Accueil
Le quotidien du droit en ligne
-A+A
Article

Les clauses de parité tarifaire devant la Cour de justice de l’Union européenne

La Cour de justice de l’Union européenne, saisie d’une double question préjudicielle dans un litige opposant une plateforme de réservation hôtelière en ligne à des prestataires d’hébergement allemands, l’une sur la licéité des clauses de parité au sens de l’article 101, § 1, du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, l’autre sur la définition du marché pertinent pour bénéficier du règlement d’exemption catégorielle sur les accords verticaux, répond, d’une part, que les clauses de parité (élargies ou restreintes) ne peuvent être considérées comme des restrictions « accessoires » et, d’autre part, que la délimitation du marché nécessite une analyse concrète pour apprécier le degré de substituabilité tant du côté de l’offre que de la demande.

Dans le cadre d’un litige qui oppose Booking, plateforme de réservation hôtelière en ligne (OTA), à plus d’une soixantaine d’hôteliers allemands au sujet des fameuses clauses de parité tarifaire, le Tribunal d’Amsterdam a, par une décision du 22 février 2023, sursis à statuer pour poser deux questions préjudicielles à la Cour de justice. D’une part, les clauses de parité étendues et restreintes doivent-elles être qualifiées de restriction accessoire aux fins d’application de l’article 101, § 1, du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ? D’autre part, dans le cadre de l’application du règlement (UE) n° 330/2010 du 20 avril 2010, comment le marché en cause doit-il être défini lorsque les transactions sont conclues par l’intermédiaire d’une plateforme de réservation en ligne sur laquelle des établissements d’hébergement peuvent offrir des chambres, et entrer en contact avec des voyageurs qui peuvent réserver une chambre par l’intermédiaire de ladite plateforme ?

Avant de commenter stricto sensu la décision, il convient de rappeler en quoi consiste l’opération et ce qu’est la clause de parité tarifaire. L’opération consiste à mettre en relation les consommateurs, en aval, avec les prestataires d’hébergement, en amont, au moyen de leur référencement sur le site de la plateforme de réservation. Chaque réservation fait l’objet du versement d’une commission par le prestataire d’hébergement au profit de la plateforme. La clause de parité tarifaire, quant à elle, consiste à imposer à l’hôtelier de garantir à la plateforme des prix plus compétitifs que ceux qui sont proposés aux concurrents. Elle est dite « étendue » lorsqu’elle couvre l’intégralité des canaux de commercialisation ; elle est dite « restreinte » lorsqu’elle interdit seulement à l’hôtelier de proposer des prix plus attractifs sur ses propres canaux (généralement sur son propre site internet). La clause de parité étendue avait suscité des préoccupations concurrentielles de la part des autorités françaises, italiennes et suédoises. Elles avaient ainsi obtenu de Booking qu’elle soit supprimée dans ses conditions générales de service. En revanche, bien que les autorités aient estimé, notamment l’Autorité française de concurrence (Aut. conc. 21 avr. 2015, n° 15-D-06, D. 2016. 964, obs. D. Ferrier ; JT 2015, n° 175, p. 8, obs. S. Zouag ; ibid., n° 176, p. 11, obs. X. Delpech ), que la clause de parité restreinte ne posait aucune préoccupation de concurrence, et bien qu’elle pût être condamnée sur le fondement du droit des pratiques commerciales déloyales inter-entreprises (CEPC, avis n° 13-10, 16 sept. 2013 ; Paris, pôle 5 - ch. 4, 21 juin 2017, n° 15/18784, D. 2018. 966, obs. S. Clavel et F. Jault-Seseke ; AJ contrat 2017. 388, obs. V....

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :