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Le Conseil constitutionnel valide le report du second tour des municipales

L’exécutif peut être soulagé et satisfait : le Conseil constitutionnel a non seulement jugé conforme à la constitution le report en juin du second tour des élections municipales mais aussi admis que les mesures prises, notamment par ordonnances, concourent à garantir la sincérité du scrutin.

par Jean-Marc Pastorle 18 juin 2020

Saisis d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article 19 de la loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19, les juges de la rue de Montpensier ont examiné ces dispositions, qui ont suspendu les opérations électorales à l’issue du premier tour, à la lecture du principe de sincérité du scrutin, résultant de l’article 3 de la Constitution.

Motif impérieux justifié

Le Conseil constitutionnel précise que le législateur ne saurait, sans méconnaître les exigences de l’article 3 de la Constitution, autoriser une modification du déroulement des opérations électorales qu’à la condition « qu’elle soit justifiée par un motif impérieux d’intérêt général et que, par les modalités qu’il a retenues, il n’en résulte pas une méconnaissance du droit de suffrage, du principe de sincérité du scrutin ou de l’égalité devant le suffrage. »

Dans une rédaction limpide, il estime qu’en adoptant les dispositions contestées, « le législateur a entendu éviter que la tenue du deuxième tour de scrutin initialement prévu le 22 mars 2020 et la campagne électorale qui devait le précéder ne contribuent à la propagation de l’épidémie de covid-19, dans un contexte sanitaire ayant donné lieu à des mesures de confinement de la population ». Ces dispositions sont donc justifiées par un motif impérieux d’intérêt général.

L’argument des requérants faisant valoir que l’organisation du second tour avant la fin du mois de juin 2020 risquerait de nuire à la participation des électeurs est retourné par le Conseil constitutionnel qui considère que « les dispositions contestées ne favorisent pas par elles-mêmes l’abstention ». Pour autant, il reviendra, le cas échéant, « au juge de l’élection, saisi d’un tel grief, d’apprécier si le niveau de l’abstention a pu ou non altérer, dans les circonstances de l’espèce, la sincérité du scrutin. »

Garantie du droit de suffrage

Surtout, selon le Conseil constitutionnel, « plusieurs mesures d’adaptation du droit électoral contribuent à assurer, malgré le délai séparant les deux tours de scrutin, la continuité des opérations électorales, l’égalité entre les candidats et la sincérité du scrutin. » En particulier, l’ordonnance n° 2020-390 du 1er avril 2020 dispose que, sauf exceptions, le second tour du scrutin aura lieu à partir des listes électorales et de listes complémentaires établies pour le premier tour ; de plus, par dérogation au code électoral, les dispositions contestées permettent de majorer les plafonds de dépenses électorales applicables et d’obtenir le remboursement d’une partie des dépenses de propagande ; enfin, afin de préserver les possibilités de contester les résultats du premier tour en dépit de la suspension du scrutin, les électeurs ont pu, par dérogation au troisième alinéa de l’article L. 68 du code électoral, obtenir communication des listes d’émargement des bureaux de vote à compter de l’entrée en vigueur du décret de convocation pour le second tour et jusqu’à l’expiration du délai de recours contentieux.

Différence de traitement sur la durée du mandat

La dernière partie de la décision porte sur les conséquences du report du second tour sur les mandats des conseillers municipaux. S’il existe bien une durée différente de mandat entre les élus du premier tour et ceux élus à l’issue du second tour, « cette différence de traitement repose sur une différence de situation au regard de l’élection et répond directement à la volonté du législateur d’assurer la mise en œuvre des objectifs qu’il s’est fixés en reportant le second tour. » Et s’agissant des communes dans lesquelles un second tour est nécessaire, « les dispositions contestées n’ont aucune incidence sur les éventuelles contestations devant le juge de l’élection des opérations électorales du premier tour. »

Les premier et dernier alinéas du paragraphe I de l’article 19 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19, dans sa rédaction initiale, sont donc conformes à la Constitution.