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Conditions d’injonction à une personne publique de mettre fin à un comportement dommageable ou à un dommage de travaux publics : le Conseil d’État poursuit sa synthèse

Par un avis du 28 mai 2025, rendu à la demande du Tribunal administratif de Nîmes, le Conseil d’État poursuit sa synthèse du droit applicable aux demandes visant à enjoindre à une personne publique de mettre fin à un comportement dommageable ou à un dommage de travaux publics.

L’avis précise que « le juge ne peut pas faire droit à une demande tendant à ce qu’il soit enjoint à une personne publique de faire cesser les causes du dommage dont il est demandé réparation ou d’en pallier les effets, si les conditions d’engagement de la responsabilité de cette personne, notamment l’existence d’un dommage qui doit perdurer au jour où il statue, ne sont pas réunies, et ne peut ainsi y faire droit s’il estime que le requérant ne subit aucun préjudice indemnisable résultant de ce dommage ».

La possibilité de demander au juge de prononcer une injonction

Le Conseil d’État a longtemps refusé de prescrire à l’administration des mesures de nature à faire cesser un dommage continu dont elle est responsable, par exemple dû à la réalisation de travaux publics (CE 30 juill. 1913, Cne de La Courtine, Lebon 935 ; CE, sect., 1er juin 1951, SNCF, Lebon 313 ; 8 nov. 1963, Dame Barthélémy, Lebon 548) ou à l’interruption de tels travaux (CE 29 oct. 1954, Prudot, Lebon 567). Une première évolution a été ébauchée par les décisions Baey (CE 27 juill. 2015, n° 367484, Dalloz actualité, 31 juill. 2015, obs. M.-C. de Montecler ; Lebon ; AJDA 2015. 1514 ; ibid. 2277 , note A. Perrin ; AJCT 2016. 48, obs. S. Defix ; Dr. adm. 2015. Comm. 78, note C. Zacharie) et Commune de Chambéry (CE 18 mars 2019, n° 411462, Lebon ; AJDA 2019. 614 ; ibid. 2002 , note J.-P. Ferreira ). Ce dernier arrêt décide que lorsque le juge administratif condamne une personne publique responsable de dommages qui trouvent leur origine dans l’exécution de travaux publics ou dans l’existence ou le fonctionnement d’un ouvrage public, il peut, saisi de conclusions en ce sens, s’il constate qu’un dommage perdure à la date à laquelle il statue du fait de la faute que commet, en s’abstenant de prendre les mesures de nature à y mettre fin ou à en pallier les effets, la personne publique, enjoindre à celle-ci de prendre de telles mesures. Ces décisions posent les bases des pouvoirs d’injonction du juge administratif de la responsabilité en matière de travaux publics.

Peu après, le Conseil d’État est venu préciser, dans son arrêt Syndicat des copropriétaires du Monte Carlo Hill (CE 6 déc. 2019, n° 417167, Dalloz actualité, 10 déc. 2019, obs. M.-C. de Montecler ; Lebon avec les conclusions ; AJDA 2020. 296 , chron. C. Malverti et C. Beaufils ; ibid. 2019. 2519 ; AJCT 2020. 212, obs. M.-C. Rouault ; RFDA 2020. 121, concl. G. Pellissier ; ibid. 333, note J. Petit ; RTD com. 2020. 307, obs. F. Lombard ; Dr. adm. 2020, n° 3, comm. 16, note G. Éveillard ; CMP 2020, n° 2, comm. 63, note P. Soler-Couteaux ; Gaz. Pal. 2020, n° 5, 25, note T. Leleu) les conditions auxquelles doit répondre une demande d’injonction, en cas de dommages causés par des travaux ou un ouvrage publics, pour être ordonnée par le juge administratif. Il décide que lorsqu’un dommage perdure à la date à laquelle le juge statue, il lui appartient de rechercher si ce dommage trouve son origine dans « la faute que commet [la personne publique] en s’abstenant de prendre les mesures de nature à y mettre fin ou à en pallier les effets ». Si tel est le cas, l’injonction peut être prononcée. Dans cette hypothèse, la faute suppose que le comportement de la personne publique ait été défaillant, que l’exécution des travaux publics ait été défectueuse ou le fonctionnement de l’ouvrage public anormal, selon les critères posés par l’arrêt Commune de Chambéry et que le bilan des intérêts en présence ne justifie pas l’inaction de la personne publique, en d’autres termes en mettant en balance la nature des mesures à mettre en œuvre et leur coût d’une part et d’autre part le préjudice subi.

Dans cet arrêt, le Conseil d’État transpose la jurisprudence Baey aux dommages de travaux ou d’ouvrages publics en indiquant de quelle façon apprécier la faute et en précisant qu’en « l’absence de toute abstention fautive de la personne publique, le juge ne peut faire droit à une demande d’injonction, mais peut décider que l’administration aura le choix entre le versement à la victime d’une indemnité, dont il fixe le montant, et la réalisation...

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