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De la fraternité découle la liberté fondamentale d’aider autrui

Le juge des référés du tribunal administratif de Besançon a refusé de suspendre un arrêté antimendicité, estimant qu’il ne portait pas atteinte à la liberté fondamentale d’aider autrui.

par Marie-Christine de Monteclerle 10 septembre 2018

Dans une ordonnance du 28 août, le juge des référés du tribunal administratif de Besançon a identifié une nouvelle liberté fondamentale au sens de l’article L. 521-2 du code de justice administrative : celle « d’aider autrui dans un but humanitaire ».

Le juge était saisi par un militant associatif d’un recours contre un arrêté du maire de la cité bisontine interdisant, dans le centre de la ville, la consommation d’alcool, la mendicité, accompagnée ou non d’animaux, les regroupements ainsi que la station assise ou allongée lorsqu’elle constitue une entrave à la circulation publique. À l’encontre de cette mesure de police, le requérant invoquait le principe constitutionnel de fraternité, mis en lumière par une récente décision du Conseil constitutionnel (Cons. const. 6 juill. 2018, n° 2018-717/718 QPC, Dalloz actualité, 10 juill. 2018, obs. E. Maupin isset(node/191586) ? node/191586 : NULL, 'fragment' => isset() ? : NULL, 'absolute' => )) .'"'>191586).

Le juge estime que de ce principe « découle la liberté fondamentale d’aider autrui dans un but humanitaire ». En revanche, il rejette l’idée d’une quelconque liberté fondamentale de mendier. L’ordonnance admet qu’en édictant l’arrêté contesté, qui a pour effet d’éloigner du centre-ville certaines personnes particulièrement vulnérables, « le maire de la commune de Besançon a, indirectement mais nécessairement, porté atteinte à la liberté d’aider autrui, laquelle ne prend, parfois, spontanément corps qu’à la vue de personnes dans le besoin. Pour être effective, la liberté d’aider requiert en effet d’avoir conscience de l’opportunité d’en faire usage ».

La liberté d’aider autrui « ne revêt toutefois pas un caractère général et absolu et doit être conciliée, notamment, avec l’objectif de préservation de l’ordre public ». Or l’arrêté municipal est limité dans le temps et dans l’espace. Par ailleurs, il n’est pas démontré qu’il entrave l’action des associations d’aide aux plus démunis ni qu’il prive les particuliers de leur liberté d’aider les personnes en détresse. En revanche, les pièces du dossier attestent de la réalité des troubles à l’ordre public auxquels l’arrêté veut répondre. La mesure étant ainsi proportionnée, le recours est rejeté.

Trois jours après la décision, le maire de Besançon a abrogé son arrêté et en a repris un nouveau qui ne prohibe plus la mendicité. Tout recours du requérant serait ainsi privé d’objet. Le Conseil d’État ne sera donc pas amené pour l’instant à se prononcer sur la consécration de cette nouvelle liberté fondamentale.