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Article
Conditions de validité d’une prise en charge patronale des cotisations syndicales
Conditions de validité d’une prise en charge patronale des cotisations syndicales
Si un accord collectif peut prévoir la prise en charge par l’employeur d’une partie du montant des cotisations syndicales annuelles, c’est aux conditions que le dispositif conventionnel ne porte aucune atteinte à la liberté du salarié d’adhérer ou de ne pas adhérer au syndicat de son choix, ne permette pas à l’employeur de connaître l’identité des salariés adhérant aux organisations syndicales et bénéficie tant aux syndicats représentatifs qu’aux syndicats non représentatifs dans l’entreprise.
par Emmanuelle Clémentle 15 février 2021
Parmi les règles gouvernant l’exercice du droit syndical figure celle énoncée par l’article L. 2141-10 du code du travail qui permet la conclusion de conventions et d’accords collectifs plus favorables que la loi.
Face au taux particulièrement faible d’adhésion des salariés aux organisations syndicales, certains employeurs se saisissent de cette possibilité pour favoriser l’implantation syndicale dans l’entreprise.
À titre d’illustration, le nombre de délégués syndicaux peut être augmenté (Soc. 20 mars 2001, n° 99-60.496 P, Dr. soc. 2001. 568, obs. J. Savatier ), des moyens de fonctionnement ou d’action supplémentaires peuvent leur être octroyés (Soc. 23 juin 1999, n° 96-44.717 P, D. 1999. 191 ), des délégués syndicaux centraux peuvent être institués dans les cas où les dispositions légales n’ont pas rendu obligatoire cette institution ou une partie des cotisations des adhérents peut être prise en charge par l’employeur.
Tel était le cas dans l’affaire jugée le 27 janvier 2021. En l’espèce un accord collectif signé au sein d’une unité économique et sociale prévoyait le remboursement aux salariés syndiqués, par les sociétés composant cette UES et par l’intermédiaire des syndicats et d’un organisme tiers, du reste à charge des cotisations syndicales individuelles versées aux syndicats représentatifs, après soustraction de la partie fiscalement déductible de l’impôt sur le revenu.
Suite au recours en référé d’un syndicat, la cour d’appel de Paris avait suspendu l’application de ces dispositions conventionnelles. La Cour de cassation confirme cette suspension, jugeant qu’un tel financement par l’employeur d’une partie des cotisations au profit des seules organisations syndicales cause un trouble manifestement illicite.
Conditions de validité présidant à une prise en charge par l’employeur d’une partie du montant des cotisations syndicales annuelles
La Haute juridiction en profite pour préciser les conditions de validité présidant à la prise en charge par l’employeur d’une partie du montant des cotisations syndicales annuelles.
En premier lieu, le dispositif conventionnel ne doit porter aucune atteinte à la liberté du salarié d’adhérer ou de ne pas adhérer au syndicat de son choix, laquelle est consacrée par les dispositions de l’article L. 2141-1 du code du travail.
En second lieu, l’accord ne doit pas permettre à l’employeur de connaître l’identité des salariés adhérant aux organisations syndicales. Cette condition tire sa raison d’être du principe de non-discrimination issu des articles L. 1132-1 du code du travail et 225-1 du code pénal en vertu desquels l’employeur ne peut se fonder sur les activités syndicales d’un salarié pour arrêter une décision.
En troisième lieu, la prise en charge des cotisations doit bénéficier tant aux syndicats représentatifs qu’aux syndicats non représentatifs dans l’entreprise. Cette exigence apparaît conforme aux dispositions de l’article L. 2141-7 du code du travail qui interdit à l’employeur ou son représentant d’employer un moyen quelconque de pression en faveur ou à l’encontre d’une organisation syndicale. En l’espèce, il est constant que l’accord favorisait les organisations syndicales représentatives, dès lors qu’elles étaient seules concernées par la prise en charge des cotisations des salariés par l’employeur. À l’inverse, les organisations syndicales non représentatives, exclues du dispositif, s’en trouvaient nécessairement défavorisées.
Enfin, le montant de la participation de l’employeur ne doit pas représenter la totalité du montant de la cotisation due par le salarié, le cas échéant après déductions fiscales, au regard du critère d’indépendance visé à l’article L. 2121-1 du code du travail. Cette condition a pour elle la logique. L’indépendance d’un syndicat, critère de sa représentativité et même de son existence, s’entend d’une indépendance financière et d’une indépendance à l’égard de l’employeur (Soc. 26 février 2020, nos 19-19.397 et 19-19.492, Dr. soc. 2021. 82, note F. Petit ). Les cotisations prennent une part importante dans le financement des organisations syndicales. Leur prise en charge exclusive par l’employeur induit une emprise de ce dernier sur les organisations syndicales dont l’indépendance se trouve alors largement altérée.
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