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Absence de rétroactivité du nouveau régime de prescription des actions en nullité de titres de propriété industrielle

Un arrêt du 15 mars 2024 de la Cour d’appel de Paris illustre bien les difficultés soulevées par l’application dans le temps des nouvelles dispositions relatives à la prescription des actions en nullité de titres de propriété industrielle.

Sous l’ancien régime, l’action en nullité de titres de propriété industrielle était soumise au régime de la prescription de droit commun (C. civ., art. 2224), ramenée de trente ans à cinq ans dans le cadre de la réforme de la prescription par la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008.

Le délai de prescription devenant inférieur à la durée de validité des titres de propriété industrielle, la prescription a commencé à être discutée dans le cadre d’actions en nullité de titres de propriété industrielle dans le courant des années 2010. La jurisprudence a alors eu à déterminer le point de départ du délai de prescription, dont l’article 2224 du code civil prévoyait qu’il courrait « à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer ».

Après quelques hésitations, la jurisprudence a convergé vers une application du texte compatible avec les exigences en matière d’intérêt à agir : en substance, la prescription de l’action en nullité ne court qu’à compter du jour où le demandeur à l’action en nullité a un intérêt à agir, c’est-à-dire à partir du moment où il a eu une connaissance effective des titres en cause ou où il aurait dû les connaitre.

Néanmoins, cette appréciation a soulevé des difficultés dans la mesure où elle s’opère in concreto, en fonction de la connaissance effective par le demandeur des titres en cause (par ex., du fait de contentieux entre les parties ou de la structure du marché) ou d’événements impliquant pour le demandeur une surveillance des titres en cause (par ex., un projet d’exploitation supposant une étude de liberté d’exploitation).

Compte tenu des critiques à l’encontre de l’existence même d’une prescription en matière d’action en nullité de titres de propriété industrielle et des difficultés soulevées par la détermination du point de départ de la prescription dans le cadre d’une appréciation in concreto, variable en fonction du demandeur et des circonstances de l’espèce, le législateur a souhaité modifier l’état du droit.

La loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 (loi PACTE) a ainsi modifié le code de la propriété intellectuelle afin de prévoir, pour chaque titre de propriété industrielle, que : « l’action ou la demande en nullité […] n’est soumise à aucun délai de prescription » (art. L. 521-3-2 pour les dessins et modèles, L. 615-8-1 pour les brevets, L. 623-29-1 pour les certificats d’obtention végétale et L. 714-3-1 pour les marques, ce dernier ayant ensuite été abrogé par l’ord. n° 2019-1169 du 13 nov. 2019, Dalloz actualité, 27 nov. 2019, obs. N. Maximin ; et remplacé par l’art. L. 716-2-6).

La loi PACTE prévoit que les nouvelles dispositions « s’appliquent aux titres en vigueur au jour de la publication de la présente loi. Ils sont sans effet sur les décisions ayant force de chose jugée ».

Elle laisse une incertitude sur une application potentiellement rétroactive de la loi :

  • Selon une interprétation fondée sur les dispositions du droit...

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