Accueil
Le quotidien du droit en ligne
-A+A
Article

Application dans le temps de l’annexe à la déclaration d’appel : le sens du tragique

L’instance d’appel prenant fin avec l’arrêt de la cour d’appel, l’appelant qui a listé les chefs du jugement attaqués au moyen d’une annexe sans démonstration d’un empêchement technique ne peut se prévaloir du décret du 25 février 2022 et de l’arrêté du même jour, immédiatement applicables aux instances en cours, modifiant l’arrêté du 20 mai 2020 relatif à la communication par voie électronique en matière civile devant la cour d’appel.

Alors que l’avis du 8 juillet 2022 sur l’interprétation de l’arrêté du 25 février 2022 avait marqué l’arrivée du beau de temps après la pluie (Civ. 2e, avis, 8 juill. 2022, n° 22-70.005 P, Dalloz actualité, 30 août. 2022, obs. R. Laffly ; D. 2022. 1498 , note M. Barba ; AJ fam. 2022. 496, obs. D. D’Ambra ), voilà que la Cour de cassation se prononce sur son application dans le temps. Et c’est la pluie qui est annoncée ! Tandis que la cour d’appel d’Aix-en-Provence avait, en l’absence de contrainte technique démontrée, retenu l’absence d’effet dévolutif d’une déclaration d’appel qui renvoyait à une annexe listant les chefs de jugement critiqués par un arrêt antérieur à l’arrêté du 25 février 2022, le pourvoi tentait d’en revendiquer l’application. Réponse de la deuxième chambre civile réunie en formation de section :

« 4. Le décret du 25 février 2022, invoqué par la demanderesse au pourvoi, a modifié l’article 901, 4°, du code de procédure civile en tant qu’il prévoit que la déclaration d’appel est faite par acte contenant, à peine de nullité, les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l’appel est limité, sauf si l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible, en ajoutant dans ce texte, après les mots : “faite par acte”, les mots : “, comportant le cas échéant une annexe,”. L’article 6 du décret précise que cette disposition est applicable aux instances en cours. La demanderesse au pourvoi soutient que ces dispositions sont applicables au présent litige.

5. Par avis du 8 juillet 2022 (n° 22-70.005) la Cour de cassation a notamment dit que le décret n° 2022-245 du 25 février 2022 et l’arrêté du 25 février 2022 modifiant l’arrêté du 20 mai 2020 relatif à la communication par voie électronique en matière civile devant la cour d’appel sont immédiatement applicables aux instances en cours pour les déclarations d’appel qui ont été formées antérieurement à l’entrée en vigueur de ces deux textes réglementaires, pour autant qu’elles n’ont pas été annulées par une ordonnance du magistrat compétent qui n’a pas fait l’objet d’un déféré dans le délai requis, ou par l’arrêt d’une cour d’appel statuant sur déféré.

6. Pour autant, l’instance devant une cour d’appel, introduite par une déclaration d’appel, prend fin avec l’arrêt que rend cette juridiction. Elle ne se poursuit pas devant la Cour de cassation, devant laquelle est introduite une instance distincte.

7. Il en résulte que le décret du 25 février 2022 n’est pas applicable au présent litige.

8. La Cour de cassation a jugé le 13 janvier 2022 (Civ. 2e, 13 janv. 2022, n° 20-17.516 P) qu’il résulte de la combinaison des articles 562 et 901, 4°, du code de procédure civile, dans leur rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, ainsi que des articles 748-1 et 930-1 du même code, que la déclaration d’appel, dans laquelle doit figurer l’énonciation des chefs critiqués du jugement, est un acte de procédure se suffisant à lui seul ; que, cependant, en cas d’empêchement d’ordre technique, l’appelant peut compléter la déclaration d’appel par un document faisant corps avec elle et auquel elle doit renvoyer.

9. Pour constater l’absence d’effet dévolutif, l’arrêt retient que la déclaration d’appel de la société ne précise pas les chefs de jugement critiqués mais procède par renvoi à une annexe transmise le même jour par RPVA les mentionnant, ce dernier document n’ayant aucune valeur procédurale et ne faisant pas partie intégrante de cette déclaration.

10. Il relève en outre que l’appelante ne démontre pas avoir été dans l’impossibilité de faire figurer ces mentions dans la déclaration elle-même, laquelle pouvait parfaitement contenir l’intégralité des chefs de jugement critiqués.

11. Par ces énonciations et constatations, la cour d’appel a fait une exacte application des textes précités, sans porter d’atteinte disproportionnée au droit d’accès au juge.

12. Le moyen n’est, dès lors, pas fondé. »

Une histoire d’actes

Comme toute bonne tragédie classique, elle s’organise en cinq actes. Cinq actes pour un seul acte d’appel, mais avec annexe, c’est là toute la différence. On se souvient que le drame s’était noué il y a tout juste un an, le 13 janvier 2022. L’exposition était celle-ci : pour que l’effet dévolutif puisse jouer, les chefs de jugement critiqués doivent figurer dans la déclaration d’appel qui est un acte de procédure se suffisant à lui seul permettant à l’appelant, sous seule condition d’un empêchement technique, de la compléter par un document faisant corps avec elle et auquel elle doit renvoyer (Civ. 2e, 13 janv. 2022, n° 20-17.516 P, Dalloz actualité, 20 janv. 2022, obs. R. Laffly ; D. 2022. 325 , note M. Barba ; ibid. 625, obs. N. Fricero ; AJ fam. 2022. 63, obs. F. Eudier et D. D’Ambra ; Rev. prat. rec. 2022. 9, chron. D. Cholet, O. Cousin, M. Draillard, E. Jullien, F. Kieffer, O. Salati et C. Simon ).

Concrètement, si le dispositif de la décision à reprendre dans l’acte d’appel était inférieur à 4 080 caractères, la contrainte technique autorisant l’établissement d’une annexe n’existait pas et l’effet dévolutif ne jouait pas si les chefs de jugement s’y...

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :