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Accès à la profession d’avocat d’un ressortissant d’un État signataire de l’Accord général sur le commerce des services
Accès à la profession d’avocat d’un ressortissant d’un État signataire de l’Accord général sur le commerce des services
Dans un arrêt rendu le 6 décembre 2023, la première chambre civile de la Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence s’agissant de la possibilité d’invoquer l’article VII de l’Accord général sur le commerce des services (AGCS) pour le ressortissant d’un État n’appartenant pas à l’Union européenne ou n’étant pas partie à l’accord sur l’Espace économique européen.
Désormais, ce ressortissant doit prouver la condition de réciprocité.
par Cédric Hélaine, Docteur en droit, Chargé d'enseignement à l'Université d'Aix-Marseillele 14 décembre 2023
Civ. 1re, 6 déc. 2023, FS-B, n° 22-15.558

Le 6 décembre 2023, la première chambre civile de la Cour de cassation a rendu trois importantes décisions concernant la profession d’avocat. La première s’intéresse à l’intersection du secret professionnel et du droit à la preuve du client de l’avocat cherchant à prouver la responsabilité de celui-ci à l’aide de mesures d’instructions in futurum de l’article 145 du code de procédure civile (Civ. 1re, 6 déc. 2023, n° 22-19.285, Dalloz actualité, 12 déc. 2023, obs. C. Hélaine ; D. 2023. 2197 ). La deuxième concerne une question de compétence du bâtonnier dans le cadre de la dissolution d’une société civile immobilière (Civ. 1re, 6 déc. 2023, n° 22-19.372, D. 2023. 2190
; nos obs. à paraître sur Dalloz actualité). La troisième est l’arrêt que nous étudions aujourd’hui. Il a pour thématique les conditions d’accès à la profession d’avocat d’une personne étrangère quand celle-ci est d’une nationalité d’un État signataire de l’AGCS. L’AGCS fait partie des accords sur l’organisation mondiale du commerce (OMC).
Le pourvoi puise sa source dans la décision du Conseil de l’ordre des avocats du Barreau de Seine-Saint-Denis du 4 novembre 2020 qui a admis la demande d’une personne de nationalité béninoise d’accéder à la profession d’avocat. L’intéressé avait été juriste au sein d’une organisation syndicale de manière bénévole depuis 2008 et avait obtenu un master en droit de l’entreprise lors de l’année universitaire 2007-2008. Le procureur général près la Cour d’appel de Paris forme un recours contre cette décision. La Cour d’appel de Paris rejette la demande d’inscription au tableau des avocats du Barreau de Seine-Saint-Denis en rappelant que le demandeur à l’inscription ne bénéficiait pas de la réciprocité prévue par l’AGCS puisqu’il n’était pas avocat au Bénin. L’intéressé se pourvoit en cassation en précisant que l’AGCS est directement applicable dans l’ordre juridique interne. La condition de réciprocité est réputée acquise, selon lui, même lorsque le candidat n’exerce pas déjà cette profession dans son pays d’origine.
L’arrêt du 6 décembre 2023 opère, en rejetant le pourvoi, un revirement de jurisprudence sur la question afin de mettre en conformité le droit interne avec le droit de l’Union européenne.
Les données du problème
Revenons, en premier lieu, sur le point posant difficulté car celui-ci est loin d’être simple.
Toute la question repose sur l’article 11 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971. Le 1° de ce texte, cité au n° 6 de l’arrêt étudié, rappelle que le candidat à l’accès à la profession d’avocat doit « être français, ressortissant d’un État membre de l’Union européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen, ou ressortissant d’un État ou d’une unité territoriale n’appartenant pas à l’Union ou à cet Espace économique qui accorde aux Français la faculté d’exercer sous les mêmes conditions l’activité professionnelle que l’intéressé se propose lui-même d’exercer en France ». C’est ce que l’on appelle la condition de réciprocité.
Le pourvoi utilisait une position jurisprudentielle de la première chambre civile rappelée au point n° 7 de la décision. La condition de réciprocité est réputée acquise et n’appelle aucune justification particulière entre les États signataires de l’AGCS qui est directement applicable dans l’ordre juridique interne (l’arrêt cite l’arrêt suivant, Civ. 1re, 22 nov. 2007, n° 05-19.128, Dalloz actualité, 17 déc. 2007, obs. L. Dargent ; D. 2008. 26 ; ibid. 944, obs. B. Blanchard
). La solution se fondait sur ce texte pour décider que « l’avocat étranger, fournisseur de services, ressortissant d’un État partie à l’OMC, ne peut se voir opposer la condition réciprocité » (T. Wickers, S. Bortoluzzi et D....
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