Le 30 janvier 2020, l’Organisation mondiale de la santé a déclaré que l’émergence d’un nouveau coronavirus (covid-19) constituait une urgence de santé publique de portée internationale. Le covid-19 étant un agent biologique pathogène de groupe II, particulièrement contagieux, différentes mesures ont été prises par le gouvernement aux fins de freiner sa propagation. La situation sanitaire se dégradant rapidement, le confinement de la population a été décidé, à compter du 17 mars. Quelques jours plus tard, la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 déclarait l’état d’urgence sanitaire, entraînant l’application de dispositions spéciales codifiées au code de la santé publique (CSP, art. L. 3131-12 s.). Par un décret n° 2020-293 du même jour, plusieurs fois modifié depuis, le gouvernement a décidé de mesures exceptionnelles pour limiter la propagation du virus.
A – Les mesures d’exception touchant à la vie économique
À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles ! En entrant en guerre contre le covid-19, pour reprendre les mots du président de la République dans son allocution télévisée du 16 mars, la France a fait le choix d’instaurer des mesures d’exception dont l’irrespect est pénalement sanctionné.
En premier lieu, en vue de limiter la transmission du virus, on relève des mesures de confinement, avec l’interdiction de tout déplacement de personne hors de son domicile à l’exception de quelques déplacements strictement indispensables, limitativement énumérés dont les trajets domicile/travail ne pouvant être différés, les achats de fournitures professionnelles et de première nécessité, la présentation devant un service de police ou de gendarmerie, la convocation devant une juridiction.
En parallèle, la fermeture provisoire de nombreux établissements recevant du public a été décidée dont les restaurants, salles de spectacles, musées, établissements d’enseignements, magasins de vente et centre commerciaux, sauf dérogations comme les commerces alimentaires, pharmacies, etc. (v. liste en annexe du décret). Toujours en vue de limiter cette transmission, les rassemblements, réunions ou activités mettant en présence plus de cent personnes en milieu clos ou ouvert, ont été interdits (en deçà, possibilité est laissée aux préfets de les interdire).
En matière de transport, des dispositions ont été prises, qu’il s’agisse du transport maritime (limitation du nombre de passagers sur les navires de commerce, nettoyage journalier des espaces accueillant des passagers), aérien (interdiction de certaines liaisons), terrestre de voyageurs (nettoyage journalier des véhicules, affichage des mesures barrières, distance entre le conducteur et les passagers, etc.). Pour le transport de marchandises, les lieux de chargement / déchargement doivent, par exemple, être équipés d’un point d’eau ou de gel hydroalcoolique tandis que les véhicules devront avoir une réserve d’eau et de savon, des serviettes à usage unique ou du gel hydroalcoolique.
En second lieu, le gouvernement est intervenu de manière plus directive, d’abord afin de réquisitionner, jusqu’au 31 mai 2020, les stocks de certaines catégories de masques de protection respiratoire détenus par toute personne morale de droit public ou de droit privé ainsi que les stocks de masques anti-projections détenus par les entreprises qui en assurent la fabrication ou la distribution. Au-delà, au plan local, les préfets peuvent notamment réquisitionner les établissements de santé, laboratoires, opérateur funéraire et tout bien, service ou personnel nécessaire à leur fonctionnement.
Ensuite, la mise à disposition de médicaments a été encadrée, notamment quant aux préparations à base d’hydroxychloroquine qui ne peuvent être dispensées par les pharmacies que dans le cadre d’une prescription émanant de certains spécialistes. Mieux, l’exportation est interdite, afin de garantir l’approvisionnement des patients sur le territoire.
Enfin, un contrôle des prix a été instauré sur certains produits comme les gels hydroalcooliques dont le prix de vente est plafonné (par exemple, au détail, un flacon d’un litre ne devra pas dépasser les 15 €).
B – Les sanctions pénales encourues
En temps normal, le non-respect des décrets et arrêtés de police est puni d’une simple amende de 38 €. Mais, depuis la déclaration de l’état d’urgence sanitaire, les choses ont changé, avec une aggravation des sanctions.
D’abord, est lourdement sanctionné le non-respect des réquisitions visant les biens et services (comme les masques) ou le personnel soignant, lequel est puni de six mois d’emprisonnement et de 10 000 € d’amende. En dehors de ces réquisitions, la violation des autres interdictions ou obligations est graduée, avec une peine d’amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe, soit 750 € ou à une amende forfaitaire de 135 €, portée à 375 € en cas de majoration. En substance, cette contravention de 750 € correspond au montant maximum encouru en cas de contestation et de comparution devant un juge. L’amende forfaitaire, quant à elle, est une procédure « accélérée » permettant d’éteindre rapidement l’action publique : son montant varie en fonction de la célérité du contrevenant à s’acquitter de l’amende.
Pour les personnes étourdies, si cette violation est constatée à nouveau dans un délai de quinze jours, l’amende est celle prévue pour les contraventions de la cinquième classe, soit 1 500 €, avec application possible de la procédure de l’amende forfaitaire, c’est-à-dire 200 € pouvant être majorée à 450 €.
Pour les « récidivistes endurcis », fini les contraventions et place au délit : si ces violations sont « verbalisées » à plus de trois reprises dans un délai de trente jours, les faits sont punis de six mois d’emprisonnement et de 3 750 € d’amende. Signalons que plusieurs questions prioritaires de constitutionnalité ont été déposées devant les juridictions correctionnelles contre ce nouveau délit, au regard de son incompatibilité présumée avec le principe constitutionnel de présomption d’innocence (le prévenu pourrait être condamné pour ce délit, au regard de contraventions pouvant encore être contestées).
À noter que pour les personnes morales, le montant de ces amendes est quintuplé.