Alors un tri doit-il être effectué selon l’âge et le poids du patient pour être admis en réanimation ?
Débattre du « tri des malades » choque l’opinion publique de prime abord. Le phénomène n’est pas nouveau pour les médecins, mais il est médiatisé, depuis mars 2020, et probablement majoré avec la crise sanitaire actuelle. Cela ne choque pas les médecins habitués à évaluer la balance bénéfices/risques avant toute décision médicale.
Déjà en temps « ordinaire », c’est-à-dire hors crise sanitaire, chaque médecin fait des choix thérapeutiques, ce qui revient à effectuer un tri. Le terme « tri » peut avoir un aspect choquant. Il conviendrait plutôt d’employer le terme de « choix ». On vise à un choix raisonné et raisonnable du médecin, que ce soit pour les actes de prévention, de diagnostic ou de soins.
C’est bien ce qui est fait en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) pour déterminer la meilleure prise en charge des patients atteints de cancer3. Le médecin fait le choix du traitement qu’il pense le mieux adapté à son patient. C’est ce que font les réanimateurs qui décident d’intuber, de réanimer, d’hospitaliser ou non en réanimation…
Il y a également un choix opéré lorsque le chirurgien retient ou non une indication opératoire selon la pathologie, la gravité du cas, mais aussi l’âge de la personne, les comorbidités… et surtout ses chances de récupération. Le tabagisme est un facteur de risque majeur de la survenue d’infections ou de complications postopératoires, de même que l’obésité. Il est fréquemment exigé du patient demandeur d’une chirurgie programmée d’arrêter de fumer ou de maigrir avant d’être opéré. Ce conditionnement de l’indication opératoire à un effort du patient constitue également un tri des meilleurs candidats à la chirurgie.
L’âge, le poids du patient et d’éventuelles addictions sont importants. En revanche, le niveau socioéconomique du patient ou son utilité sociale ne seront pas déterminants4. Cependant, une intervention lourde et nécessitant un suivi complexe fera s’interroger le médecin selon les capacités matérielles, financières et intellectuelles de suivre un programme pré et/ou postopératoire. Il serait illusoire de proposer un programme thérapeutique comportant de nombreuses contraintes (un régime bien particulier, l’arrêt de toutes ses addictions, un suivi en balnéothérapie, des cures thermales, etc.) à un patient alcoolique, SDF, détenu, en situation de grande précarité ou sans papier, qui, selon les cas, ne pourra pas s’y contraindre. Adapter le traitement aux possibilités matérielles, financières, sociales dont dispose son patient fait partie de la prise en charge personnalisée.
Ainsi, des choix sont faits tous les jours par les médecins, chacun à son niveau, et cela bien avant la crise sanitaire actuelle liée au coronavirus. Le généraliste à l’EHPAD peut décider d’adresser son patient aux urgences ou non. S’il fait appel au SAMU (service d’aide médicale urgente) pour le transport, un choix est effectué par le médecin régulateur qui peut décider d’envoyer une ambulance, les pompiers, le véhicule médicalisé de SMUR (service mobile d’urgence et de réanimation) ou simplement donner des conseils à l’appelant. Il en est de même au domicile mais en sachant que le patient (ou son entourage) peut décider de se présenter aux urgences par ses propres moyens. L’urgentiste a le choix d’hospitaliser ou non son patient. Une fois hospitalisé dans un service de médecine, le médecin devra, en cas d’aggravation, décider de solliciter ou non une place en réanimation… Plusieurs médecins vont intervenir et prendre chacun des décisions avec une gradation possible dans la prise en charge. Chacun ne pourra procéder à une procédure collégiale formelle, mais les échanges, au moins téléphoniques, entre professionnels doivent être l’occasion d’une concertation et non une simple demande de place.
C’est au médecin de choisir la prise en charge la plus adaptée, en concertation avec son patient tant qu’il peut s’exprimer. C’est en combinant trois critères que le médecin pourra prendre une décision5 :
1. Recueil de la volonté du patient
Le recueil de la volonté du patient est essentiel tant qu’il lui est encore possible de l’exprimer.
La personne démente peut avoir des intervalles de lucidité où il est possible de la questionner sur ses volontés. « Toute personne prend, avec le professionnel de santé et compte tenu des informations et des préconisations qu’il lui fournit, les décisions concernant sa santé »6.
