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La condition de représentativité pour désigner un défenseur syndical est inconstitutionnelle

Le critère de représentativité exigé d’un syndicat pour désigner un défenseur syndical méconnaît le principe d’égalité devant la loi, décide le Conseil constitutionnel à la faveur d’une question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la Confédération nationale des travailleurs-Solidarité ouvrière (CNT-SO).

Sont contraires à la Constitution les mots « représentatives au niveau national et interprofessionnel, national et multiprofessionnel ou dans au moins une branche » figurant au deuxième alinéa de l’article L. 1453-4 du code du travail. Telle est la solution posée par le Conseil constitutionnel dans une décision du 14 septembre 2021.

Des propositions de candidature écartées faute de représentativité

Le Conseil répond favorablement à une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) soulevée par la Confédération nationale des travailleurs-Solidarité ouvrière (CNT-SO) dans le cadre de sa demande au juge administratif de Montreuil d’annuler la décision de la DREETS d’Île-de-France (ex-Direccte) déclarant irrecevable ses propositions de candidature à la fonction de défenseur syndical faute de représentativité.

L’article L. 1453-4, alinéa 2, du code du travail prévoit que le défenseur syndical est inscrit sur une liste arrêtée par l’autorité administrative et sur proposition des organisations d’employeurs et de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel, national et multiprofessionnel ou dans au moins une branche. En d’autres termes, seuls les syndicats ayant obtenu au moins 8 % des voix à ces élections (C. trav., art. L. 2122-9) ont la possibilité de proposer une liste de défenseurs syndicaux. Les organisations syndicales ayant une audience plus restreinte sont exclues de ce processus de désignation. La CNT-SO, dont les audiences se situent sous ce seuil de 8 %, soutient que cette condition représentativité méconnaît le principe constitutionnel d’égalité devant la loi.

Représentativité ne veut pas dire aptitude à designer des candidats compétents

Après avoir considéré qu’en adoptant ces dispositions relatives aux conditions de désignation des défenseurs syndicaux, le législateur a entendu améliorer l’efficacité et la qualité de la justice prud’homale, le Conseil souligne que l’audience électorale d’une organisation syndicale ne traduit pas sa capacité à désigner des candidats aptes à assurer l’assistance et la représentation des salariés en justice. Dès lors, la différence de traitement établie entre les organisations syndicales représentatives et les autres organisations syndicales est contraire à la Constitution car elle n’est pas justifiée par un motif d’intérêt général et est sans rapport avec l’objet de la loi.

Une déclaration d’inconstitutionnalité avec effet immédiat

En conséquence, sont déclarés contraires à la Constitution les mots « représentatives au niveau national et interprofessionnel, national et multiprofessionnel ou dans au moins une branche » figurant au deuxième alinéa de l’article L. 1453-4 du code du travail. La déclaration d’inconstitutionnalité étant d’application immédiate, elle s’applique à toutes les affaires non jugées définitivement au 16 septembre 2021, date de publication de la QPC.

Une solution conforme à la jurisprudence du Conseil constitutionnel

Il s’agit d’une solution logique du Conseil constitutionnel, lequel avait déjà estimé dans une décision n° 2020-860 QPC du 15 octobre 2020 contraire à la Constitution l’impossibilité pour les organisations syndicales non représentatives d’assister un fonctionnaire au cours d’une procédure de rupture conventionnelle (Cons. const. 15 oct. 2020, n° 2020-860 QPC, Syndicat des agrégés de l’enseignement supérieur et Syndicat national des collèges et des lycées, AJDA 2021. 468 , note F.-X. Fort ; ibid. 2020. 1993 ; AJFP 2021. 44, et les obs. ; AJCT 2021. 103, obs. O. Didriche ).