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Application d’une loi étrangère et office du juge

Il incombe au juge français qui reconnaît applicable un droit étranger d’en rechercher la teneur, soit d’office, soit à la demande d’une partie qui l’invoque, et de donner à la question litigieuse une solution conforme au droit positif étranger.

par François Mélinle 11 juillet 2014

L’un des principes essentiels du droit international privé conduit à retenir qu’un juge français peut être amené à appliquer une loi étrangère, dans la mesure où cette loi est désignée par la règle de conflit de lois compétente. Il est alors nécessaire que la teneur de cette loi soit établie. Il s’agit là de la question dite de la preuve de la loi étrangère devant le juge selon l’expression traditionnellement utilisée en ce domaine, même s’il serait préférable de parler de la question de la connaissance de la loi étrangère par le juge français (en ce sens, V. P. de Vareilles-Sommières, Y. Loussouarn et P. Bourel, Droit international privé, 10e éd., Dalloz, 2013, n° 360). Il faut alors déterminer l’étendue de l’office du juge face à la loi étrangère amenée à régir le litige. Le problème peut être facilement résumé : appartient-il au juge de rechercher le contenu de la loi étrangère désignée par la règle de conflit de lois ou cette charge incombe-t-elle aux parties ? C’est précisément sur ce point que l’arrêt rapporté intervient, dans une affaire impliquant le droit islandais des procédures collectives.

Des saisies conservatoires avaient été pratiquées en France à l’encontre d’une société de droit islandais, qui en demanda ensuite la mainlevée en invoquant des mesures d’assainissement et de liquidation résultant des effets d’une loi islandaise. Pour la bonne compréhension de l’arrêt, il est utile de noter que le législateur islandais a transposé la directive 2001/24/CE concernant l’assainissement et la liquidation des établissements de crédit par une loi du 20 décembre 2002 sur les établissements financiers, qui renvoie en partie au droit commun islandais des procédures collectives, tel qu’il résulte d’une loi du 26 mars 1991. La loi du 20 décembre 2002 a par la suite été modifiée, le 7 octobre 2008 puis le 15 avril 2009.

La Cour de cassation a considéré que se trouvait ainsi posée la double question de savoir si les mesures d’assainissement et de liquidation résultant pour la société débitrice de la loi islandaise n° 44/2009 du 15 avril 2009 relèvent des mesures dont la directive 2001/24/CE prévoit qu’elles produisent leurs effets en France sans aucune formalité et si la directive fait obstacle aux effets de la loi islandaise du 20 décembre 2002 sur des mesures conservatoires prises en France. La...

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