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Assimilation au producteur d’un produit défectueux : une coïncidence dans les éléments d’identification suffit

En réponse à une question préjudicielle qui lui était posée par la Cour de cassation italienne, la Cour de justice de l’Union européenne considère qu’un fournisseur peut être assimilé au producteur d’un produit défectueux dès lors que son nom coïncide en partie avec le nom du fabricant apposé sur le produit.

La protection du consommateur apparaît comme un véritable fil rouge en matière de produits défectueux (sur cette préoccupation, v. P. le Tourneau, Droit de la responsabilité et des contrats. Régimes d’indemnisation, Dalloz Action, 2023-2024, n° 6311.11). Cet impératif est mentionné à plusieurs reprises dans les considérants de la directive 85/374/CEE du 25 juillet 1985 (v. par ex., les consid. nos 1, 4, 5 et 8). C’est guidée par cette préoccupation que la Cour de justice de l’Union européenne s’est prononcée le 19 décembre dernier, retenant une conception très large de la notion de personne « se présentant comme le producteur » et pouvant ainsi engager sa responsabilité.

En l’espèce, en juillet 2001, un consommateur a acheté un véhicule automobile de la marque Ford auprès de Stracciari, un concessionnaire automobile de la marque, établi en Italie. Le véhicule avait été produit par Ford WAG, société établie en Allemagne, puis fourni au concessionnaire par Ford Italia, qui distribue sur le sol italien les véhicules produits par Ford WAG, les deux sociétés appartenant au même groupe d’entreprises.

En décembre 2001, le consommateur a été victime d’un accident de la circulation, lors duquel l’airbag ne s’est pas déclenché. En janvier 2004, il a introduit un recours devant le Tribunal de Bologne contre le concessionnaire et contre la société Ford Italia afin d’obtenir réparation des préjudices qu’il estimait avoir subis en raison du défaut du véhicule. L’action du consommateur était donc fondée sur la directive 85/374/CEE du 25 juillet 1985 relative aux produits défectueux. De son côté, la société Ford Italia arguait du fait qu’elle ne pouvait être responsable, car elle n’avait pas fabriqué le véhicule et qu’elle avait, dans la facture, clairement identifié la société Ford WAG comme producteur. L’argument n’a toutefois pas convaincu le tribunal qui, en novembre 2012, a condamné Ford Italia à indemniser la victime, en tant que fournisseur du véhicule. La société a interjeté appel de la décision et, le 21 décembre 2018, la Cour d’appel de Bologne a confirmé la responsabilité de Ford Italia. Cette dernière a formé un pourvoi en cassation. La Cour de cassation italienne s’est toutefois interrogée sur l’interprétation de l’article 3, § 1, de la directive de 1985 relative aux produits défectueux. En effet, cet article prévoit qu’est assimilée au producteur « toute personne qui se présente comme producteur en apposant sur le produit son nom, sa marque ou un autre signe distinctif ». Or, la Cour s’est interrogée sur ce qu’il fallait entendre exactement par l’expression « en apposant son propre nom ». Dans ces conditions, elle a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour de justice de l’Union européenne une question préjudicielle. En substance, la question posée consistait à savoir si, au regard de l’article 3, § 1, de la directive de 1985, le fournisseur qui n’a pas matériellement apposé sur le produit son nom, sa marque ou un autre signe distinctif peut tout de même être assimilé au producteur du seul fait que son nom, sa marque ou un autre signe...

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