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Budget 2019 : en attendant une loi spécifique pour les collectivités locales

Les lois de finances connaissent chaque année un parcours tumultueux mais celle de 2019 n’aura pas été marquée par le seul échec de la commission mixte paritaire. Le mouvement « Gilets jaunes » a fait fléchir le gouvernement sur la fiscalité écologique.

par Jean-Marc Pastorle 7 janvier 2019

Si, sur les finances locales, une réforme est promise dans un projet de loi spécifique cette année, la loi de finances 2019 porte, elle, la marque de la stabilité des dotations (26,9 milliards d’euros comme en 2018) et de la réforme de la dotation d’intercommunalité. L’exonération de taxe d’habitation concernant 550 000 personnes a ainsi été reconduite et le gouvernement est revenu sur la minoration de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). Intégrée aux variables d’ajustement dans la loi de finances pour 2018, elle aurait dû causer une perte de plusieurs millions pour de nombreuses intercommunalités. Par une circulaire du 26 mars dernier, le gouvernement avait suspendu sa mise en œuvre. Pour 2019, cette minoration est supprimée pour les EPCI mais aussi, dans un souci d’équité, pour les communes.

La dotation globale de fonctionnement (DGF) inclut, à compter de 2019, les surfaces des sites Natura 2000. Ce verdissement bénéficiera aux communes de moins de 10 000 habitants dont les ressources financières ne dépassent pas un certain niveau et qui sont couvertes à plus de 75 % par un site Natura 2000. La taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) est également aménagée. Dorénavant, les communes et EPCI à fiscalité propre supporteront tout dégrèvement faisant suite à une décision de justice fondée sur l’inadéquation de la taxe avec le coût de la collecte des déchets. Par ailleurs, pour favoriser l’institution par les collectivités territoriales de la part incitative de la TEOM, la diminution des frais de gestion perçus par l’État prévue dans le projet de loi initial – de 8 % à 3 % – a été étendue aux cinq premières années (contre les trois premières, initialement) au cours desquelles est mise en œuvre la tarification incitative.

En dépit de l’échec de la commission mixte paritaire, les députés ont intégré des modifications proposées par le Sénat : prolongation du pacte de stabilité financière en faveur des communes nouvelles ; composition du comité des finances locales ; maintien de la taxe sur les friches commerciales. S’agissant de la prise en compte des redevances d’eau et d’assainissement dans le calcul du coefficient d’intégration fiscale (CIF) des communautés de communes, les députés ont accepté de repousser de 2020 à 2026 l’intégration des redevances eau et assainissement dans le CIF des communautés de communes. La possibilité pour les EPCI d’arrêter le produit de la taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations dans les mêmes conditions que pour les autres impositions locales, soit jusqu’au 15 avril de l’année d’imposition, est également conservée.

Gel de la hausse des taxes sur les carburants

La loi de finances fige les tarifs des taxes intérieures de consommation impactées par la taxe carbone à leurs niveaux de 2018, tout en supprimant la trajectoire de ces taxes jusqu’en 2022. Initialement, le texte prévoyait une hausse de 3 centimes sur l’essence et 6 centimes sur le gazole, et au total, d’ici à 2022, de 10 centimes sur l’essence et 19 centimes sur le gazole. La hausse de la contribution climat énergie est également gelée avec un taux maintenu au niveau de 2018, soit 44,6 € la tonne de carbone. L’Assemblée nationale a également avancé l’entrée en vigueur de l’exonération des aides aux transports mises en place par des collectivités territoriales, dès l’imposition des revenus de l’année 2018, en lieu et place de l’entrée en vigueur au 1er janvier 2020 prévue initialement. Sur le covoiturage, la loi de finances pour 2019 anticipe le projet de loi d’orientation des mobilités. Elle exonère d’impôt sur le revenu et de cotisations et contributions sociales, dans la limite de 240 € par an (soit 20 € par mois), les aides versées, en l’absence de prise en charge par l’employeur des titres d’abonnements de transports publics, par les collectivités territoriales.

Parmi les mesures nouvelles, finalement supprimées par les députés, on retiendra l’ouverture au mécénat des versements opérés à des sociétés publiques locales, la mise en place d’une procédure de remboursement partiel de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques pour les services départementaux d’incendie et de secours ou encore, l’article introduit par le Sénat qui visait à rendre éligibles au fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée les dépenses réalisées par les collectivités territoriales au titre d’une fraction des loyers versés pour une location longue durée d’un véhicule.

Censure partielle du Conseil constitutionnel

Dans sa décision n° 2018-777 DC, le Conseil constitutionnel a censuré diverses mesures concernant les collectivités territoriales. Ayant le caractère de « cavaliers » ou ayant été adoptés en méconnaissance de la règle dite de l’entonnoir, ont été censurés les articles 29 (possibilité pour les gestionnaires du domaine public portuaire d’instaurer une majoration de redevance en cas d’occupation irrégulière), 221 (rapport du gouvernement au Parlement dressant le bilan de la mise en œuvre du plan « préfectures nouvelle génération ») et 251 (information des collectivités territoriales sur les motifs d’évolution des attributions individuelles des composantes de la DGF). Ont également été partiellement censurées les dispositions de l’article 81 relatives aux conditions de résidence des étrangers non communautaires pour bénéficier du revenu de solidarité active (RSA) en Guyane. Le Conseil constitutionnel a annulé la disposition portant la durée minimale de résidence d’un étranger en situation régulière en Guyane de cinq à quinze ans pour accéder au RSA. Il a relevé que les dispositions en cause instituent une différence de traitement, pour l’obtention du revenu de solidarité active, entre les étrangers résidant en Guyane et ceux résidant sur d’autres parties du territoire de la République.