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Article
Absence de radiation d’une inscription du seul fait de la clôture pour insuffisance d’actif
Absence de radiation d’une inscription du seul fait de la clôture pour insuffisance d’actif
Lorsque l’insaisissabilité légale de la résidence principale d’un débiteur en liquidation judiciaire est inopposable à un créancier hypothécaire, ce dernier peut exercer ses droits sur l’immeuble en dépit de la clôture pour insuffisance d’actif, qui ne peut par elle-même justifier la radiation de son inscription.
Afin de favoriser l’entrepreneuriat, la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 a conféré aux entrepreneurs individuels une protection patrimoniale supplémentaire sous la forme d’une insaisissabilité légale de leur résidence principale, en vigueur depuis le 8 août 2015 (Loi n° 2015-990 du 6 août 2015, pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, art. 206, IV, JO n° 0181, 7 août). Mais pour ménager leur crédit et éviter de leur fermer l’accès à la propriété immobilière, la mesure édictée n’est ni absolue (C. com., art. L. 526-1), ni d’ordre public (C. com., art. L. 526-3). Certains créanciers conservant le droit d’appréhender l’immeuble en cause, il s’agit en réalité moins d’une insaisissabilité que d’une saisissabilité réservée (P.-M. Le Corre, La protection des immeubles du débiteur : n’est-on pas allé trop loin ?, Gaz. Pal. 17 avr. 2018, n° 321q9, p. 48), de telle manière que la protection ainsi accordée peut in fine s’avérer illusoire. Ce dont atteste parfaitement l’arrêt ci-dessus référencé.
En l’espèce, un créancier inscrit une hypothèque sur un bien constituant la résidence principale de son débiteur avant l’entrée en vigueur de la loi du 6 août 2015, ce dernier étant peu après placé en redressement puis liquidation judiciaires. À la suite et en raison de la clôture de la procédure pour insuffisance d’actif, le propriétaire de l’immeuble sollicite du créancier la mainlevée de l’inscription hypothécaire, avant d’en réclamer la radiation judiciaire.
Sa demande étant rejetée en appel, le débiteur forme un pourvoi en cassation. En substance, il considère que l’interdiction de reprise des poursuites individuelles attachée au jugement de clôture pour insuffisance d’actif (C. com., art. L. 643-11, I) rend sans objet l’inscription, qui, faute de pouvoir donner lieu à saisie, doit dès lors faire l’objet d’une mainlevée, sachant qu’aucun des cas de reprise exceptionnelle des poursuites individuelles (C. com., II, III et IV) n’est ici caractérisé.
Sur la base du jeu concomitant des articles L. 526-1 du code de commerce et 2443 du code civil, devenu l’article 2438 depuis la réforme du 15 septembre 2021, la Cour de cassation rejette le pourvoi. Son raisonnement opère en deux temps.
Dans un premier temps, elle rappelle que l’insaisissabilité légale de la résidence principale ne concerne que les créanciers professionnels postérieurs à l’entrée en vigueur de la loi du 6 août 2015, à l’exclusion, donc, de ceux dont la créance est née avant. La Haute juridiction reproduit ensuite l’énumération légale des situations dans lesquelles la radiation judiciaire d’une inscription hypothécaire doit être ordonnée.
Dans un second temps, elle en infère, non seulement que le titulaire de l’hypothèque, auquel l’insaisissabilité légale de la résidence principale est inopposable, peut exercer ses droits sur l’immeuble en dépit de la clôture de la procédure pour insuffisance d’actif, mais également que celle-ci ne peut justifier la radiation de son inscription, qui est soumise aux conditions, sous-entendues limitatives, du droit commun. De sorte que la demande de radiation judiciaire, formée par le débiteur au seul titre de la clôture pour insuffisance d’actif, ne pouvait être accueillie.
Sur le fond, de telles conclusions apparaissent difficilement critiquables, en ce qu’elles sont conformes aux règles de droit hypothécaire gouvernant la radiation judiciaire des inscriptions tout en étant cohérentes au regard des solutions dégagées en jurisprudence quant à l’articulation entre les mesures d’insaisissabilité relative et les procédures collectives. Sur la forme, en revanche, la décision peut paraître perfectible, dans la mesure où elle suggère que c’est l’indifférence de la clôture sur le droit de poursuite du créancier qui explique que cette dernière ne soit pas de nature à entraîner la radiation judiciaire de son inscription, alors que la justification fondamentale de l’indifférence de la clôture sur l’inscription hypothécaire semble résider ailleurs, dans un élément qui ne figure pas dans le présent arrêt, du moins pas explicitement.
L’indifférence de la clôture sur le...
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Auteur(s) : Pierre-Michel Le Corre