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Liberté et loyauté de la preuve en matière correctionnelle

Aucune disposition légale ne permet aux juges répressifs d’écarter un moyen de preuve remis par un particulier au seul motif qu’il aurait été obtenu de façon illicite ou déloyale et il leur appartient seulement d’en apprécier la valeur probante après l’avoir soumis à la discussion contradictoire.

par C. Gayetle 17 mars 2010

Gérant d’une société à responsabilité limité (SARL) et d’une société civile immobilière (SCI), monsieur M… est condamné pour abus de biens sociaux, pour avoir utilisé les moyens humains et matériels de la SARL aux fins de réfection d’un immeuble appartenant à la SCI et dont il avait fait sa résidence principale. À l’appui de son pourvoi, il soulève l’illicéité des preuves ayant fondé les poursuites et conduit à sa condamnation. Il soutient en effet que les documents et pièces auraient dû être écartés des débats puisqu’obtenus frauduleusement par un ancien salarié licencié. Il soutient par ailleurs que la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision en s’abstenant de rechercher si l’examen public, devant la juridiction correctionnelle, de pièces soustraites par le salarié d’une entreprise à l’insu de son employeur et protégées par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, constituait ou non une mesure nécessaire et proportionnée au sens de cet article.

La Cour de cassation rejette ce pourvoi. Elle énonce classiquement « qu’aucune disposition légale ne permet aux juges répressifs d’écarter des moyens de preuve remis par un particulier aux services d’enquête au seul motif qu’ils auraient été obtenus de façon illicite ou déloyale et il leur appartient seulement, en application de l’article 427 du code de procédure pénale, d’en apprécier la valeur probante, après les avoir soumis à la discussion contradictoire ». Cette solution est fidèle à la jurisprudence de la Cour (V., not., Crim. 15 juin 1993, Bull. crim. n° 210 ; D. 1994. 613, note Mascala  ; 6 avr. 1994, Bull. crim. n° 136 ; 30 mars 1999, Bull. crim. n° 59 ; Procédures 1999. Comm. 215, obs. Buisson ; D. 2000. 391, note Garé  ; 12 juin 2003 ; RSC 2004. 427, obs. Buisson