Accueil
Le quotidien du droit en ligne
-A+A
Article

Accès au droit : incursion dans les permanences des MJD (partie I)

Ce mardi 24 mai, c’est la journée nationale de l’accès au droit. Un enjeu qui repose notamment sur les maisons de la justice et du droit (MJD), que la Chancellerie définit comme des « établissements judiciaires de proximité ». Pour nous faire une idée des cas qui passaient entre leurs murs, nous en avons arpenté trois, croisant une douzaine d’intervenants et une centaine de requérants.

par Antoine Bloch, Journalistele 24 mai 2022

V. la seconde partie de cet article.

 

À Troyes (Aube), la maison de la justice et du droit (MJD) est à peine excentrée : elle est plantée quasiment dans l’ombre de la cathédrale du XIIIe siècle, non loin d’une maison à colombages comme la ville en compte des centaines, et à même pas deux kilomètres du tribunal judiciaire. Comme toutes les MJD, elle est aux couleurs du ministère de la Justice. Mais concrètement, c’est un groupement d’intérêt public, le conseil départemental d’accès au droit (CDAD) qui, au travers d’une subdélégation de service public, fait intervenir juristes, associatifs, avocats, etc. Ici comme ailleurs, on trouve également un délégué du procureur (DPR), qu’on laissera un peu de côté puisque, par définition, ce ne sont pas les justiciables qui sont à l’initiative de la rencontre.

Une première permanence, généraliste, est justement assurée par une juriste du CDAD. Sur le listing, il est indiqué Mickaël* « souhaite connaître les démarches pour dénoncer un mariage blanc ». « Je vis en concubinage, mais elle est déjà mariée, avec son frère », commence le trentenaire sous le regard un peu perdu de son interlocutrice, « parce qu’en fait, son frère, c’est son cousin ». « Hmm, d’accord », ponctue régulièrement la juriste, sans conviction, en se tassant progressivement dans son siège. Le cas pratique finit tout de même par prendre forme : « En fait, c’est pour voir ma fille, parce qu’elle ne veut pas me la donner. Elle dit que je ne participe pas financièrement. Je dois lui faire un virement de 50 € pour qu’elle me la donne, une journée. » « Ce sont deux choses différentes », précise la juriste : « Il faut contribuer aux charges, mais vous n’avez pas besoin de payer pour voir votre enfant. Vous avez droit à un maintien des liens, mais effectivement, avant d’avoir un jugement, c’est un peu bancal. »

— Sauf que le juge m’a dit qu’il abandonnait, qu’il en avait marre…

— Et quel jugement a été rendu, du coup ?

— Il m’a mis qu’il fallait ressaisir le juge aux affaires familiales.

— Ah, donc c’était le juge des enfants ?

— Voilà.

— Bon, ben vous allez être bon pour faire un deuxième dossier pour l’aide juridictionnelle. Y a pas le choix.

« On va voir dans le journal qu’un homme a pété les plombs devant une CAF… »

« Et donc, vous avez un problème avec qui ? », demande un peu plus loin la conciliatrice à Karim, qui réfléchit quelques secondes avant de répondre, non sans une certaine morgue : « J’ai divers problèmes actuellement. Je suis d’un milieu assez modeste, je mène ma vie assez péniblement et difficilement, et le président Macron… » « Alors, on va en venir au litige, Monsieur », le coupe la conciliatrice. En fait, on était en plein dedans, puisque tout a démarré avec l’annonce d’une « indemnité inflation » de 100 €. « Voyant mes réserves vides, mais devant faire des courses pour la petite », Karim a cherché à récupérer ce modeste pécule. Il s’est donc rendu en agence mais, « victime d’une perte d’identité », comprendre de la carte du même nom, « je me suis présenté avec [le récépissé de] déclaration. Sauf que je me suis retrouvé dans un litige commercial, ils ont appelé la police, et je vais aller devant le juge pour une vexation que j’aurais faite… » On croit comprendre qu’il serait question d’une tentative d’extorsion.

— En plus, la banque a clôturé mon compte.

