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La compétence du juge judiciaire à la suite d’un PSE annulé

Si, en cas de contestation sérieuse portant sur la légalité d’un acte administratif, les tribunaux de l’ordre judiciaire statuant en matière civile doivent surseoir à statuer jusqu’à ce que la question préjudicielle de la légalité de cet acte soit tranchée par la juridiction administrative, il en va autrement lorsqu’il apparaît manifestement, au vu d’une jurisprudence établie, que la contestation peut être accueillie par le juge saisi au principal.

L’annulation d’une décision de validation ou d’homologation d’un plan de sauvegarde de l’emploi entraîne, par voie de conséquence, l’illégalité des autorisations de licenciement accordées, à la suite de cette validation ou de cette homologation, et ouvre la possibilité au juge judiciaire de se prononcer sur la cause réelle et sérieuse des licenciements litigieux.

La compétence du juge judiciaire en matière de PSE est un sujet délicat ayant nourri un contentieux important, dont le dénouement s’opère au prisme d’une répartition des compétences entre l’autorité administrative et l’appréciation de la légalité de ses décisions, relevant schématiquement du juge administratif, et l’appréciation des conséquences indemnitaires, relevant du juge judiciaire (il appartient exclusivement au juge administratif de se prononcer sur la légalité des décisions prises par l’autorité administrative dans l’exercice des compétences qui lui sont reconnues (T. confl. 17 oct. 2011, SCEA du Chéneau, n° 3828, Dalloz actualité, 31 oct. 2011, obs. R. Grand ; Lebon ; AJDA 2012. 27 , chron. M. Guyomar et X. Domino ; ibid. 2011. 2041 ; D. 2011. 3046, et les obs. , note F. Donnat ; ibid. 2012. 244, obs. N. Fricero ; RFDA 2011. 1122, concl. J.-D. Sarcelet ; ibid. 1129, note B. Seiller ; ibid. 1136, note A. Roblot-Troizier ; ibid. 2012. 339, étude J.-L. Mestre ; ibid. 377, chron. L. Clément-Wilz, F. Martucci et C. Mayeur-Carpentier ; Constitutions 2012. 294, obs. A. Levade ; RTD civ. 2011. 735, obs. P. Remy-Corlay ; RTD eur. 2012. 135, étude D. Ritleng ). Il a ainsi été récemment jugé que le juge judiciaire ne peut, face à une autorisation administrative de licenciement pour inaptitude d’un salarié protégé, apprécier la régularité de la procédure d’inaptitude, le respect par l’employeur de son obligation de reclassement et le caractère réel et sérieux du licenciement, mais peut rechercher si l’inaptitude du salarié avait une origine professionnelle et accorder les indemnités spéciales prévues par le code du travail (Soc. 11 sept. 2019, n° 17-31.321, D. 2019. 1767 ). Mais il a aussi été jugé que si le juge judiciaire doit en principe surseoir à statuer, il en va autrement lorsqu’il apparaît manifestement, au vu d’une jurisprudence établie, que la contestation peut être accueillie par le juge saisi au principal (ibid.). Mais qu’en est-il lorsque les licenciements litigieux reposaient sur un PSE annulé par l’autorité administrative ? C’est sur cette hypothèse que l’arrêt du 1er juin 2023 rendu par la chambre sociale apporte des éclaircissements.

En l’espèce, une société appartenant à un groupe s’est vue placée en redressement judiciaire, ensuite converti en liquidation judiciaire. Le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) a dans ce contexte homologué le document unilatéral arrêtant le plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) qui lui était soumis par les mandataires judiciaires. Ces derniers ont ensuite notifié aux salariés protégés leur licenciement pour motif économique, le 8 avril 2014, après autorisation de l’inspection du travail.

Une cour administrative d’appel a ensuite annulé le jugement du tribunal administratif et la décision de la DIRECCTE, avant que les recours formés à l’encontre de cette décision ne soient eux-mêmes rejetés par arrêt du Conseil d’État.

Plusieurs salariés ayant exercé des mandats représentatifs au sein de la société concernée ont ensuite saisi la juridiction prud’homale en contestation du bien-fondé de leur licenciement, puis en reconnaissance de la qualité de co-employeurs des sociétés mères successives du groupe et, subsidiairement, en responsabilité extracontractuelle.

Les juges du fond accueillirent les demandes des salariés et condamnèrent in solidum les...

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