Si la personne ne peut plus exprimer, il convient de pouvoir respecter les volontés et les valeurs du patient, exprimées indirectement par ses directives anticipées, ou rapportées par sa personne de confiance ou ses proches.
Le médecin recherchera si le patient a rédigé ses directives anticipées7 et interrogera à ce sujet la personne de confiance ou la famille ou des proches. Dans la pratique, cela est difficile puisque le coronavirus étant très contagieux, d’une part, les proches peuvent être eux-mêmes contaminés et être confinés. Par ailleurs, même s’ils ne sont pas déjà contaminés, il leur sera le plus souvent interdit de voir leur proche. C’est une dimension inédite de la crise sanitaire actuelle. Les établissements de santé interdisent toutes les visites sauf autorisations extrêmement limitées « sur décision médicale ». C’est terrible pour l’entourage du patient mais aussi pour les soignants. Le fait de voir se dégrader un patient sans qu’il puisse communiquer avec sa famille et qu’il meure sans avoir pu embrasser ses proches une dernière fois est vécu très douloureusement. S’y ajouteront des contraintes avec l’interdiction des soins de conservation8, l’interdiction de la toilette mortuaire, une mise en bière immédiate9 et d’organisation des funérailles avec une vingtaine de personnes au maximum10.
D’ailleurs, l’interdiction de visite dans les établissements de santé s’applique à tous patients, qu’ils soient infectés par le coronavirus ou non, y compris après un accouchement, de même que l’interdiction des soins de conservation, quelle que soit la cause du décès, jusqu’au 30 avril 2020, à ce jour11.
2. La gravité de la pathologie
Il s’agit là d’une évaluation médicale en sachant qu’avec le covid, les soignants font face à un virus inconnu il y a encore quelques mois. Bien que les publications scientifiques soient quotidiennes sur ce sujet, et largement commentées dans les médias grand public, ce qui est inédit, on reste encore ignorant, faute de recul suffisant, notamment sur le devenir des patients « guéris ». Quel sera le devenir des patients sortis de réanimation ?
3. L’état antérieur qui comprend l’âge du patient
Pour évaluer l’état de santé et l’autonomie préalable, il est proposé d’utiliser différents outils, par exemple un score de fragilité clinique ou l’indice de performance OMS ou l’échelle d’autonomie de Katz12. Il sera utile d’étudier les comorbidités, donc les antécédents, de la personne, son état cognitif (en particulier en cas de démence), son état nutritionnel. En pratique, en dehors de l’entourage, c’est le médecin traitant du patient qui est le plus à même de donner des informations à ce sujet, aux professionnels des établissements de santé.
Commentaires
Mon mari n'a reçu QUE du Doliprane pendant 10 jrs..Selon les directives nationales m'a rétorqué notre médecin référent...4 jours après avoir été confirmé covid 19,et une fois que ses deux poumons étaient touchés :il était hospitalisé! ..pour mourir 20 jours plus tard après Deux réveils et TROIS endormissements pour assistance respiratoire.....
On ne m'a jamais demandé mon avis !...On ne lui a jamais demandé son avis!...On lui a simplement dit "qu'on l'endormait pour mieux le soigner"...sans lui décrire les conséquences graves de cet acte...Je ne suis pas sûre que s'il avait su ce qui l'attendait, il aurait peut être choisi de souffrir un peu plus plutôt que d'opter pour plus de confort..
En fait pendant ces 20 jours hallucinants, nous n'étions que des pions entre leurs mains..Ils ont fait ce qu'ils ont voulu, avec des "incidents" au moment des W.E, ou le soir au changement de service des personnels..
Vous comprendrez donc qu'entre les textes et la réalité,il y a un fossé et que lorsque nous sommes une personne lambda,on est Rien !
Mon mari atteint du covid 19 à été mis en soins palliatifs au bout de 4 jours d hospitalisation à l hopital Begin .
J ai eu aussi le covid 19 et je suis guérie. ...
Je l ai eu au téléphone la veille il parlait très bien avait pris sa douche s étatit rasé prêt à rentrer ...
On ne m a pas demandé mon avis en tant que personne de confiance pour les soins palliatifs
Que s est il passé ds la nuit du 30 mars au 1er avril ?
Il avait le tort d avoir 84 ans
Une épouse desesperee