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Action civile : le juge pénal statue dans la limite des conclusions

Outre une enrichissante illustration donnée au nouveau délit de cyberharcèlement par « comportements de meute », l’arrêt commenté rappelle que lorsqu’il statue sur les intérêts civils, le juge pénal est tenu de se prononcer dans la limite des conclusions dont il est saisi.

En réaction à des commentaires malveillants qu’elle avait reçus, après avoir évoqué ses orientations sexuelles, une jeune internaute avait exprimé, sur les réseaux sociaux, une opinion résolument hostile sur l’islam. Ayant fait l’objet de milliers de messages haineux, insultants ou menaçants, la victime de ce harcèlement par « comportements de meute », sous la forme notamment de « raids numériques », avait été déscolarisée, puis placée sous protection policière.

Par son retentissement médiatique, l’affaire est rapidement devenue emblématique de la lutte contre les contenus haineux en ligne. Au terme de l’enquête judiciaire, une dizaine d’individus ont été poursuivis devant le Tribunal correctionnel de Paris, dont l’immense majorité a été condamnée pour harcèlement aggravé. Appelants de leurs condamnations respectives, deux prévenus ont finalement écopé, à hauteur d’appel, d’une peine significativement alourdie.

Devant la chambre criminelle, l’un d’entre eux a présenté, sans succès, une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), portant sur les dispositions de l’article 222-33-2-2 du code pénal. Dans le cadre de son pourvoi, il a également reproché aux juges d’appel, d’une part, de n’avoir pas valablement caractérisé le délit poursuivi, d’autre part, d’avoir ordonné une solidarité de sa condamnation civile que la victime n’avait pas même demandée.

Rejetant l’ensemble des critiques relatives au délit de cyberharcèlement et à la condamnation ayant résulté de son application, la chambre criminelle prononce en revanche une cassation sur la seule condamnation civile.

Refus de transmission d’une question prioritaire de constitutionnalité

Au soutien du pourvoi, une QPC avait incidemment été déposée, critiquant l’article 222-33-2-2 du code pénal, en ce que celui-ci autorise la répression de « comportements de meute » : d’une part, lorsque les « propos ou comportements sont imposés à une même victime par plusieurs personnes, de manière concertée ou à l’instigation de l’une d’elles, alors même que chacune de ces personnes n’a pas agi de façon répétée » (C. pén., art. 222-33-2-2, al. 2, a) ; d’autre part, lorsque les « propos ou comportements sont imposés à une même victime, successivement, par plusieurs personnes qui, même en l’absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition » (C. pén., art. 222-33-2-2, al. 2, b).

Il était soutenu que, contrevenant au principe selon lequel nul n’est pénalement responsable que de son propre fait, ces dispositions n’étaient pas conformes au principe de légalité des délits et des peines.

Jugeant de telles critiques injustifiées, la chambre criminelle a rétorqué que « la déclaration de culpabilité pour harcèlement, sur le fondement des dispositions critiquées, implique la constatation, par les juges du...

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