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Affaire de l’Euribor : la CJUE rappelle à l’ordre la Commission et le TUE sur la procédure « hybride » et sur la méthodologie de la qualification de restriction par objet dans l’arrêt HSBC

Concurrence – droits de la défense – transaction hybride – objet concurrentiel : la Cour de justice de l’Union européenne (ci-après « la Cour ») censure partiellement et à double titre l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne (ci-après le « Tribunal ») rendu contre l’entreprise HSBC dans le cartel de l’Euribor. Cet arrêt, certes de rejet, appelle cependant à une vigilance accrue de la Commission européenne (ci-après « la Commission ») sur le respect de la présomption d’innocence et le principe d’impartialité dans les procédures hybrides, tout comme il met en garde le Tribunal sur la méthodologie de la qualification de restriction par objet de l’accord anticoncurrentiel.

Si la procédure de transaction de la Commission a rencontré en droit de la concurrence un franc et indiscutable succès depuis son entrée en vigueur (Règl. eur. n° 622/2008, JOUE L 171, 30 juin 2008, p. 3 et Communication de la Commission relative aux procédures de transaction, JO C 167, 2 juill. 2008, p. 1), sa mise en œuvre allait inévitablement générer un contentieux, même résiduel, devant les juridictions de contrôle de l’Union européenne. C’est précisément le cas avec l’arrêt HSBC rendu par la Cour de justice concernant ce qu’il est commun d’appeler les procédures « hybrides » (sur ce sujet, v. A. Apel, Les amendes en droit français et en droit européen des pratiques anticoncurrentielles, M. Béhar-Touchais [préf.], I. de Silva [avant-propos], L’Harmattan, 2022, spéc. n° 372, n. 1168, nos 380 et 390).

Dans la procédure dite hybride, il est entendu qu’une partie des entreprises poursuivies choisissent de transiger avec la Commission, alors que les autres entreprises refusent de transiger (ou se retirent au cours de la transaction) et sont sanctionnées, le cas échéant, dans une procédure ordinaire.

Dans la très grande majorité des cas, la Commission procédait en deux temps. Elle prenait d’abord une première décision de transaction à l’égard des entreprises ayant opté pour la procédure de transaction, puis, ultérieurement, une seconde décision de sanction contre les entreprises qui n’avaient pas fait le choix de la transaction.

L’affaire dite de l’« Euribor », à savoir le cartel sur les produits dérivés de taux d’intérêt libellés en euros, ne déroge pas à cette pratique.

Sur la décision de la Commission et l’arrêt du tribunal contestés sur pourvoi devant la Cour

Le 4 décembre 2013, la Commission avait, par une première décision de transaction, condamné les banques Barclays, Deutsche Bank, la Société Générale et RBS, lesquelles avaient reconnu les faits qui leur étaient reprochés (Comm. UE, 4 déc. 2013, Produits dérivés sur taux d’intérêt en euros (EIRD) AT.39914, JOUE 2017, C 206, p. 7).

Le 7 décembre 2016, la Commission a adopté une seconde décision de sanction contre les sociétés du Crédit Agricole, JP Morgan Chase et HSBC qui a notamment fait l’objet d’un recours devant le Tribunal de la part de ces dernières (Comm. UE, 7 déc. 2016, EIRD, ci-après « la décision attaquée », JOUE 2019, C 130, p. 5).

Par son arrêt du 24 septembre 2019, le Tribunal de l’Union européenne a validé pour l’essentiel le constat de la Commission selon lequel HSBC avait participé à une infraction au droit de la concurrence. Toutefois, il a annulé l’amende infligée par la Commission en raison d’une motivation insuffisante (Trib. UE, 24 sept. 2019, aff. T-105/17, HSBC Holdings e. a. c/ Commission, ci-après l’« arrêt attaqué », RTD eur. 2019. 899, obs. L. Idot ).

Cet arrêt a été ensuite frappé d’un pourvoi devant la Cour de justice de la part des sociétés HSBC, soutenues par le Crédit Agricole et JP Morgan, ce qui est notable, car peu fréquent.

L’arrêt rendu par la Cour en date du 12 janvier 2023 est l’objet du présent commentaire.

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