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Covid-19 : la Cour de cassation réaffirme le paiement des loyers !

Par deux arrêts rendus le 23 novembre 2022, la Cour de cassation a réaffirmé la position qu’elle avait adoptée dans ses arrêts du 30 juin 2022 selon laquelle les loyers commerciaux restent dus par le locataire, même en cas de fermeture des locaux pendant la période de confinement.

Contexte

Les deux arrêts du 23 novembre 2022 s’inscrivent dans la continuité des trois arrêts « pilotes » rendus par la Cour de cassation le 30 juin 2022 en faveur des bailleurs (Civ. 3e, 30 juin 2022, nos 21-20.127, 21-20.190 et 21-19.889, Dalloz actualité, 4 juill. 2022, obs. P. Gaiardo ; D. 2022. 1445 , note D. Houtcieff ; ibid. 1398, point de vue S. Tisseyre ; AJDI 2022. 605 , obs. J.-P. Blatter ; AJCT 2022. 579, obs. D. Lovato ; JT 2022, n° 255, p. 11, obs. X. Delpech ; RTD com. 2022. 435, étude F. Kendérian ; JCP E nov. 2022, n° 46, p. 1376, note O. Deshayes ; T. Genicon et Y.-M. Laithier, La lettre juridique, n° 914, 14 juill. 2022, lexbase, obs. B. Brignon ; JCP E, sept. 2022, n° 35, p. 1580, note J. Monéger ; JCP N sept. 2022, n° 36, p. 45 ; RLDA nov. 2022, n° 186, obs. A. Thobie et Y. Heyraud) aux termes desquels les loyers commerciaux restent dus par les locataires, même durant les périodes de fermeture des locaux.

Une telle confirmation de la troisième chambre civile était évidente. Comme l’a énoncé très justement un auteur, les arrêts du 30 juin 2022 « constituent l’épilogue de la saga judiciaire du sort des loyers covid » (F. Kendérian, préc.). D’aucuns ont souligné la coloration quelque peu « politico-économique » de ces arrêts au regard des nombreuses aides publiques octroyées aux entreprises éligibles dont ont pu bénéficier grand nombre de locataires (O. Deshayes ; T. Genicon et Y.-M. Laithier, préc. ; M. Mekki, préc.), et parmi lesquels les gestionnaires de résidences de tourisme (Décret n° 2020-371 du 30 mars 2020 relatif au fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation). Le Gouvernement, conscient de la situation économique et financière des résidences de tourisme en raison de la pandémie, avait en outre annoncé le « sauvetage » du tourisme (Rép. min. n° 38760, JOAN, 31 mai 2022, p. 3286, D. Cazarian).

À l’instar des arrêts de juin, la Cour régulatrice a écarté les arguments invoqués par les locataires relevant tant du droit commun des contrats que du droit des baux. Elle a réaffirmé dans les deux arrêts du 23 novembre que la mesure générale de police administrative portant interdiction de recevoir du public n’est pas constitutive d’une inexécution de l’obligation de délivrance et qu’elle ne peut pas être assimilée à la perte du local loué ce dont il résulte que l’obligation de payer le loyer n’est pas sérieusement contestable.

Elle se prononce néanmoins pour la première fois sur la question de l’applicabilité de la clause de suspension des loyers stipulée dans des baux.

Rappel des faits

Les faits des deux décisions rapportées sont sensiblement similaires. Des baux commerciaux portant sur des locaux situés dans des résidences de tourisme ont été consentis. Les locataires ont informé les bailleurs de leurs décisions de suspendre le paiement des loyers échus pendant la période de fermeture administrative des locaux pour lutter contre la propagation du virus covid-19 relative au premier confinement (soit de mars à juin 2020).

Les bailleurs ont assigné les locataires en référé en paiement de provisions correspondant à l’arriéré locatif.

Le juge des référés leur a, pour les deux contentieux, accordé la provision demandée retenant que l’obligation de payer n’était pas sérieusement contestable.

Bien que les fondements juridiques soulevés en appel ne soient pas identiques dans les arrêts rapportés, les locataires soutenaient communément que les loyers n’étaient pas dus compte tenu de leur impossibilité à jouir des locaux loués.

Sans surprise, les cours d’appel ont condamné les locataires à verser des provisions au titre des loyers impayés (Nancy, 9 févr. 2022, n° 21/01758 ; Chambéry, 29 juin 2021, n° 20/01402).

La Cour de cassation a approuvé les juges du fond. Aucun des arguments juridiques développés à l’occasion des pourvois n’a permis de reconnaître aux locataires la possibilité d’être déchargés du paiement des loyers, ce qui a conduit la Cour de cassation à admettre que l’obligation de payer le loyer n’était pas sérieusement contestable.

Sur l’absence de manquement à l’obligation de délivrance du bailleur

L’arrêt rendu sur le pourvoi n° 21-21.867 rassemble tous les arguments juridiques du débat, lesquels ont été rejetés un par un par la troisième chambre civile.

À l’instar des arrêts du 30 juin dernier, la Cour régulatrice a écarté le manquement à l’obligation de délivrance du bailleur. Reprenant la même formule que celle de l’arrêt du 30 juin 2022 rendu sur le pourvoi n° 21-20.127, la troisième chambre civile a rappelé que « l’effet de la mesure gouvernementale d’interdiction de recevoir du public, générale et temporaire et sans lien direct avec la destination contractuelle du local loué, ne peut être, d’une part, imputable aux...

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