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Contrôle du juge sur un refus de titularisation en fin de stage

Si, en principe, un refus de titularisation n’implique pas que le stagiaire puisse présenter ses observations, il en va autrement si les faits reprochés constituent des fautes disciplinaires.

par Marie-Christine de Monteclerle 2 mars 2020

L’administration peut se fonder sur des faits constitutifs d’une faute disciplinaire pour décider d’un refus de titularisation en fin de stage, dès lors que l’intéressé a été mis à même de faire valoir ses observations.

Le Conseil d’État était saisi par la commune de Marmande d’un pourvoi contre un arrêt de la cour administrative d’appel de Bordeaux annulant son refus de titulariser M. B…, adjoint technique territorial stagiaire. La décision était fondée sur des absences injustifiées et le refus de l’intéressé d’accomplir certaines tâches. La cour administrative d’appel avait estimé que ces faits ne pouvaient caractériser une insuffisance professionnelle justifiant un refus de titularisation au motif qu’ils étaient également susceptibles de constituer des fautes disciplinaires.

Cette affaire donne au Conseil d’État l’occasion de synthétiser sa jurisprudence sur le refus de titularisation. Il rappelle que le stagiaire se trouve dans « une situation probatoire et provisoire ». « La décision de ne pas le titulariser en fin de stage est fondée sur l’appréciation portée par l’autorité compétente sur son aptitude à exercer les fonctions auxquelles il peut être appelé et, de manière générale, sur sa manière de servir, et se trouve ainsi prise en considération de sa personne. »

Une décision soumise aux formes prévues par les textes

La décision de refus de titularisation « n’est soumise qu’aux formes et procédures expressément prévues par les lois et règlements ». En particulier, elle n’implique en principe ni communication du dossier ni que l’intéressé soit mis à même de présenter ses observations (CE, sect., 3 déc. 2003, req. n° 236485, Lebon p. 469 ; AJDA 2004. 30 , concl. M. Guyomar ; D. 2004. 33, et les obs. ; AJFP 2004. 107 ; RFDA 2004. 1014, obs. J.-G. Mahinga ). Elle ne peut être prise que si les faits que l’autorité retient « caractérisent des insuffisances dans l’exercice des fonctions et la manière de servir de l’intéressé ». Cependant, précise la haute juridiction, étendant une solution qu’elle avait adoptée récemment pour le refus de renouvellement d’un contrat (CE 19 déc. 2019, req. n° 423685, Commune du Vésinet, Lebon T. ; AJDA 2020. 13 ), « la circonstance que tout ou partie de tels faits seraient également susceptibles de caractériser des fautes disciplinaires ne fait pas obstacle à ce que l’autorité compétente prenne légalement une décision de refus de titularisation, pourvu que l’intéressé ait alors été mis à même de faire valoir ses observations ». La cour administrative d’appel de Bordeaux a donc commis une erreur de droit.

Pour apprécier la légalité d’une telle décision, « il incombe au juge de vérifier qu’elle ne repose pas sur des faits matériellement inexacts, qu’elle n’est entachée ni d’erreur de droit ni d’erreur manifeste dans l’appréciation de l’insuffisance professionnelle de l’intéressé, qu’elle ne revêt pas le caractère d’une sanction disciplinaire et n’est entachée d’aucun détournement de pouvoir et que, si elle est fondée sur des motifs qui caractérisent une insuffisance professionnelle mais aussi des fautes disciplinaires, l’intéressé a été mis à même de faire valoir ses observations ».