« C’est une réforme compliquée, d’origine parlementaire, qui n’a pas été demandée par la juridiction administrative, mais qu’elle a accompagnée », reconnaît sans détour Christophe Hervouet. Mais le président de la Commission du contentieux du stationnement payant (CCSP), qui était jusqu’alors vice-président du tribunal administratif de Nantes, est prêt à relever ce nouveau défi. La création d’une juridiction spécialisée, ce n’est pas si fréquent et la CCSP cumule les difficultés : un contentieux de masse à gérer, des règles de procédure spécifiques qui nécessitent un traitement souple et rapide. S’il n’est pas possible de traiter avec le même détail de précautions la légalité d’un avis de paiement à 25 ou 30 € et un marché public, il a pourtant été décidé que le suivi de cette procédure serait l’œuvre d’une juridiction administrative, avec des principes dont la mise en œuvre chronophage offre aux parties les garanties d’un procès équitable.
La réforme, adoptée dans le cadre de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, repose sur la décentralisation et la dépénalisation du stationnement payant qui devient une question domaniale. Le maire demeure compétent pour déterminer les jours, les heures et les lieux où l’arrêt et le stationnement des véhicules font l’objet d’une redevance. Les communes disposent de l’entière responsabilité de percevoir les recettes de cette redevance, acquittée immédiatement par l’automobiliste ou forfaitairement après le stationnement, dans les trois mois suivant la date de notification de l’avis de paiement. Dans ce second cas, l’usager s’acquitte d’un forfait de post-stationnement (FPS) dont le montant variera d’une commune à l’autre. L’ancien dispositif donnait lieu, dans à peu près 800 communes, à 10 ou 12 millions d’amendes selon les années. Environ 450 communes ont contracté avec l’Agence nationale de traitement automatisé des infractions (ANTAI) pour le traitement des avis de paiement. Les plus grandes villes sont concernées, sauf Strasbourg qui est entrée dans le dispositif mais qui a choisi de ne pas faire traiter ses avis de paiement par l’ANTAI. Désormais, lorsque l’automobiliste récalcitrant n’a payé ni la redevance de stationnement ni le FPS dans les trois mois, l’ANTAI devient l’ordonnateur du paiement. Le dispositif devient alors contraignant puisque le comptable public peut mettre en œuvre des procédures plus lourdes, telle une opposition à tiers détenteur du montant du FPS majoré en raison du défaut de paiement.
Certaines communes ont fait le choix de ne pas appliquer la réforme, jugée trop compliquée, et ont arrêté le stationnement payant (Tourcoing, par exemple, qui a mis en place des zones bleues). Le coût peut être à l’origine d’un tel choix, estime Christophe Hervouet. Il faut changer les appareils… « Certaines collectivités, qui ont dû se rendre compte que le stationnement payant ne leur rapportait rien ou très peu ou qu’elles n’avaient pas un problème majeur de fluidité du trafic, ont choisi de ne pas engager de frais pour maintenir un système de stationnement payant qui n’était pas d’une efficacité extraordinaire. »