— Mais ce n’est pas du ressort du conciliateur.

— Ben justement, j’avais demandé à ne pas avoir un conciliateur.

Le jeune homme monte en pression, et en vient à lâcher : « Après, on va voir dans le journal qu’un homme a pété les plombs devant une CAF… » Pas rassurée outre mesure, la conciliatrice va chercher le délégué du procureur dans le bureau voisin. Karim proteste : « Je me suis pas énervé, j’ai juste une éloquence un peu véhémente. » Il explique que, sans accès à son compte, il ne peut pas faire de photos d’identité ; et que, sans carte d’identité, il ne peut pas ouvrir de nouveau compte. « La pauvreté, elle m’a mise dans un cercle vicieux », conclut Karim : « Moi je me suis braqué maintenant, ça y est. C’est peine perdue pour moi, en fait. Toutes les démarches que j’ai faites, on m’a menacé d’appeler les policiers. » Il se lève et lance sèchement : « Au revoir, et merci ! Enfin, c’est ironique, mais bon, merci. »

« On lui souhaite une longue vie quand même, hein ! »

Dans le XVIIe arrondissement parisien, les justiciables ne convergent pas seulement vers le tribunal des Batignolles. On en croise aussi du côté de la Porte de Saint-Ouen, dans l’une des trois MJD que compte la capitale. Aujourd’hui, c’est « permanence notaire ». Jean-Pierre se « pose des questions » sur la future succession de sa belle-mère. Il sait qu’il y aurait des choses à faire pour optimiser la transmission avant qu’il ne soit trop tard. D’ailleurs, avec sa compagne, « on est allé la voir plusieurs fois, mais elle a dit que ça ne valait plus le coup ». Il faut dire qu’elle est « un peu têtue », et « aussi un peu méfiante, quand même ». « Ah oui, les personnes âgées, des fois… » répond la notaire, imperturbable. Jean-Pierre a déjà tout calculé, au centime près, et fait toutes sortes de simulations : « Ben oui, elle peut faire ça… Mais est-ce qu’elle veut ? », lui rétorque-t-elle à l’occasion. « Moi, je n’ai jamais pu parler à ma mère de tout ce qui était argent », ajoute-t-elle, « mais si elles arrivent à en parler, il faut qu’elles discutent ensemble. Et évidemment, si elles arrivent à en liquider un peu, c’est mieux. Il faut lui expliquer qu’il serait dommage que l’État garde son argent ». Pour le moins clinique, la lecture que Jean-Pierre fait de la situation sent tellement le sapin pour belle-maman que la notaire se sent obligée de préciser : « Enfin bon, on lui souhaite une longue vie quand même, à cette dame, hein ! »

Alexandre, quant à lui, vient sur les conseils de la chambre des notaires, avec des questions sur la loi Elan. Il cherche à vendre son appartement, auquel il a réuni des combles « récupérées par AG en jouissance exclusive il y a vingt ans ». Or « la surface Carrez a été prise sur l’ensemble ». « Ah ben oui mais non ! », se marre la notaire. « Sans rentrer dans le détail, je vais vous dire un truc tout simple », poursuit-elle : « Soyez clair dès le départ, trouvez un acquéreur qui veuille absolument le bien et qui le prenne en l’état. Mais faites la promesse chez un notaire, pour qu’il bétonne l’acte. Parce que sous seing privé, dans une agence, ils ne le feront pas bien. » Alexandre est rassuré, mais « le notaire, il ne peut pas refuser, en disant que ce n’est pas d’équerre ? » « Alors oui, c’est sûr, certains vont refuser », répond-elle avec un sourire entendu, « mais vous en trouverez toujours un qui ne refusera pas ».

