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Associations professionnelles de courtiers d’assurance : deux « dés »-agréments illustrant la désagrégation programmée de « l’autorégulation » du courtage d’assurance et de son contrôle

Deux de moins : les associations professionnelles de courtiers d’assurance agréées par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) sont désormais réduites à cinq. À compter du 10 juillet 2025, les courtiers d’assurance auront le choix de satisfaire leur obligation d’adhésion parmi l’une d’entre elles. 

par Laurent Denis, Avocatle 30 avril 2025

Sans surprise, cette réduction prévisible des associations professionnelles agréées était implicitement contenue dans la législation dite « d’autorégulation » du courtage d’assurance, entrée en application le 1er avril 2022 et généralisée le 1er janvier 2023 à tous les courtiers d’assurance. Elle illustre l’une des caractéristiques de cette législation : sa conception bancale. D’autres expressions de ce raté législatif se manifesteront bientôt, en particulier dans le contrôle des intermédiaires d’assurance. « L’autorégulation » du courtage d’assurance n’a pas fini d’exprimer son essence profonde : faire d’associations professionnelles agréées, en nombre minimaliste, des instruments de contrôle des courtiers d’assurance, en substitution de l’ACPR, dans un dispositif global de contrôle mal coordonné.

L’obligation du courtier d’assurance et de ses mandataires d’adhérer à une association professionnelle agréée de courtage d’assurance : l’obligation pour le courtier de se faire « accompagner »

Tout comme certains délinquants ont besoin d’un suivi thérapeutique, notre droit postule que certains intermédiaires ont besoin d’un suivi rapproché. L’adhésion de ces intermédiaires d’assurance à une association professionnelle agréée fait désormais partie de leurs obligations permanentes d’accès et d’exercice de cette activité réglementée.

Depuis le 1er janvier 2023, tous les courtiers d’assurance (sauf, curieusement, ceux qui sont également des établissements de crédit agréés) sont nécessairement membres d’une association professionnelle agréée par l’ACPR (C. assur., art. L. 513-3 s. et R. 513-1 s. ; Loi n° 2021-402 du 8 avr. 2021 relative à la réforme du courtage de l’assurance et du courtage en opérations de banque et en services de paiement et décret n° 2021-1552 du 1er déc. 2021 ; Quinquennat Macron : quelle évolution du droit des assurances ?, Dalloz actualité, 28 mars 2022). Cette obligation d’adhésion concerne également les mandataires de ces courtiers. Les entreprises d’assurance, agréées, ainsi que leurs mandataires, agents ou mandataires non exclusifs, en sont dispensées.

En principe, aucune personne ne peut être tenue d’adhérer à une association (Civ. 1re, 23 févr. 1960, D. 1961. 55 ; Cass., ass. plén., 9 févr. 2001, n° 99-17.642, D. 2001. 1493, et les obs. , note E. Alfandari ; ibid. 2002. 1522, obs. C. Giverdon ; ibid. 2003. 1334, obs. C. Giverdon ; AJDI 2001. 611 ; ibid. 612, obs. C. Giverdon ; Rev. sociétés 2001. 357, note Y. Guyon ). Mais quand la loi l’impose, l’adhésion peut être contrainte (Civ. 3e, 16 juin 2010, n° 09-14.365) ; ceci n’est pas contraire à la liberté d’entreprendre (Cons. const. 21 oct. 2022, n° 2022-1015 QPC, Dalloz actualité, 8 nov. 2022, obs. J. Delayen ; JA 2022, n° 669, p. 11, obs. X. Delpech ; ibid. 2023, n° 673, p. 34, étude S. Damarey ).

L’association professionnelle agréée d’intermédiaires d’assurance prodigue principalement à ses membres des services répondant à certaines de leurs obligations juridiques. La loi retient, maladroitement, le terme « d’accompagnement » pour ces prestations (étymologiquement, des compagnons qui mangent le même pain, Dictionnaire Littré). La loi exclut le terme de contrôle, réservé à ceux effectués par l’ACPR. L’association « vérifie les conditions d’accès et d’exercice » de l’activité des membres. Ainsi, cette association est « […] chargée du suivi de l’activité et de l’accompagnement de ses membres. Cette association professionnelle représentative offre à ses membres un service de médiation, vérifie les conditions d’accès et d’exercice de leur activité ainsi que leur respect des exigences professionnelles et organisationnelles et offre un service d’accompagnement et d’observation de l’activité et des pratiques professionnelles, notamment par la collecte de données statistiques » (C. assur., art. L. 513-3). Les associations peuvent quand même s’enhardir à « formuler à l’intention de leurs membres des recommandations relatives à la fourniture de conseils, aux pratiques de vente et à la prévention des conflits d’intérêts » (C. assur., art. L. 513-5, II), autant de sujets dont la loi ne leur confie pas le suivi.

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