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La cession rendue opposable au bailleur prive d’effet le congé pour âge

Le congé pour âge est privé d’effet par la cession du bail rendue opposable au bailleur dans les conditions de l’article 1216 du code civil.

La nécessité de concilier le caractère intuitu personae du bail rural, avec celle de « préserver le caractère familial » que peut revêtir l’exploitation (L. Lorvellec, Le bail rural, contrat familial, in Transmettre, hériter, succéder, PUL, 1992, p. 55 s.) a conduit le législateur à poser des tempéraments au principe de l’incessibilité du bail rural. L’un d’eux concerne la cession du bail par le preneur, évincé en raison de son âge, à son conjoint, son partenaire ou l’un de ses descendants (C. rur., art. L. 411-64 ; v. égal., C. rur., art. L. 411-35).

Dans cette hypothèse, quel est alors le sort du congé, lorsque la cession a été initiée avant la date d’effet de ce dernier, mais qu’elle a été réalisée et rendue opposable bien après ?

Telle était la question soulevée dans l’arrêt de l’espèce.

Un preneur, proche de la retraite, a saisi la juridiction compétente afin d’être autorisé à céder son bail rural à son fils. Trois mois plus tard, il reçoit un congé pour âge. Il demande alors au tribunal d’annuler le congé et de surseoir à statuer en attendant la décision relative à la cession. Celle-ci ayant été autorisée, elle est réalisée puis notifiée aux trois indivisaires, ayants droit du bailleur décédé. L’un d’eux, agissant pour son seul compte, poursuit l’action en nullité intentée contre son auteur et demande la validation du congé puis, dans une autre instance jointe en appel, la nullité de l’acte de cession, la résiliation du bail et l’expulsion de l’occupant. La coïndivisaire, déboutée de ses demandes, s’est pourvue en cassation. Elle a reproché à la cour d’appel, premièrement, d’avoir considéré que ses demandes relatives à la cession ne constituaient pas des mesures conservatoires, de sorte que, faute pour elle de justifier des deux tiers des trois indivis, elles étaient irrecevables et, secondement, d’avoir annulé le congé au motif que son auteur l’avait délivré postérieurement à la cession, celle-ci prenant effet rétroactivement au jour de la demande d’autorisation.

Pour motiver le rejet du pourvoi, la Cour de cassation énonce que la cour d’appel a d’une part, exactement déduit des demandes de la requérante que ces dernières n’étaient pas conservatoires au sens de l’article 815-2 du code civil et, d’autre part, à bon droit, déduit de la notification de la cession du bail aux coïndivisaires que le congé pour âge devait être annulé.

Par cet arrêt, la Haute juridiction confirme d’abord que la demande dont l’« objet premier était de contester la cession du bail et d’obtenir sa résiliation » n’est pas conservatoire. En effet, de façon constante, la Haute juridiction rattache une telle demande aux actes d’administration relevant de l’exploitation normale du bien indivis (v. Civ. 1re, 27 mai 2010, n° 09-10.758, AJDI 2010. 562 , pour la nullité d’une cession de bail rural ; Civ. 3e, 29 juin 2011, n° 09-70.894, Dalloz actualité, 28 juill. 2011, obs. S. Prigent ; AJ fam. 2011. 500, obs. C. Vernières ; 5 oct. 2017, n° 16-21.499, Dalloz actualité, 18 oct. 2017, obs. M. Kebir ; D. 2017. 2029 ; ibid. 2018. 1458, obs. J.-J. Lemouland et D. Noguéro ; AJDI 2018. 48 , obs. S. Prigent ; AJ fam. 2017. 593, obs. É. Pecqueur , pour l’action en résiliation). Aussi, pour être recevable, la demande requérait deux tiers des droits indivis (C. civ., art. 815-3). Cette jurisprudence s’explique au regard de l’objet de la mesure conservatoire : « remédier...

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