« Elle ne se plaint pas, mais je vois bien qu’elle est épuisée »

Dans un bureau voisin, une avocate assure une permanence en droit du travail. Et reçoit Samba, « bientôt 35 ans, enfin je crois ». Il travaille « au planning », qu’il reçoit chaque fin de semaine pour la suivante. Depuis quelque temps, son employeur l’envoie aux quatre coins de l’Île-de-France, pour des missions dont la durée, dans le meilleur des cas, excède à peine le temps de transport aller-retour. Il pense être le seul dans ce cas, mais ne connaît pas les plannings de ses collègues et ne veut surtout pas leur en parler. Épuisé, il a fini par refuser son dernier emploi du temps : l’employeur vient donc de le convoquer en vue d’une sanction disciplinaire, tout en lui indiquant oralement que, « si vous voulez démissionner, moi, ça ne me dérange pas ». « Mon sentiment », analyse l’avocate, « c’est qu’ils cherchent à vous faire partir. Mais vous êtes un peu pris au piège, parce que ces plannings, ils sont conformes à votre contrat, ils ne portent pas atteinte à votre droit au repos, et vous ne pouvez pas démontrer qu’ils ne concernent que vous. Donc vous n’avez pas vraiment de motif légal de refuser, c’est une forme d’insubordination ». Partir, Samba n’a rien contre, au demeurant. « Par contre, il ne faut surtout pas démissionner », précise l’intervenante, « mais peut-être que vous pourriez faire une rupture conventionnelle, qui donne droit à une petite indemnité ». Samba n’arrive pas à retenir le nom, alors elle griffonne sur un coin de feuille : « Rupture conventionnelle ».

Caroline, pour sa part, est venue pour sa mère, femme de ménage. Longtemps, elles ont été plusieurs à travailler dans les locaux, mais il ne reste plus qu’elle, alors « elle est sous l’eau. Ce n’est pas quelqu’un qui se plaint, mais moi, je le vois bien, qu’elle est épuisée ». « Si elle estime qu’elle a une charge de travail trop importante pour une seule personne », explique l’avocate, « elle peut parfaitement demander un entretien avec son responsable ». Sinon, « elle a aussi le droit de solliciter d’elle-même, sans que son employeur soit averti, le médecin du travail. Il peut préconiser certaines choses, parce que l’employeur, il a quand même une obligation d’assurer la santé et la sécurité de ses salariés. Mais bon, si elle y va, il ne faut pas qu’elle dise que tout va bien, hein ». Caroline ne semble pas convaincue, mais après un petit temps de réflexion, elle ajoute : « Il faudrait peut-être seulement que je la pousse un peu… » « Par exemple, on pourrait parfaitement imaginer », reprend l’intervenante, « que le médecin du travail dise qu’elle ne peut pas monter plus de X étages, ce qui contraindrait l’employeur à prendre une autre personne, à temps partiel, pour faire les étages supérieurs ». Pendant que Caroline se dirige vers la porte, l’avocate ajoute : « Après, si elle est vraiment trop fatiguée, elle se met en congé maladie, ça arrive à plein de gens, hein. »

« Avec les tribunaux, on ne peut jamais savoir »

C’est à une trentaine de minutes de marche du centre-ville de Blois (Loir-et-Cher) que se trouve notre troisième MJD, dont les intervenants assurent également des permanences à Vendôme et Romorantin. Posée dans un quartier-dortoir essentiellement animé par la présence d’une mosquée et d’un petit café, cette « maison » est en fait un appartement, au second étage d’un petit immeuble qui accueille également des cabinets médicaux ou des associations d’insertion. La greffière est une stakhanoviste des petits livrets d’information thématiques, très bien fichus, dont débordent les présentoirs de la salle d’attente. Mais entrons dans une première salle. Une avocate y tient une permanence généraliste, facturée 10 € pour couvrir partiellement les 252 € de la vacation de l’auxiliaire de justice.

