En France, la justice restaurative est entrée dans le code de procédure pénale par la loi du 15 août 2014 relative à l’individualisation des peines et renforçant l’efficacité des sanctions pénales. Elle avait été instituée via la directive de l’Union européenne 2012/29 du 25 octobre 2012. Selon l’article 10-1 du code de procédure pénale, « à l’occasion de toute procédure pénale et à tous les stades de la procédure, y compris lors de l’exécution de la peine, la victime et l’auteur d’une infraction, sous réserve que les faits aient été reconnus, peuvent se voir proposer une mesure de justice restaurative ». De quoi parle-t-on ? De « toute mesure permettant à une victime ainsi qu’à l’auteur d’une infraction de participer activement à la résolution des difficultés résultant de l’infraction, et notamment à la réparation des préjudices de toute nature résultant de sa commission ».
Plusieurs principes prévalent à l’instauration de ces mesures : la reconnaissance des faits, l’information complète des participants et leur consentement express, la présence d’un tiers indépendant formé à cet effet, le contrôle de l’autorité judiciaire ou de l’administration pénitentiaire, la confidentialité des échanges sauf accord contraire des parties et excepté les cas qui nécessitent l’information du procureur de la République. Dans le principe, les magistrats n’ont pas à être informés du contenu des échanges mais ils peuvent être informés de toute la procédure.
L’institut français pour la justice restaurative (IFJR), créé en 2013, porte la réflexion à l’échelle nationale et guide les associations partenaires qui développent les dispositifs à l’échelle locale. Sur le territoire, une unité de recherche promeut les pratiques de justice restaurative, l’ARCA. En 2013, lors de la conférence du consensus sur la prévention de la récidive, le professeur Robert Cario, spécialiste en criminologie était entendu sur la question avec Benjamin Sayous, actuel directeur de l’IFJR et auteur de la thèse sur Comment intégrer la justice restaurative au système de droit pénal français. Forts d’une expérimentation positive menée en 2010 à la maison centrale de Poissy en partenariat avec France Victime, ils ont pu défendre ces dispositifs qui n’ont pas tardé à être intégrés en droit français. Ils prennent aujourd’hui plusieurs formes : des rencontres détenus/victimes ou condamnés/victimes en milieu fermé ou en milieu ouvert à hauteur de trois à six personnes par groupe ; des médiations restauratives où l’auteur et la victime d’une même infraction dialoguent en direct ou indirectement (échange de courriers, par exemple) ; des cercles de soutien de responsabilité où des bénévoles s’engagent à superviser un professionnel qui suivra un temps déterminé l’auteur d’une infraction après sa sortie (ici l’échange avec une victime n’est pas envisagé).
« Nous avons enregistré avec France Victime cinquante-six programmes sur une trentaine de cours d’appel, assure Benjamin Sayous de l’IFJR. Une vingtaine de mesures ont déjà eu lieu sous la forme de rencontres de groupe ou de médiations ». Il précise qu’en 2017, 39 formations ont eu lieu en France, soit « 1 300 professionnels formés ». Selon le directeur de l’IFJR, la mise en place de la justice restaurative procède du « constat des limites d’une réponse purement rétributive de la justice. Punir n’est pas la seule solution. Il y avait la nécessité d’une approche complémentaire, qui réponde à des besoins particuliers et redonne du sens à l’action des acteurs de la justice ». Celui-ci tient à préciser qu’il ne s’agit pas d’une « remise en question de l’institution judiciaire » mais bien d’une « approche complémentaire ». « Cela s’inscrit également dans une complémentarité des soins », explique Benjamin Sayous. Par exemple, c’est la possibilité pour l’auteur d’une infraction de « se rendre compte de l’utilité de son obligation de soins » et pour les professionnels, « cela redonne du sens à leur mission en leur permettant de faire plus facilement leur métier ».
Commentaires
Un article tout à fait clair et passionnant qui renvoie à des systèmes développés dans tous les pays victimes de guerre civile. Cette réflexion qui Fais écho à la notion de justice réparative, a également permis aux autorités religieuses d’établir Aux États-Unis une charte. L’objectif est non seulement de réparer, de restaurer, mais également de prévenir donc d’empêcher les souffrances par une prise de conscience en amont des éventuels auteurs d’infractions pénales. Il y a certainement une réflexion intéressante à engager par les autorités religieuses en France sur ses process, qui placent les victimes au cœur de ce travail de réparation. merci pour la clarté de ce propos.
N. Prod’homme Soltner
Bonjour
J'anime une émission sur Djiido Radio en KANAKY.
La Coutume Kanak aborde la justice d'une manière holistique et dans le processus de décolonisation... comment le système français intègre les valeurs Kanaks dans le système actuel.
La justice restaurative est un pallier vers cette prise en compte...