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De la cause de l’obligation de restituer de l’emprunteur

Dans un arrêt rendu le 29 juin 2022, la première chambre civile de la Cour de cassation a précisé que le contrat de prêt consenti par un professionnel du crédit n’étant pas un contrat réel, l’existence comme l’exactitude de la cause de l’obligation de restitution doit être appréciée au moment de la conclusion du contrat.

Préalablement à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, la notion de cause était l’un de ces mécanismes fondamentaux qui restaient quelque peu nimbés de mystères tant leurs contours exacts étaient sujets à des conflits doctrinaux importants ; à travers notamment la distinction entre cause du contrat et cause de l’obligation (v. sur ce point M. Latina et G. Chantepie, Le nouveau droit des obligations. Commentaire théorique et pratique dans l’ordre du Code civil, 2e éd., Dalloz, 2018, p. 245, n° 284). La réforme a donc décidé de l’abandonner, mais cet abandon n’a été pour certains que sémantique tant la cause survit à travers les notions de contrepartie et de but (F. Terré, P. Simler, Y. Lequette et F. Chénedé, Droit civil. Les obligations, 12e éd., Dalloz, coll. « Précis », 2018, p. 439 s., nos 395 s.). L’arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 29 juin 2022 permet d’étudier la notion de cause de l’obligation de restitution dans le contrat de prêt. Reprenons les faits pour mieux en comprendre la portée. Un établissement bancaire consent à un particulier pour les besoins de son activité d’architecte un prêt de 180 000 € remboursable en 84 mensualités au taux de 5,44 % par année. Son épouse séparée de biens est intervenue en qualité de coemprunteur. Les deux emprunteurs ne paient plus malgré plusieurs mises en demeure ayant abouti à une déchéance du terme du prêt. La banque assigne donc en paiement l’épouse coemprunteur mais celle-ci meurt en cours d’instance laissant ses héritiers reprendre le procès. De son côté, son époux a été placé en liquidation judiciaire et c’est donc le liquidateur qui est intervenu ès qualités. Les héritiers de l’épouse formulent une demande reconventionnelle voyant dans le contrat de prêt, un contrat nul pour absence de cause. La cour d’appel de Rennes condamne les héritiers à payer une somme de 133 376,40 € au titre du capital restant dû et à une somme de 18 070,36 € au titre des échéances impayées en 2011. Elle estime que la qualité de tiers de l’épouse à l’entreprise de son conjoint importait peu dès lors que son obligation de restitution trouvait sa cause dans la remise des fonds. Les héritiers et l’emprunteur se pourvoient en cassation en estimant que ce raisonnement n’est pas pertinent....

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