Entre un couple de petits vieux, accompagné d’un énorme dossier. Ils prennent chacun leur histoire par un bout, et la déroulent en parallèle, jusqu’à ce que Jacqueline pose une main autoritaire sur l’avant-bras de Marcel : « On ne va peut-être pas parler en même temps ! » Ils sont « enfumés jour et nuit » par la cheminée de leur voisine : « Il y a plein de bistre et de suie partout. Elle est à trois mètres de notre aération, et visiblement, il en faudrait six ». C’est « un mec qui monte des cheminées » qui leur a dit. Ils ont d’ailleurs imprimé le texte en question, sauf qu’il ne concerne que « celui qui veut construire… » : « Ça ne parle pas de la mise en conformité d’une installation existante », souligne l’avocate. « Mais il ne faut pas nuire à ses voisins », assène Marcel : « Sauf que vous ne pouvez pas non plus la contraindre à l’impossible », relativise son interlocutrice. « Tout ça, c’est quand même bon pour nous ! », s’enthousiasme l’homme. « Avec les tribunaux, on ne peut jamais savoir », répond l’avocate : « En tout cas, il faut d’abord passer par une conciliation, c’est obligatoire ». Lorsqu’ils tournent les talons, l’avocate intercale à notre attention : « Parfois, les gens ne veulent pas comprendre qu’il n’y a juste rien à faire, si ce n’est trouver un compromis. Et souvent, ils sont tellement sûrs de leur coup qu’ils ne se ménagent même pas la charge de la preuve. »

« Vous pensez que je dois lui mettre la pression ? »

Dans le bureau voisin se trouve un juriste du Centre d’information sur les droits des femmes et des familles (CIDFF). « Ma femme et moi, on ne se parle plus beaucoup », explique par la suite Christophe en se grattant la tête : « Elle est partie avec une femme depuis plusieurs mois, et je commence à en avoir marre d’attendre qu’elle revienne, donc je veux lancer une procédure de divorce. » « Votre avocat peut écrire à madame pour proposer un divorce par consentement mutuel », explique l’intervenant, « sinon, vous partirez sur un divorce contentieux ». La liquidation du régime pourrait réserver quelques surprises à Christophe, notamment parce qu’ils disposent de « deux comptes joints, chacun le sien. D’ailleurs, elle met le sien à découvert exprès pour qu’on vienne me demander à moi ». Mais aussi parce que « notre maison, je l’ai construite moi-même, sur un terrain qui est à mon nom, sauf que le prêt a continué après le mariage », et qu’il l’a remboursé depuis « son » compte joint. Suivent d’autres montages un peu baroques, mais rien d’inextricable. Pourtant, au fil de l’entretien, on comprend que Christophe cherche surtout de bonnes raisons de ne pas pouvoir aller au bout de sa démarche. Comme son interlocuteur ne lui répond visiblement pas ce qu’il a envie d’entendre, il finit par lui faire dire ce qu’il n’a pas dit : « Du coup, vous pensez que je dois lui mettre la pression pour qu’elle revienne ? » Drôle de question, surtout lorsqu’on la pose à un organisme aussi fondamentalement féministe. « Alors non, ça ne se fait pas », s’agace l’intervenant, en faisant les gros yeux : « Ça peut donner lieu à indemnisation si c’est reconnu comme une faute, mais c’est tout. Les gens, ils partent, ils partent, c’est comme ça, ça fait partie des libertés. »

Au fond du couloir, permanence de la Ligue des droits de l’homme (LDH). « J’ai une situation avec la préfecture », franglise Moussa, « dubliné » d’une trentaine d’années. Patiemment, l’intervenante essaie de démêler son dossier, mais à chaque fois qu’elle termine ses explications, il change de version. On en est à la troisième lorsque Moussa lâche : « Alors… je ne vous ai pas tout dit. Je vais vous expliquer exactement ce qu’est la vérité… » « À mon avis », l’interrompt-elle, « à la préfecture, ils en ont long comme ça sur vous, faut pas rêver ! Les cas compliqués comme vous, ça passe quand même mieux quand c’est présenté par un avocat. » Moussa cède la place à Charifa, qui cherche à obtenir une carte de séjour pour sa mère : « On a fait une première demande, refus… Une deuxième, refus… une troisième, refus… » Elle cherche donc des conseils pour mieux tourner la quatrième.

— Quelle raison ils ont donné, pour le refus ?

— Ils ont dit qu’elle avait un visa touriste, alors qu’il aurait fallu un visa long séjour.

