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Cession isolée des actifs du débiteur en liquidation judiciaire : respect de la clause d’agrément

En cas de liquidation judiciaire, la cession du droit au bail, seule ou même incluse dans celle du fonds de commerce du débiteur, autorisée par le juge-commissaire, se fait aux conditions prévues par le contrat à la date du jugement d’ouverture. Le bailleur est donc fondé à se prévaloir de la clause du bail prévoyant l’agrément du cessionnaire.

Lorsqu’elle est de nature à garantir ses intérêts, la vente de gré à gré des biens meubles du débiteur en liquidation judiciaire peut être autorisée par le juge-commissaire (C. com., art. L. 642-19). Cette vente obéit à un régime hybride (B. Soinne, M. Menjucq et B. Saintourens, Traité des procédures collectives, LGDJ, 2021, n° 2148). Bien qu’il s’agisse d’une vente d’« autorité de justice », comme l’a récemment rappelé la Cour de cassation pour interdire au locataire d’exercer son droit de préemption à l’occasion de la vente de l’immeuble d’un bailleur en liquidation judiciaire (Civ. 3e, 15 févr. 2023, n°Â 21-16.475, D. 2023. 340 ), il n’en demeure pas moins qu’elle relève en principe du droit commun et suppose, lorsqu’elle porte sur un bail, le respect des clauses du bail (à l’exception de la clause imposant au cédant des obligations solidaires avec le cessionnaire). C’est de l’une de ces clauses dont se prévalait en l’espèce le bailleur des locaux exploités par une société en liquidation judiciaire, pour s’opposer à la décision ayant autorisé la cession de gré à gré du fonds de commerce et celle du bail. Le juge-commissaire les avait autorisées sans faire application d’une clause du bail subordonnant la cession du bail à l’agrément du bailleur. Cette cession lui paraissait d’autant plus injustifiée que, dans les semaines qui ont précédé, il avait demandé la résiliation du bail.

Les juges du fond ont pourtant déclaré irrecevable sa demande de résiliation et confirmé l’ordonnance autorisant la cession du fonds et du bail en privilégiant une interprétation littérale et stricte de la clause exigeant l’agrément du bailleur pour « toute cession du bail », clause qui, selon la Cour d’appel de Paris, ne s’appliquerait pas en cas de cession de fonds de commerce. L’arrêt est censuré par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 19 avril 2023 qui refuse de distinguer selon que le bail est cédé seul ou avec le fonds de commerce.

En ordonnant la cession du fonds de commerce et du bail, le juge-commissaire n’avait pas fait application de la clause d’agrément. Pourquoi s’en était-il dispensé ?

Clause d’agrément et article L. 145-16 du code de commerce

La clause a-t-elle été écartée parce qu’elle était contraire aux dispositions de l’article L. 145-16 du code de commerce qui répute non écrites, quelle qu’en soit la forme, les conventions tendant à interdire au locataire de céder son bail à l’acquéreur de son fonds de commerce ? Cela ne semble pas être le cas. Il s’agissait en l’espèce d’une clause d’agrément, d’usage courant dans les baux commerciaux, qui échappe à la sanction dès lors qu’elle n’est pas prohibitive, mais qu’elle vient seulement encadrer la cession (v. not., Civ. 3e, 2 oct. 2002, n° 01-02.035, D. 2002. 2943 , obs. Y. Rouquet ; AJDI 2003. 30 , obs. M.-P. Dumont ).

Clause d’agrément et article L. 642-19 du code de commerce

La clause a-t-elle alors été écartée parce que le texte de l’article L. 642-19 du code de commerce prévoit que le juge-commissaire autorise la vente, « aux prix et conditions qu’il détermine » ?

Le doute était permis....

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