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Bail commercial : procédure en annulation du congé et recevabilité de la demande d’expertise in futurum

Une instance, relative à la seule annulation d’un congé refusant le renouvellement d’un bail commercial et offrant le paiement d’une indemnité d’éviction, ne fait pas obstacle à une demande d’expertise fondée sur l’article 145 du code de procédure civile, avant tout procès, destinée au recueil des éléments de preuve nécessaires à l’évaluation et à la fixation des indemnités d’éviction et d’occupation, dont le juge du fond n’a pas été saisi.

Le statut des baux commerciaux offre au locataire la propriété commerciale, laquelle s’entend du droit au renouvellement du bail commercial consacré par les articles L. 145-8 à L. 145-30 du code de commerce (Civ. 3e, 11 mars 2021, n° 20-13.639, Dalloz actualité, 1er avr. 2021, obs. S. Andjechaïri-Tribillac ; D. 2021. 573 ; ibid. 1509, obs. Y. Strickler et N. Reboul-Maupin ; RTD civ. 2021. 435, obs. P.-Y. Gautier ; RTD com. 2021. 297, obs. F. Kendérian ; Loyers et copr. 2021. Repère 4 , obs. J. Monéger ; JCP E 2021. 1481, n° 25 ; Lexbase hebdo – éd. affaires, n° 672, 8 avr. 2021, obs. B. Brignon ; Rev. loyers 2021. 224 , obs. C. Lebel), qui est d’ordre public (C. com., art. L. 145-15).

Le bailleur a néanmoins la faculté, sous certaines réserves, de refuser le renouvellement  en offrant au locataire évincé le paiement d’une indemnité d’éviction. Cette indemnité d’éviction, qui s’entend comme une indemnité conférée par un bailleur à son locataire lorsque celui-ci choisit de ne pas renouveler le bail commercial, est une compensation au refus de renouvellement du bail (C. com., art. L. 145-14). En effet, du fait du refus de renouvellement du bail, le locataire subit la perte de son fonds de commerce ou du bail lui-même, lesquels sont des biens patrimoniaux dont la valorisation doit être faite. Sauf exceptions mentionnées aux articles L. 145-17 et suivants du code de commerce, le locataire évincé, qui remplit les conditions légales inhérentes au droit au renouvellement (Civ. 3e, 18 mai 2005, n° 04-11.985, D. 2005. 1554 , obs. Y. Rouquet ; AJDI 2005. 733, obs. J.-P. Blatter ; RJDA 2005, n° 940 ; JCP E 2005. 1733, n° 11, obs. H. Kenfack), doit être dédommagé de l’entier préjudice subi par la perte de son droit d’exploitation sur le bien loué, c’est-à-dire que l’indemnité d’éviction répare le préjudice issu de la privation du local et couvre, le cas échéant, les frais liés au changement de local.

Impact économique

Il convient donc de mesurer l’impact économique du refus de renouvellement. Pour ce faire, l’indemnité d’éviction peut être librement fixée « à l’amiable » entre les parties. Cependant, il n’est pas toujours aisé d’évaluer avec précision le préjudice ainsi que les retombées financières. Du fait que les mésententes sont légion en la matière, l’indemnité d’éviction est le plus souvent en pratique fixée par un expert choisi par les parties contractantes. Toutefois, en l’absence d’accord des parties, l’indemnité d’éviction est fixée par le juge qui peut avoir recours à la désignation d’un expert judiciaire.

Demande d’expertise en référé

Une question demeure néanmoins. Une demande d’expertise en référé tendant à voir évaluer les montants des indemnités d’éviction et d’occupation est-elle recevable lorsqu’une procédure en annulation d’un congé délivré avec offre du paiement d’une indemnité d’éviction est en cours devant le juge judiciaire ?

C’est à cette question à laquelle la Cour de cassation a été amenée à répondre dans l’arrêt du 6 avril 2023 sous étude.

En l’espèce, une bailleresse a notifié à sa locataire un congé avec refus de renouvellement du bail commercial et offre de paiement d’une indemnité d’éviction.

La locataire a engagé une procédure en annulation du congé.

Alors qu’une procédure en annulation du congé est en cours, la...

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