— On sait très bien qu’aucun consulat n’en délivre.

— Mais… Pourquoi ils demandent ça, alors ?

« J’ai envie de vous dire de toucher du bois »

Retour en Champagne, pour une permanence du délégué du Défenseur des droits (DDD), compétent en cas de discriminations, mais aussi pour tous les litiges avec les administrations et, plus largement, les services publics. Le listing des rendez-vous évoque des « contraventions » : « J’imagine que c’est un problème de carte grise qui n’a pas été transférée… », tente-t-il. Bingo. « Vous êtes mon dernier espoir, parce que j’ai été con, mais alors vraiment très très con », s’autoflagelle Christian. « Je l’ai vendue sur internet », entame-t-il. « Bien sûr », répond le délégué.

— Il m’a payé en liquide.

— Bien sûr.

— Il m’a dit qu’il reviendrait le lendemain pour les papiers.

— Bien sûr.

— Et je n’ai plus eu de signe de vie.

On attend le « bien sûr », qui ne vient pas, mais toujours est-il que les contraventions s’accumulent : Christian en règle d’ailleurs certaines. Comme le délégué a quelques talents de divination, il continue tout seul : « Et puis, vous avez voulu porter plainte, et on n’a pas voulu la prendre. » Christian confirme, et ajoute que le dossier qu’il a patiemment monté en ligne (sur le site de l’ANTAI) a été déclaré irrecevable… faute de plainte. Son interlocuteur hausse les épaules : « Malheureusement, vous n’êtes pas le premier. On est trois sur le département, et on a bien dû avoir une trentaine de cas identiques. » « J’ai envie de vous dire de prier le Bon Dieu, et de toucher du bois », poursuit le même : « Peut-être qu’il s’est planté avec, ou qu’il l’a revendue… À part croiser la voiture par hasard et foutre une bombe dessous… Si j’avais la solution, je la ferais payer, et je serais riche. » C’est finalement le délégué du procureur, ancien policier, qui trouve la solution : un coup de fil au gradé du commissariat du coin. « Je préfère t’appeler avant, pour ne pas qu’il se fasse shooter une deuxième fois… », glisse-t-il à son correspondant. Dès le lendemain, Christian pourra déposer la plainte que jamais personne n’aurait dû refuser de prendre.

Arrive Louisa, qui commence à détailler sa procédure de divorce. « J’ai un problème », l’interrompt le DDD, « j’ai vu votre ex-époux ! » Il tourne les pages d’un cahier à grands carreaux, puis le referme : « C’est bon, il n’y a rien de confidentiel. » Louisa lui tend l’arrêt d’appel, et il se cogne la lecture à mi-voix de l’ensemble de la décision. Au bout de plusieurs minutes, enfin arrivé au dispositif, il ponctue : « Bon, ben c’est la copie conforme du premier jugement, quoi. » Le problème, c’est que, pendant de nombreux mois, l’ex-mari de Louisa n’a versé ni prestation compensatoire ni pension alimentaire pour leur progéniture. La caisse d’allocations familiales (CAF) a commencé à procéder au recouvrement, et donc au versement sur le compte de Louisa, mais c’est alors que son ex a entrepris de lui faire en direct des virements mensuels du même montant. Louisa a considéré que cela couvrait les mois de retard, ce que plusieurs interlocuteurs de la CAF lui ont d’ailleurs confirmé. Mais l’organisme y voit un trop-perçu, dont il exige le remboursement. Au fil des mois, l’entremêlement d’interventions humaines et d’opérations automatisées a achevé de transformer les comptes en sac de nœuds : « Et comme d’habitude, vous ne les avez eus que par téléphone ou internet, et il n’y a aucune trace de rien… » Une fois, Louisa a en fait réussi à échanger avec un être humain en chair et en os : une femme brune qui lui a promis de la rappeler sous quarante-huit heures. C’était il y a des semaines. « Je regarde ça, je les appelle et je vous tiens au courant. »

 

* Tous les prénoms et certains détails ont été modifiés.