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Alain Lambert, ex-ministre du Budget, condamné à deux ans de prison avec sursis pour trafic d’influence passif

Le 29 janvier 2025, Alain Lambert ancien ministre délégué au Budget sous le quinquennat de Jacques Chirac (gouvernements Raffarin I et II), a été condamné, aux côtés de son ancien directeur de cabinet, Alain Pelleray, des chefs respectifs de trafic d’influence passif et de complicité de ce délit. La 32e chambre du Tribunal correctionnel de Paris a prononcé une peine de deux ans de prison avec sursis pour l’ancien ministre et d’un an, avec sursis également, pour son ex-collaborateur. Les deux intéressés ont relevé appel de la décision. 

En septembre 2014, un reportage était diffusé dans l’émission « Pièces à conviction » sur France 3 au sujet d’un centre de stockage de déchets de la société Guy Dauphine Environnement (GDE) dans l’Orne. Il révélait qu’Alain Lambert, alors président du conseil général du département, avait agi afin de favoriser la création de ce centre qui faisait pourtant l’objet d’une vive opposition, notamment de la part des propriétaires du haras attenant. Il était également fait état de la situation d’Alain Pelleray, directeur de cabinet du président du conseil général de 2007 à 2011 puis chargé de mission, qui se trouvait être l’un des actionnaires majoritaires d’une société de valorisation ayant revendu à GDE des déchets recyclables pour un prix très nettement supérieur à celui du marché.

À la suite de la diffusion de ce reportage, deux associations de défense de l’environnement signalaient ces faits au procureur de la République d’Argentan en dénonçant des délits de corruption d’agent public et de prise illégale d’intérêts, si bien que le parquet national financier héritait de l’enquête (C. pr. pén., art. 705) qu’il confiait aux agents de l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF).

À la faveur d’une ouverture au contradictoire (C. pr. pén., art. 77-2), le procureur de la République financier informait les mis en cause de son intention de les poursuivre devant le tribunal correctionnel.

S’agissant de la société GDE, une convention judiciaire d’intérêt public (CJIP) était envisagée pour des faits susceptibles d’être qualifiés de trafic d’influence actif. Cette dernière, validée par le président du Tribunal judiciaire de Paris le 17 mai 2023, prévoyait une amende d’intérêt public d’un montant de 1 230 000 € et un programme de mise en conformité anticorruption de trois années, pour un peu moins d’un million d’euros (TJ Paris, 17 mai 2023, n° 14336000874, Dalloz actualité, 22 juin 2023, obs. J. Gallois).

Le trafic d’influence reproché à Alain Lambert et la complicité de son ancien directeur de cabinet

Pour rappel, Alain Lambert était poursuivi sur le fondement de l’article 432-11 du code pénal, lequel, au moment de l’affaire, incriminait le fait, par une personne dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public, ou investie d’un mandat électif public, de solliciter ou d’agréer, sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques pour elle-même ou pour autrui, notamment pour abuser (« ou avoir abusé » conformément à l’ajout opéré le 19 mai 2011) de son influence réelle ou supposée en vue de faire obtenir d’une autorité ou d’une administration publique, des distinctions, des emplois, des marchés ou toute autre décision favorable.

Plus précisément, en sa qualité de président du Conseil général de l’Orne, l’ancien ministre délégué au Budget aurait été invité à déjeuner et à diner à plusieurs reprises dans des établissements prestigieux, il aurait également reçu des chocolats à son domicile, effectué un survol du Mont-Blanc en hélicoptère et été, un temps, sérieusement envisagé pour siéger au conseil de surveillance de GDE. De surcroît, des échanges étaient excipés entre Alain Lambert et Claude Dauphin, actionnaire détenant 95 % des parts de GDE, s’agissant du financement des impressions du livre de l’ancien ministre, à hauteur de 10 000 €. Enfin, des tractations auraient eu pour objectif que ce même Claude Dauphin entre, aux côtés de certaines sociétés de son groupe, dans le portefeuille-clients du gendre d’Alain Lambert.

Le tribunal correctionnel reconnaissait, sans surprise, que les actes commis en faveur d’Alain Lambert constituaient des offres, promesses, dons, présents ou avantages quelconques au sens du code pénal. Les juges ajoutaient que la circonstance que certaines de ces sollicitations n’aient pas été suivies d’exécution demeurait sans incidence sur la caractérisation de l’élément matériel du délit de trafic d’influence passif.

En contrepartie, l’élu serait intervenu à plusieurs reprises auprès d’administrations...

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