protection de l’intérêt général et si la transaction pouvait valablement mettre fin à l’instance en comblement de l’insuffisance d’actif, elle ne pouvait concerner ces sanctions personnelles.

Précisons que la pratique actuelle consiste à faire engager des demandes de sanction personnelle par le ministère public et les sanctions pécuniaires par les mandataires liquidateurs, ce qui clarifie le sujet.

La proposition de transposition de la directive

La Chancellerie a récemment mis en ligne le texte d’une proposition de transposition de la directive sur l’insolvabilité (G. Teboul, Les projets de réformes dans le cadre de la transposition de la directive « restructuration et insolvabilité », Dalloz actualité, Le droit en débats, 29 janv. 2021). Il s’agit, rappelons-le, de la directive européenne (UE) n° 2019/1023 du 20 janvier 2019 relative aux cadres de restructuration préventifs et aux procédures d’insolvabilité tentant d’adapter des règles uniformes dans plusieurs domaines.

Il s’agit des mécanismes d’alerte mis à la disposition des entreprises, des procédures de prévention, des règles d’élaboration des plans avec une organisation des créanciers en classes afin de voter sur les propositions de plans, des règles d’opposabilité des votes, une remise des dettes impayées pour les personnes physiques insolvables, des règles sur la responsabilité des dirigeants sociaux et des principes sur la qualification des professionnels, notamment.

À l’occasion de la crise de la covid-19, certains ont souhaité que soit renforcée cette approche commune (J.-L. Vallens, L’adaptation du droit des entreprises en difficulté à l’épidémie du covid-19 : l’Europe en ordre dispersé, BJE juin 2020, p. 93).

Signalons à cet égard les travaux du groupe constitué sous la direction du professeur Philippe Roussel-Galle en vue d’élaborer un avant-projet de code de l’insolvabilité. Cet avant-projet a été remis au président de l’association Henri-Capitant (J.-L. Vallens, Vers un code européen de l’insolvabilité, Éditions législatives, 18 déc. 2020).

Est-il vraiment certain qu’une réelle convergence est constatée entre les différents systèmes juridiques pour le traitement judiciaire et la prévention des difficultés ? C’est le cas lorsqu’il s’agit de renforcer la prévention et notamment de mettre en place des mécanismes de traitement des créances en fonction de leur nature. L’Allemagne a adopté le 17 décembre 2020 une loi de transposition de la directive dans le délai prescrit expirant en mai 2021 (dir. 2019/1023, art. 34).

Le projet du code de l’insolvabilité repose sur plusieurs règles avec une compétence basée sur le critère du centre des intérêts principaux du débiteur, un contrôle judiciaire, une qualification des professionnels de l’insolvabilité, une représentation de l’intérêt collectif des créanciers et un contrôle différencié des procédures selon leur type.

Quatre procédures seraient mises en place : l’une concerne la prévention amiable contractuelle, affectant peu la procédure de conciliation du droit français ; la deuxième est une procédure de restructuration judiciaire favorisant le redressement d’une entreprise non insolvable comme la sauvegarde ; la troisième est une procédure de redressement judiciaire comme en droit français à la demande du débiteur ou des créanciers et appliquant des mécanismes de classes de créanciers ; enfin, est prévue une procédure de liquidation pour laquelle des règles de réalisation des actifs et de cession des entreprises combineraient des règles françaises et allemandes sur l’insolvabilité et un classement des classes.

En outre, l’avant-projet du code européen de l’insolvabilité propose la mise à l’écart des créances salariales, des règles de déclarations de créances tenant compte du règlement européen du 20 mai 2015 (n° 2015/848), une revendication des marchandises impayées, des règles sur la contestation des actes et des paiements réalisés pendant la période suspecte…

Bien entendu, il n’est pas possible de faire ici un exposé exhaustif et nous renverrons pour l’essentiel à l’excellent article de Jean-Luc Vallens.

Pour autant, cette harmonisation, si elle est réelle, rencontrera sans doute des limites culturelles. À cet égard, le droit anglo-saxon n’apprécie pas de la même manière le rôle et la place des créanciers, le droit français ayant plutôt tendance à privilégier le redressement de l’entreprise viable.

Par ailleurs, le rôle du tribunal est différent avec une volonté française de donner davantage de pouvoir au juge, ce qui paraît être une bonne chose. Le débat va être poursuivi mais, d’ores et déjà, le texte mis en ligne par la Chancellerie paraît aller dans le bon sens, favorisant une souplesse et une adaptation à la taille des entreprises. Il faut en effet éviter une complexité trop grande pour des PME, ce qui pourrait retarder et entraver les solutions nécessaires (sur ce texte, v. ministère de la Justice, Restructuration et insolvabilité des entreprises, 4 janv. 2021).