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Cumul du délit d’association de malfaiteurs et de la circonstance aggravante de bande organisée

Le cumul de la circonstance aggravante de bande organisée et du délit d’association de malfaiteurs n’est pas contraire au principe ne bis in idem lorsque l’association de malfaiteurs vise la préparation de faits distincts.

par Fanny Charlentle 25 mai 2020

La Cour de cassation, dans l’arrêt du 22 avril 2020, s’est prononcée une nouvelle fois sur le respect du principe ne bis in idem en matière de cumul de qualifications. En l’espèce, le requérant a été condamné par la cour d’assises pour vol avec arme commis en bande organisée, vols en bande organisée et recels, séquestrations, association de malfaiteurs et infractions à la législation sur les armes et les explosifs en récidive. À l’issue de la confirmation de l’arrêt en appel, il forme un pourvoi en cassation et relève une atteinte au principe ne bis in idem, lequel énonce que des faits qui procèdent de manière indissociable d’une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent donner lieu, contre la même personne, à deux déclarations de culpabilité de nature pénale (Crim. 26 oct. 2016, n° 15-84.552, Dalloz actualité, 7 nov. 2016, obs. S. Fucini ; D. 2016. 2217 ; ibid. 2017. 2501, obs. G. Roujou de Boubée, T. Garé, C. Ginestet, M.-H. Gozzi, S. Mirabail et E. Tricoire ; AJ pénal 2017. 35, obs. J. Gallois ; RSC 2016. 778, obs. H. Matsopoulou ; Dr. pénal 2017. Comm. 4, obs. P. Conte ; JCP 2017. 16, note N. Catelan ; Gaz. Pal. 2017. 413, obs. S. Detraz). Il affirme que les éléments retenus pour caractériser l’association de malfaiteurs et la circonstance aggravante de bande organisée sont identiques. La haute juridiction rejette le moyen au motif que la cour d’assises a caractérisé, d’une part, la circonstance aggravante de bande organisée relativement aux faits de vol pour lesquels le requérant a été déclaré coupable et, d’autre part, l’infraction d’association de malfaiteurs visant la préparation de faits distincts, à savoir l’attaque de fourgons blindés. Les faits reprochés ne peuvent être considérés comme relevant d’une action unique. Ainsi, la cour admet le cumul entre le délit d’association de malfaiteurs et la circonstance aggravante de bande organisée dans l’hypothèse où le premier avait pour objectif la préparation d’infractions autres que celles appréhendées dans le cadre de la circonstance aggravante. Par cet arrêt, la cour se positionne dans la continuité de sa jurisprudence antérieure. Dans un arrêt de 2019, les juges ont fait preuve d’un raisonnement identique (Crim. 9 mai 2019, n° 18-82.885, Dalloz actualité, 28 mai 2019, obs. S. Fucini ; D. 2019. 1048 ; AJ pénal 2019. 380 ). De la même manière, la circonstance aggravante était rattachée à la tentative de vol tandis que le délit d’association de malfaiteurs avait pour but de sanctionner d’autres infractions.

Ensuite, la Cour de cassation donne des précisions sur les modalités d’application de l’article 327 du code de procédure pénale en son troisième alinéa, lequel a été intégré par la loi n° 2011-939 du 10 août 2011. Cette disposition est relative aux missions du président de la cour d’assises au début de l’audience. Celui-ci est tenu, en outre, en cause d’appel, d’exposer le sens de la décision rendue en premier ressort, de la motivation et, le cas échéant de la condamnation prononcée. Ce formalisme est destiné à informer les magistrats, les jurés et les parties de l’état du dossier. Le requérant reprochait au magistrat de ne pas avoir évoqué la motivation des juges du premier degré. Si le procès-verbal met en évidence le fait que cette carence résulte d’un accord avec les parties, les impératifs édictés par la disposition du code de procédure pénale sont, selon le requérant, d’ordre public. Il affirme que ces éléments impliquent que les parties ne peuvent y renoncer. Pour rejeter le moyen, la Cour de cassation relève qu’aucune atteinte n’a été portée aux droits de la défense de l’accusé. Il en résulte que le constat de la violation de l’article 327 du code de procédure pénale en son troisième alinéa est conditionné à une atteinte aux droits de la défense. Nous comprenons ainsi que ces mentions ne sont pas obligataires, une partie pouvant y renoncer en tout ou en partie dès lors qu’aucune atteinte aux droits de la défense n’en découle. Lors de sa création, cette disposition du code de procédure pénale avait été critiquée en ce qu’elle aboutirait à attenter à la neutralité du président de la cour d’assises, lequel pourrait, par cette information, orienter le point de vue des jurés, portant par là même atteinte aux droits de la défense et à l’égalité des armes (C. Guéry, La neutralité tu respecteras [mais ce sera difficile], AJ pénal 2012. 29 ). Dans un arrêt de 2014, les juges de cassation avaient indiqué que « la lecture de la motivation de la décision rendue en premier ressort […] ne porte atteinte ni au droit à un procès équitable ni aux droits de la défense de l’accusé, dès lors que [l]e magistrat doit indiquer les éléments à charge mais aussi à décharge résultant de la décision de mise en accusation et que la motivation retenue en première instance, faisant partie intégrante des débats, est soumise à la discussion contradictoire des parties » (Crim. 13 nov. 2014, n° 13-87.875, Dalloz actualité, 10 déc. 2014, obs. S. Anane). L’application des exigences de l’alinéa 3 de l’article 327 du code de procédure pénale assure ainsi incontestablement la protection des droits de la défense de l’accusé dans la tenue du procès d’assises.