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Abus sexuels sur mineurs : obligation procédurale de mener une enquête effective

Il découle de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme une obligation procédurale de mener une enquête effective sur les allégations d’abus sexuels sur mineurs et cette obligation n’est pas respectée lorsque les enquêteurs ont négligé certaines pistes et n’ont pas pris certaines mesures d’enquête telles que des interceptions de correspondances ou des infiltrations.

par Sébastien Fucinile 22 février 2021

Par un arrêt de grande chambre, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a condamné la Bulgarie pour traitement inhumain et dégradant, en raison de la violation de l’obligation procédurale de mener une enquête effective en cas d’allégations d’abus sexuels sur mineurs. Trois mineurs d’origine bulgare, adoptés par un couple italien, ont fait état de graves abus sexuels qu’ils auraient subis dans un orphelinat bulgare avant leur adoption, par des membres du personnel et par des pensionnaires plus âgés. À la suite des dénonciations aux autorités italiennes et à des associations bulgares, puis à des articles de journaux, une enquête est rapidement ouverte. Une inspection est menée dans l’orphelinat où toute une série de personnes dans la direction et parmi les pensionnaires sont interrogées. Peu de temps après, à la suite de la communication d’éléments plus précis par la justice italienne, les autorités bulgares mènent une deuxième puis une troisième enquête, conduisant à interroger les personnes mises en cause par les requérants et les potentielles autres victimes. Ces inspections et interrogatoires n’ayant rien donné, personne ne corroborant les allégations des requérants et aucun élément ne permettant d’attester la réalité des faits allégués, l’affaire a été classée par les autorités bulgares, qui ont considéré que les allégations d’abus sexuels étaient infondées. La CEDH considère que cette enquête est insuffisante : dès lors que les allégations des requérants étaient crédibles, les autorités bulgares auraient dû demander la communication des éléments en possession de la justice italienne, notamment les enregistrements des auditions des requérants, et auraient dû recourir à d’autres actes d’enquête, tels que des interceptions de correspondances, des infiltrations ou des perquisitions. En somme, la Cour européenne reproche aux enquêteurs d’avoir mené une enquête insuffisamment approfondie, en ne recourant pas à des techniques d’enquête plus poussées. Cet arrêt, rendu par neuf voix contre huit, à la suite d’un arrêt de chambre qui a rejeté à l’unanimité la violation de l’article 3 de la...

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