Accueil
Le quotidien du droit en ligne
-A+A
Article

À Calais, condamnation des arrêtés anti-repas et des passeurs réfugiés

Les tribunal administratif de Lille et le Conseil d’État ont rendu deux décisions qui touchent les personnes exilées à Calais. Le premier juge illégaux les arrêtés préfectoraux « anti-repas » et le second a entériné l’interprétation extensive du dispositif de retrait de la protection subsidiaire aux ressortissants condamnés pour des faits délictueux.

Saisi par plus d’une dizaine d’associations dès octobre 2020, le tribunal administratif de Lille s’est enfin prononcé au fond, le 12 octobre dernier, sur la légalité des arrêtés préfectoraux interdisant les distributions gratuites de boissons et de denrées alimentaires dans certaines zones définies du centre-ville de Calais.

Depuis le démantèlement officiel du camp de migrants et de réfugiés installé sur le terrain de « la Lande » à Calais en 2020, les autorités tentent de lutter contre tout nouveau phénomène de sédentarisation des exilés, alors même que leur nombre ne cesse d’augmenter, rendant le dispositif d’accueil et de prise en charge mis en place par l’État insuffisant pour couvrir l’intégralité des besoins sanitaires. Aujourd’hui, la commune de Calais accueillerait entre 1 000 et 1 500 exilés, dont une partie qui s’est installée dans le centre-ville, à la suite d’une opération d’évacuation des campements de fortune installés dans la zone industrielle des Dunes. Cette situation, qui a conduit à un doublement de la population présente à Calais et vivant dans des conditions de grande précarité, a mécaniquement contraint le tissu associatif local à décupler leurs dispositifs de distribution d’aide alimentaire. Les services de l’État se sont quant à eux vus contraints par la justice, dès 2017, de mettre à disposition des points d’eau, des toilettes, et un réseau de distribution alimentaire.

Mais dès septembre 2020, et sur demande du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, le préfet du Pas-de-Calais a, par plusieurs arrêtés successifs, réglementé et interdit, dans plusieurs zones de la ville, la distribution gratuite de boissons et de denrées alimentaires par les associations, en raison du trouble à l’ordre public résultant de la prolifération des déchets en centre-ville, et aux risques sanitaires liés au covid-19. Par une ordonnance rendue en 2020, le tribunal administratif de Lille avait alors rejeté, pour défaut d’urgence, la demande de suspension de ces arrêtés préfectoraux (v. T. Bigot, ;Rejet du recours contre l’arrêté « anti-repas » à Calais, Dalloz actualité, 24 sept. 2020).

Les arrêtés préfectoraux « anti-repas » grignotés par le juge administratif

Saisi au fond, le tribunal commence par rappeler que lorsque le juge de l’excès de pouvoir examine, dans le cadre du contrôle de proportionnalité, la légalité d’une mesure de police, il « examine successivement si la mesure en cause est adaptée, nécessaire et proportionnée à la finalité qu’elle poursuit » (CE...

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :