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Kafala : le refus d’adoption ne porte pas atteinte au respect de la vie familiale

Le refus d’adoption d’un enfant recueilli au titre de la kafala n’est pas contraire à l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) garantissant le droit au respect de la vie privée et familiale.

par Medhi Kebirle 17 octobre 2012

Par cet arrêt, la CEDH se prononce pour la première fois sur la conformité du refus de prononcer l’adoption d’un enfant étranger recueilli par kafala à l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme garantissant le droit au respect de la vie familiale. Utilisée par certains pays de droit musulman dans lesquels l’adoption est interdite, la kafala, appelée également « recueil légal », permet de prendre en charge bénévolement un enfant dépourvu d’attaches familiales. Si les juridictions françaises autorisaient autrefois, sous certaines conditions, la transformation de ce mécanisme en adoption (Civ. 1re, 10 mai 1995, Bull. civ. I, n° 198 ; D. 1995. 544, note V. Larribau-Terneyre ), l’article 370-3 du code civil prévoit aujourd’hui que « l’adoption d’un mineur étranger ne peut être prononcée si sa loi personnelle prohibe cette institution, sauf si ce mineur est né et réside habituellement en France ».

Après avoir vu sa demande rejetée par les juges du fond, la requérante s’était pourvue en cassation sans rencontrer plus de succès. Devant la haute juridiction, elle prétendait, à la lumière des articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l’homme, qu’il était dans l’intérêt supérieur de l’enfant que sa filiation soit établie à son égard. Par un arrêt du 25 février 2009 (Civ. 1re, 25 févr. 2009, Bull. civ. I, n° 41 ; D. 2009. 730, obs. V. Egéa ; ibid. 1918, obs. A. Gouttenoire et P. Bonfils ; V. dans le même sens, Civ. 1re, 15 déc. 2010, Bull. civ. I, n° 265 ; D. 2011. 160 ; AJ fam. 2011. 101, obs. B. Haftel ), la Cour de cassation a réfuté cet argument. Elle a considéré, ainsi, que l’article 370-3, alinéa 2, du code civil était conforme à la Convention de la Haye du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale, celle-ci n’ayant vocation à s’appliquer qu’aux seuls enfants adoptables, excluant ceux dont le pays d’origine interdit l’adoption. Elle ajoutait que la kafala est expressément reconnue par l’article 20, alinéa 3, de la Convention de New York comme préservant l’intérêt supérieur de l’enfant. Sous l’angle de ce texte, cette institution est un moyen de recueillir un enfant privé de son milieu familial et permet donc à celui-ci de bénéficier d’un statut juridique protecteur de ses intérêts au même titre que l’adoption. La requérante a alors porté l’affaire devant la Cour européenne des droits de l’homme en prétendant, notamment, que l’impossibilité d’établir un lien de filiation entre elle et l’enfant recueilli porte atteinte au droit au respect de la vie familiale, garanti par l’article 8 de la Convention.

La Cour considère tout d’abord que la requérante ne rencontre aucune entrave à l’exercice de sa vie familiale, de sorte que le...

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