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Aveu judiciaire : le fait, pas le droit

L’aveu judiciaire ou extrajudiciaire ne produit des conséquences juridiques contre son auteur que si sa volonté de reconnaître un fait est non équivoque et que cette reconnaissance porte sur un fait et non sur une appréciation en droit du contenu du préjudice indemnisable.

L’aveu judiciaire est une déclaration qui émane d’une des parties à l’instance ou de son représentant. Si la déclaration est faite par un tiers, elle ne constitue pas un aveu, mais un témoignage. Pour exister, et produire des conséquences juridiques, l’aveu doit satisfaire trois conditions. D’abord, la déclaration doit être de nature à favoriser la partie adverse. Ensuite, elle doit résulter de la volonté non équivoque de son auteur. Enfin, elle doit porter sur un fait et non sur des points juridiques. Cette dernière condition s’évince de la règle jura novit curia qui signifie que le droit est l’affaire du juge et ne doit pas être prouvé par les parties. Ce principe trouve sa source dans les articles 9 et 12 du code de procédure civile.

L’arrêt du 8 décembre 2022 rendu par la deuxième chambre civile est un exemple de son application.

En l’espèce, lors d’une séance d’entraînement dans un club de motocyclisme, un participant a été percuté par une motocyclette. Il a été victime d’une atteinte corporelle et psychique. Le conducteur du véhicule a été déclaré entièrement responsable du dommage et, par l’intermédiaire de sa mère puisqu’il était mineur au moment des faits, a été condamné à indemniser la victime intégralement par jugement confirmé le 13 mars 2012.

À la suite de cet accident, la victime a fait construire une maison d’habitation dont la surface a été adaptée à son handicap et dont l’édification s’est achevée en juillet 2014.

Par un arrêt confirmatif du 19 décembre 2018, l’auteur du fait dommageable et son assureur ont été condamnés in solidum au paiement de diverses sommes au titre de la réparation des préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux de la victime à l’exception du poste relatif à cette adaptation du logement pour lequel une mesure d’instruction a été ordonnée.

Par un jugement du 20 mars 2019, l’auteur du fait dommageable et son assureur ont été condamnés in solidum à payer 105 170,94 € au titre des frais du logement adapté. La victime a interjeté appel contre cette décision. La cour d’appel, qui l’a confirmée en limitant l’indemnisation au surcoût du logement adapté et l’a infirmée pour le surplus, les a condamnés à payer 68 488,72 € « de surfaces supplémentaires » et 24 817,20 € au titre des frais d’adaptation du logement.

La victime s’est pourvue en cassation contre cet arrêt auquel elle reproche d’avoir retenu l’existence d’un aveu judiciaire de sa part. Selon le pourvoi, la cour d’appel n’aurait pas dû fixer le préjudice subi du fait de la nécessité de vivre dans un logement adapté à son handicap à certaines sommes au motif que la victime aurait admis, à plusieurs reprises, que l’indemnisation doit correspondre au surcoût résultant des surfaces complémentaires et des aménagements spécifiques et non à l’ensemble du logement, lui interdisant donc de demander, devant la cour d’appel, une indemnisation au titre des frais de logement adapté incluant le coût de la construction de son logement adapté.

Selon l’argument du pourvoi, l’aveu judiciaire ne peut porter que sur un point de fait et non sur un point de...

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