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Audience correctionnelle : lorsque le droit au silence a été notifié, inutile de se répéter

Le jugement constatant la notification du droit au silence fait foi jusqu’à inscription de faux. Cette notification n’a pas à être renouvelée lorsque l’affaire a été renvoyée à une audience ultérieure.

par David Pamart, Magistratle 18 juin 2025

Condamnés par le tribunal correctionnel des chefs de corruption passive et active, des prévenus interjettent appel de cette décision. Appelé à l’audience du 7 septembre 2023 devant la cour d’appel, le dossier est renvoyé, à la demande d’une partie, à l’audience du 2 novembre 2023. Lors de cette seconde audience, la cour d’appel confirme la condamnation des intéressés.

L’un des prévenus forme un pourvoi en cassation, arguant une absence de notification du droit au silence lors de la première audience ainsi que, à supposer qu’elle ait eu lieu, l’absence de renouvellement de cette information à la seconde audience.

Le droit de se taire, l’exigence d’une notification avant toute prise de parole

Reconnus de longue date par la Cour européenne des droits de l’homme comme consubstantiels au procès équitable (CEDH 25 févr. 1993, Funke c/ France, n° 10828/84, § 44, AJDA 1993. 483, chron. J.-F. Flauss ; D. 1993. 457 , note J. Pannier ; ibid. 387, obs. J.-F. Renucci ; RFDA 1994. 1182, chron. C. Giakoumopoulos, M. Keller, H. Labayle et F. Sudre ; RSC 1993. 581, obs. L.-E. Pettiti ; ibid. 1994. 362, obs. R. Koering-Joulin ; ibid. 537, obs. D. Viriot-Barrial ; 29 juin 2007, O’Halloran et Francis c/ Royaume-Uni [GC], n° 15809/02, § 45, Rev. UE 2015. 353, étude M. Mezaguer ; Dr. pénal 2008. 35 obs. E. Dreyer ; JCP 2008. I. 110, n° 6, obs. F. Sudre ; RTDH 2009. 763, obs. C. Savonet), le droit de se taire et le droit de ne pas contribuer à sa propre incrimination sont conçus principalement comme une protection contre l’obtention de preuves par coercition ou oppression. Avant d’être consacrée par l’article préliminaire du code de procédure pénale, l’absence de notification du « droit de se taire » était déjà largement sanctionnée en droit interne, aussi bien au cours de l’enquête (Crim. 14 mai 2014, n° 13-82.274) que dans le cadre du contentieux de la détention provisoire (Crim. 24 févr. 2021, n° 20-86.537, Dalloz actualité, 15 mars 2021, obs. M. Recotillet ; D. 2021. 426 ; AJ pénal 2021. 269, obs. G. Courvoisier-Clément ; ibid. 167 et les obs. ; RSC 2021. 448, obs. J.-P. Valat ; RSC 2021. 448, obs. J.-P. Valat) ou encore devant la chambre de l’instruction (Crim. 14 mai 2019, n° 19-81.408, Dalloz actualité, 6 juin 2019, obs. S. Fucini ; D. 2019. 1050 ; AJ pénal 2019. 390, obs. D. Miranda ). La jurisprudence de la Cour de cassation lie donc la notification du droit au silence, moins à l’existence d’une contrainte abusive, qu’à la possible influence des déclarations faites sur l’appréciation de la culpabilité. Le droit de se taire doit alors être notifié dès que le justiciable se trouve dans une situation pouvant l’amener à s’auto-incriminer. C’est particulièrement vrai lorsque l’objet de la comparution dans le cadre de laquelle sont faites ces déclarations implique une appréciation des charges retenues contre lui.

Applicable devant la cour d’appel en vertu de l’article 512 du code de procédure pénale, l’article 406 dispose que le prévenu doit être informé de son droit de se taire après la constatation de son identité et l’indication de l’acte qui saisit la juridiction (Crim. 8 juill. 2015, n° 14-85.699, Dalloz actualité, 29 juill. 2015, obs. L. Priou-Alibert ; D. 2015. 1600 ; AJ pénal 2015. 555, obs. C. Porteron ; Procédures 2015, n° 307, note A.-S. Chavent-Leclère ; Dr. pénal 2015, n° 132, note A. Maron et M. Haas).

Le droit de se taire doit être notifié dès l’ouverture des débats, étant précisé que les débats débutent dès l’instant où il a été donné connaissance de l’acte de saisine de la juridiction. Dès cet instant, l’atteinte aux intérêts du prévenu est caractérisée lorsqu’il prend la parole avant de...

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